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30 juin 2020

J'ai l'impression d'être trans, mais n'en suis vraiment pas sûr

Bonjour !
Depuis quelques temps ! J’ai l’impression d’être trans genre ! Mais je ne suis pas sûr de ça ! Et je n’ai pas forcément l’impression d’avoir eux des signe ou autre dans mon enfance ! Mise à part que je ne m’intéressait pas au foot ou autre ! J’étais plutôt solitaire !

Je n’ai pas eu d’expérience sexuel car je pense que j’ai peur ! Mais peur de quoi je ne sais pas ! Est-ce que c car je ne me sens pas très alèse ! Ou simplement que cela ne m’attire Pas car je ne vois que ma sexualité en tant que femme !

J’ai quelques complexes sur mon corp et ne me fait pas confiance sur certaines situations ! Mais j’ai des projets pour le futur !

Enfaite pour moi cela reste floue ! Je ne sais pas comment faire ? Si je suis trans ou pas ? Et surtout comment être sûr de ça ?
Merci beaucoup pour votre aide
Y.

Marianne

Bonjour Y!

Je prends la relève de Séré aujourd’hui. Si tu souhaites te rafraîchir la mémoire, tu peux cliquer ici pour retrouver sa réponse. C’est super que tu aies pensé à nous réécrire pour partager tes questionnements. Je te remercie de nous accorder ta confiance à nouveau et te félicite de chercher activement des repères pour démêler ta situation. Je résume : depuis un certain temps, tu as l’impression d’être trans sans en avoir la certitude. Cela t’étonne, car tu n’as pas vraiment remarqué d’indices particuliers concernant ton identité de genre pendant ton enfance. Tu te demandes comment savoir clairement si tu es trans ou non. Par ailleurs, tu mentionnes que tu n’as jamais eu de contacts sexuels avec d’autres personnes, que quelque chose t’effraie dans la sexualité et que tu ne comprends pas exactement pourquoi.

Reprenons du début, avec quelques définitions. Nous évoluons encore dans des sociétés qui ont tendance à prendre de grands raccourcis et à poser une adéquation entre le genre d’une personne et ses organes génitaux. On entend très souvent, et depuis notre plus jeune âge, que garçon/homme = pénis et fille/femme=vulve. Comme tu le sais, la réalité humaine est bien plus nuancée et diversifiée que cela.

  • Être trans, ça veut dire que notre genre ne correspond pas (pas du tout, pas tout à fait, pas parfaitement, pas entièrement, pas toujours, etc.) à celui qu’on nous a assigné à la naissance. Trans est un terme qui regroupe des identités binaires (comme homme ou femme) et non-binaires. Être non-binaire implique d’avoir une identité qui n’est pas bien reflétée dans un système de pensée qui offre uniquement deux options opposées, comme « homme ou femme » (le mot « binaire » renvoie à un système où il n’y a que deux options). Les catégories « exclusivement homme ou exclusivement femme » ne parviennent pas à bien rendre compte d’une identité non-binaire. Ainsi, un individu non-binaire pourrait être fluide, à la fois homme et femme, ni homme ni femme, tantôt plutôt homme et tantôt plutôt femme, etc.

  • Être cis, ça veut dire que notre genre correspond à celui qu’on nous a assigné à la naissance.

Chaque personne est unique, chaque personne – trans ou pas – a donc son propre parcours. Je ne peux pas te dire si tu es trans ou non. Je ne sais pas si ton genre correspond à celui qui t’a été attribué à la naissance. La seule personne qui est en mesure de le savoir, c’est toi. Il n’y a aucune liste de critères à remplir pour être « suffisamment trans », l’unique élément qui compte, c’est ta propre perception.

En lisant ton message, je comprends bien que ce n’est pas simple pour toi de cerner ton identité de genre. Ça peut être un processus qui prend beaucoup de temps. C’est correct de te donner du temps et de l’espace pour réfléchir, c’est valide de ne pas savoir avec certitude immédiatement. C’est tout à fait acceptable d’explorer et d’expérimenter si tu en as envie, et ce serait tout à fait valable de changer de direction en cours de route. Il n’y a pas de réponse toute faite, il n’y a pas de réponse universelle. Alors, le plus important, c’est de partir de toi, de te concentrer sur ce qui te fait sentir le mieux, le plus en accord avec toi-même. Cela peut impliquer une période d’essai-erreur.

Voici quelques pistes qui pourraient t’aider à mieux te situer.

  • Es-tu à l’aise avec le genre que ton entourage suppose être le tien? T’y reconnais-tu (entièrement, partiellement, etc.)? Penses-tu être plus à l’aise, moins à l’aise ou également à l’aise avec d’autres genres?

  • Si une personne inconnue t’appelait spontanément « madame », « monsieur » ou encore « mademoiselle » en te croisant dans la rue. Est-ce que certaines options te plairaient ou te déplairaient plus que d’autres? Saurais-tu dire pourquoi? Tes réactions viscérales peuvent te fournir des indices sur ton identité.

  • Quand tu es sur le web (forums, sections de commentaires, jeux vidéo, etc.) et que tu peux te choisir un pseudonyme, un avatar ou entrer en contact avec des gens qui ne te connaissent pas déjà, comment as-tu envie de te présenter?

  • Ressens-tu de la curiosité, de l’empathie, de l’envie, de la jalousie, du soulagement… quand tu penses à certains groupes de personnes en particulier (personnes non-binaires, hommes, femmes, hommes trans, hommes cis, femmes trans, femmes cis, etc.)? Si oui, saurais-tu dire pourquoi?

  • Si tu avais une baguette magique faisant en sorte que le monde entier te respecte à 100% et te perçoit selon le(s) genre(s) de ton choix, sans que cela cause des frictions ou des tensions, quel(s) serai(en)t ce(s) genre(s)?

  • Aimes-tu ton prénom, as-tu l’impression qu’il te colle bien à la peau? Préférerais-tu en utiliser un autre?

  • Voudrais-tu demander à des gens en qui tu as confiance de changer leurs accords quand iels (contraction de « ils » et « elles ») te parlent? Ça pourrait t’aider à comparer comment tu te sens quand on te décrit au masculin, au féminin ou avec des termes neutres.

  • Tu as peut-être remarqué que j’utilise des épithètes et des mots neutres – pouvant aussi bien correspondre à une personne non-binaire, une femme ou un homme – quand je m’adresse à toi. Qu’est-ce que cela te fait? Est-ce un soulagement? Est-ce que cela t’indiffère? Te dérange? Aurais-tu préféré que j’utilise des mots clairement féminins? Masculins? Parfois féminins, parfois masculins? Penses-tu aimer mieux des mots qui unissent plus manifestement le masculin et le féminin (ex. : te sens-tu confus.e, effrayé.e, choqué.e, heureux.se, soulagé.e…?)?

  • Aurais-tu envie de changer un peu ton allure pour voir ce qui te plaît et ce avec quoi tu es le plus à l’aise? Par exemple en optant pour des vêtements ou des accessoires différents, une nouvelle coupe de cheveux, un nouveau parfum, etc.? Si jamais cela t’inquiète d’attirer l’attention de tes proches pendant ces expérimentations et que tu n’as pas envie de leur parler de tes questionnements, ce serait toujours possible de dire que tu t’habilles / te coiffes / te maquilles / te présentes de telle manière parce que c’est la mode, que c’est confortable ou que telle célébrité a un style similaire.

  • Crois-tu que ce serait moins stressant pour toi de faire des tests « à petite échelle », c’est-à-dire en essayant de te demander « Est-ce que je suis à l’aise avec tel élément précis (surnom, prénom, pronom, odeur, habit, maquillage, vernis à ongles, démarche, façon de parler, de danser, etc.)? Est-ce que je me sens moi-même avec tel élément en particulier? » plutôt qu’en te posant la question générale « Suis-je trans? »? À force d’expérimentations, tu pourrais finir par connaître et accumuler les éléments qui te font sentir bien. Tu pourrais également repérer des indices permettant de tirer une conclusion un peu plus nette sur ton identité de genre.

Tu sais, c’est possible d’être trans sans en avoir conscience depuis la petite enfance. Les personnes trans sont sous-représentées dans les médias. C’est difficile de se reconnaître dans une identité quand on ne connaît pas les mots qui la décrivent et quand on n’a pas (ou très peu) accès à des modèles. D’ailleurs, les récits trans les plus largement diffusés reprennent souvent les mêmes éléments sensationnalistes et peuvent parfois nous faire oublier qu’il y a autant de manières d’être trans (et valide dans son identité) qu’il y a d’individus trans. Il n’est absolument pas obligatoire de correspondre à certains archétypes souvent montrés dans les médias pour être trans (et si jamais tu avais l’impression de correspondre à certains archétypes, ce serait valide aussi).

Par ailleurs, les orientations sexuelle (attirance physique, désir sexuel) et romantique (attirance amoureuse), l’expression de genre (manière de donner à voir sa combinaison personnelle de féminité et de masculinité), les caractéristiques corporelles (organes génitaux, voix, pilosité, taille, etc.) et l’identité de genre (sentiment intérieur d’être une femme, un homme, ni une femme ni un homme, non-binaire, fluide, etc.) sont parfois présentées comme des synonymes, des équivalents (ex. : penser qu’être un homme veut nécessairement dire être typiquement masculin, grand et musclé; être hétéro; avoir un pénis, une voix grave et de la barbe; aimer la bière, les sports de combat et les voitures; etc.). En réalité, ces éléments sont des facettes différentes de notre identité et toutes les combinaisons sont possibles et légitimes. Ce schéma illustre bien les possibilités infinies quant aux réalités humaines. C’est normal qu’on se questionne quand on a l’impression de ne pas correspondre pleinement aux scénarios traditionnels. À mon avis, ce n’est pas parce qu’il y a un problème avec soi-même en tant qu’individu, c’est plutôt qu’il y a un problème avec les quelques modèles qu’on reprend partout et idéalise en négligeant d’autres options légitimes. Le problème concerne le manque de nuances et de diversité des modèles proposés. Peut-être que tu es trans, peut-être que non. Je ne peux pas répondre à ta place. Ça ne dépend pas du monde extérieur ou de son opinion, ça dépend de comment toi tu te sens et de comment tu t’identifies.

Dans ta question, tu mentionnes ne jamais avoir eu de relations sexuelles et avoir plusieurs craintes et interrogations à ce sujet. D’abord, j’aimerais revenir sur le fait que l’asexualité (orientation des personnes qui ne ressentent pas – ou très peu – de désir sexuel envers les autres) est tout aussi valide que la zedsexualité (orientation des personnes qui peuvent ressentir du désir sexuel envers certains individus). Il n’y a personne d’autre que toi qui peut dire ce qui se passe dans ta tête, ton cœur et ton corps; il n’y a donc personne d’autre que toi qui peut déterminer ton orientation. Pour en savoir un peu plus sur l’asexualité, tu peux cliquer ici.

Ensuite, je crois qu’il est toujours important de se rappeler que les relations sexuelles ne constituent jamais, peu importent les circonstances, un passage obligé. Si tu n’as pas envie d’avoir des contacts sexuels, je t’invite à rester à l’écoute de tes propres limites. Elles sont importantes, valables et légitimes. On ne devrait jamais avoir à se forcer à faire quoi que ce soit dans un contexte sexuel.

Par ailleurs, avoir envie d’avoir des relations sexuelles n’empêche pas plusieurs éléments de demeurer potentiellement effrayants : la nouveauté et l’inconnu peuvent être très stressants; on peut avoir peur d’être ridicule, d’avoir mal, de faire mal, de ne pas assez bien « performer »; on peut ressentir de l’inquiétude à l’idée de se montrer vulnérable et de dévoiler une part intime de soi; on peut craindre de contracter une itss (infection transmissible sexuellement et par le sang); on peut avoir peur que la relation sexuelle mène à une grossesse non désirée, etc.

Tu n’es pas la seule personne à avoir des appréhensions quant à la sexualité. Voici quelques trucs qui pourraient aider à limiter ton malaise. Ce sera à toi de voir si tu as envie de les mettre en pratique.

  • Explorer par toi-même, sans partenaire, pour avoir une meilleure idée des types de caresses et de contacts qui sont agréables pour toi.

  • Cultiver ton propre imaginaire sexuel, réfléchir à ce qui te plaît, à ce qui t’excite.

  • Choisir des partenaires qui agissent et parlent avec respect, qui te font sentir à l’aise, désirable, enthousiaste et en sécurité.

  • Prendre le temps de discuter (des préférences sensuelles et sexuelles, envies, besoins, limites, inquiétudes, fantasmes, insécurités, visions, facteurs excitants… de chacun) avec tes partenaires. Si tu as de la difficulté à entamer ces conversations, tu pourras trouver un outil bien utile ici.

  • Choisir un endroit et un moment relax pour pouvoir expérimenter sans sentir que le temps presse ou que quelqu’un pourrait subitement te déranger.

  • T’informer sur les différentes méthodes de contraception, en discuter avec tes partenaires potentiel.le.s, choisir les méthodes de contraception les plus appropriées au contexte.

  • T’informer sur les différentes façons de limiter les risques de transmission d’itss, en discuter avec tes partenaires potentiel.le.s, choisir les stratégies les plus adéquates en fonction des spécificités de la situation.

  • Te procurer du lubrifiant (on en trouve notamment en pharmacie et sur internet) et l’utiliser généreusement lors des interactions sexuelles.

  • Te rappeler que les films, les séries et la pornographie présentent des mises en scène et des situations amplifiées, spectaculaires ou idéalisées; te rappeler que c’est normal (et souhaitable) que ta vie sexuelle ne soit pas identique à celle qui est créée sur les plateaux de tournage.

  • Te permettre de rire avec tes partenaires, sans malice, quand il y a de petits accrochages. C’est normal de faire face à des petits pépins ou de petites imperfections pendant une relation sexuelle. Toutes les personnes sexuellement actives auront, tôt ou tard et à plusieurs reprises, affaire à un corps qui fait des bruits rigolos; un jean qui reste coincé sur les mollets au lieu de glisser dans un mouvement fluide et gracieux; une agrafe, un bouton ou une fermeture éclair refusant de collaborer; une crampe musculaire dont on aurait préféré se passer… Te permettre de rigoler quand un imprévu survient peut faire diminuer de beaucoup la pression.

  • Essayer de te débarrasser de tes idées préconçues concernant ce qu’est une relation sexuelle « réussie » ou « typique » en général pour te concentrer plutôt sur ce qui est agréable spécifiquement pour les personnes impliquées.

Je reviens sur ce dernier point. On entend très souvent parler des mêmes scénarios sexuels, ce qui peut parfois nous donner l’impression qu’il s’agit de l’unique marche à suivre. Ces scripts peuvent s’implanter en nous et nous donner l’impression qu’il faut avoir un certain type de corps, un certain type de comportements… Il peut être très difficile de mettre de côté ces repères qui nous poussent à nous concentrer sur ce qu’on pense qu’on devrait être, devrait faire, devrait aimer… plutôt que sur ce qui nous correspond réellement. En réalité, ces devrait n’ont aucune autorité sur notre intimité. On a bien plus de chances de vivre des expériences satisfaisantes quand on est véritablement à l’écoute de ses propres particularités et de celles de ses partenaires plutôt que lorsqu’on cherche à suivre une liste de devrait.

Tu te demandes si voir ta sexualité en tant que femme te cause une sorte de blocage. Peut-être que oui, peut-être que non. Il n’y a que toi qui pourras le dire après avoir pris le temps de bien réfléchir. Je tiens aussi à te rappeler qu’au fond, pratiquement tous les comportements sexuels que tu peux imaginer sont accessibles à tout le monde. Embrasser, caresser, câliner, frotter, presser, lécher, sucer, mordiller, masser, utiliser des jouets, donner ou recevoir une pénétration… Aucun de ces actes n’est réservé à un genre en particulier ou à un type de corps en particulier. Tes partenaires et toi serez toujours libres d’adopter ou de rejeter ces pratiques en fonction de vos envies.

Je te laisse ci-dessous quelques réponses d’AlterHéros qui pourraient compléter tes réflexions.

J’espère que ce message pourra t’aider à y voir plus clair. Tu peux toujours réécrire à AlterHéros si tu en ressens le besoin.
Nous serons là, d’accord?

Bonnes réflexions,
Marianne

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