Je réalise que je suis apothisexuelle et uranic... mais j'ai peur de faire mon coming-out non-binaire...
Bonjour,
On ma assigné fille à la naissance et j’ai crue que je suis 100% cisgenre et hétéro à cause de l’heteronormativité et que je croyais qu’il n’existe que deux genres. Et finalement, je réalise que je suis apothisexuelle et uranic. Je suis encore en questionnement pour l’orientation romantique, car je suis tout simplement incapable de comprendre c’est quoi l’attraction romantique. Mais après avoir à peu près réglé les questionnements sur mon orientation, je me questionne sur mon identité de genre. Je me rend compte que j’ai honte de mon corps de femme. Je n’aime pas avoir des seins, ni une vulve, ni les menstruations. Je trouve ça inutile pour moi qui ne veux pas d’enfants ni de relation sexuelle. Ça me donne l’impression d’être un objet sexuel ambulant et je déteste ça. Puis je me rend compte que j’aurai aimé être née avec aucun sexe. Et je n’aime pas qu’on me catégorise comme une fille parceque je ne veux pas être associée à tous ces stéréotypes de filles. La logique veut donc que je soit non-binaire. J’ai peur de faire un coming out de non binaire, parceque j’ai peur qu’on ne me perçoive différemment ou qu’on pense que je veux juste attirer l’attention. J’ai peur de me placer moi-même dans la catégorie « differente » ou de me sentir encore plus seule que je ne me sent déjà. J’ai peur qu’on ne me considère pas légitime parceque je ressemble à une fille et parceque je garde mes pronoms féminins et mon sexe féminin (même si je ne l’apprécie pas) et mon nom.
Auriez-vous des conseils à me donner svp??? J’ai besoin de votre aide! Merci!
Bonjour à toi!
Merci beaucoup d’avoir envoyé ta question à AlterHéros. Il me fera vraiment plaisir d’y répondre!
Si je comprends bien, tu as beaucoup cheminé ces derniers temps dans tes questionnements par rapport à ton orientation sexuelle et romantique ainsi que ton identité de genre. Tu as réalisé que tu es apothisexuelle et uranic, et tu te demandes maintenant si tu es non-binaire. Tu as peur de faire un coming out en ce sens, car tu as peur qu’il soit mal reçu ou que ton identité ne soit pas perçue comme légitime.
D’abord, je veux te dire bravo, parce que je sais que ça peut être difficile ou effrayant de parler de nos questionnements en lien avec notre identité. Je suis vraiment content que tu aies trouvé AlterHéros et que tu aies eu le courage de nous écrire.
Prenons donc le temps de regarder ce que c’est, la non-binarité. Être non-binaire veut simplement dire qu’on a une identité de genre qui n’est pas exclusivement homme ou femme. Plusieurs personnes non-binaires s’identifient également comme trans, car être trans veut dire que notre identité de genre ne correspond pas au sexe qu’on nous a assigné à la naissance. Je suis non-binaire et je suis également trans car on m’a assigné le sexe féminin à la naissance, ce qui ne me correspond pas.
Non-binaire est un terme parapluie, ce qui veut dire qu’il rassemble plusieurs identités de genre différentes. Certaines personnes non-binaires vont donc se décrire en utilisant des termes plus précis comme agenre, neutre, demi-boy, bigenre, etc. Si tu veux en apprendre plus sur ces termes, je te suggère cet article. Bien sûr, une personne non-binaire peut aussi simplement se décrire comme non-binaire si elle le souhaite!
Il n’y a pas d’autres prérequis pour être non-binaire ou trans que de s’identifier ainsi. On n’a pas besoin de faire des démarches de transition ou même un coming-out pour être légitime dans ces identités. Il n’y a pas de look non-binaire, on ressemble à tout plein de choses! Moi par exemple, j’utilise le pronom iel, des accords masculins et je porte souvent des vêtements dits “féminins” comme des robes. Je connais beaucoup de personnes non-binaires qui n’ont pas vraiment changé leur apparence après leur coming-out tout comme j’en connais aussi plusieurs qui ont fait des transitions médicales. Il y a tellement de possibilités! De plus en plus, la société en général accepte que la non-binarité et la pluralité de vécus associés font partie intégrante de la diversité humaine. Bien sûr, il reste encore des préjugés à déconstruire et des milieux qui sont moins acceptants de nos réalités. C’est donc normal d’avoir peur de faire un coming-out. Tu peux trouver sur notre site une foule de trucs pour mieux te préparer si tu désires annoncer à tes ami.e.s ou ta famille que tu es non-binaires, dont cette merveilleuse réponse de maon collègue Maxime à la question Comment faire mon coming out en tant que gender fluid à ma famille?. En voici un extrait:
Bien sûr, le premier aspect à garder en tête est ta sécurité. Tu es la personne la mieux placée pour juger de ta situation familiale. Si tu penses que parler de ton identité de genre te mettrait en danger physique et/ou psychologique et que tu habites chez tes parents, sache qu’il est possible d’attendre. Si tel est ton cas, tu pourrais toujours en parler avec des ami.e.s de confiance qui pourraient te soutenir à l’école par exemple. Peut-être te doutes-tu déjà de comment tes parents pourraient réagir, mais parfois les réactions de l’entourage peuvent être un peu imprévisibles, ce qui peut amener des mauvaises mais aussi des bonnes surprises. Si tu veux avoir une idée de l’accueil que cette nouvelle pourrait recevoir, tu peux essayer de leur parler d’un.e ami.e trans/genderfluid (tu peux l’inventer) ou d’une célébrité ayant fait un coming out et jauger leurs réactions.
Si tu penses pouvoir faire un coming out en sécurité, il peut être intéressant d’avoir un.e allié.e. As-tu déjà parlé de ton identité de genre à un.e proche? Sinon, si tu as un frère, une soeur, un.e autre membre de la famille ou un.e ami.e qui va très probablement réagir positivement, cet.te allié.e pourrait te supporter et être de ton côté lorsque viendra le temps de faire un coming out à des personnes dont tu appréhendes davantage la réaction, qu’en penses-tu?
Aussi, as-tu un peu pensé à comment aimerais-tu en parler à ta famille? Certaines personnes préfèrent avoir une discussion, d’autres préfèrent écrire une lettre ou un courriel par exemple, ce qui peut avoir comme avantage de ne pas se faire interrompre et de laisser le temps à son destinataire d’y réfléchir. Dans le cas d’une conversation, mieux vaut se préparer et choisir un moment calme. Si tu souhaites en parler à certains membres de la famille et pas à d’autres, ou pas tous en même temps, c’est aussi une possibilité à considérer, tout en gardant à l’esprit qu’il se peut que tes parents en parlent entre eux. Tu as sûrement déjà une idée de la manière de procéder qui conviendrait le mieux à ta situation.
Une autre chose qui peut être utile c’est de penser à pourquoi tu veux faire un coming out. Ça peut sonner un peu bizarre comme ça, mais parfois ça aide à orienter la conversation. Discuter de tes attentes par rapport à ce sujet peut aussi aider ton interlocuteur à mieux comprendre. Ça peut être vraiment simple, par exemple, certaines personnes font des coming out pour se sentir plus authentique vis-à-vis de leurs relations, pour être plus libres d’être elles-mêmes ou pour demander des conseils ou du soutien. Certaines personnes s’attendent à ce que rien ne change suite à la conversation, d’autres aimeraient que leurs proches utilisent un nouveau prénom et/ou pronom, etc. C’est juste des exemples pour te donner des pistes de réflexion. Il est fort probable qu’un coming out comprenne une suite de plusieurs conversations. À toi de voir si tu veux parler de “tout” d’un seul coup ou en plusieurs étapes. Par exemple, dans le cas où tu désires que ta famille s’adresse à toi avec un prénom différent, tu pourrais leur en parler directement, ou alors leur expliquer ton identité en premier lieu, puis leur parler du prénom à un autre moment. Il n’y a pas de bonne ou mauvaise réponse, c’est comme tu le sens.
Comme tu l’as mentionné, c’est une bonne idée de se préparer et ça peut te mettre plus en confiance! Si tu décides de faire un coming out à des membres de ta famille, c’est probable que ceux-ci te posent des questions. Tu peux essayer d’anticiper leurs questions et te pratiquer à y répondre. Tu n’es pas obligé.e de répondre à des questions qui te mettent mal à l’aise.
J’aimerais ensuite te dire que tu n’as pas un corps de fille. En effet, si tu es une personne non-binaire, alors ton corps est un corps de personne non-binaire. Je ne dis pas ça pour diminuer la dysphorie (le malaise) que tu vis par rapport à ta poitrine et tes organes génitaux. Je sais à quel point c’est difficile de vivre de l’indifférence, du dégoût ou de la haine par rapport à des parties de son corps. Mais je veux que tu saches que ton corps est à toi! Tu n’as absolument pas besoin de le changer pour être légitime comme personne non-binaire. D’un autre côté, si tu veux explorer des façons de réduire le malaise que tu ressens par rapport à certaines parties de ton corps, il existe plusieurs options.
Par exemple, il y a la possibilité d’utiliser un binder, qui est une camisole de compression, pour diminuer l’apparence des seins. Aussi, à partir de 16 ans, il est possible d’avoir une mastectomie, soit une chirurgie pour retirer les seins. Pour ce qui est des règles, il y a différentes solutions, comme la prise de moyens de contraception qui empêche leur venue mensuelle ou en diminue la fréquence. À partir de 18 ans, il est aussi possible de se faire retirer l’utérus pour cesser d’avoir des règles et également d’avoir accès à des chirurgies génitales pour retirer le vagin et/ou construire un pénis.
Les personnes non-binaires ont accès à ces démarches! Par exemple, moi j’ai un stérilet, ce qui diminue beaucoup la fréquence et la durée de mes menstruations. J’ai aussi eu une chirurgie pour construire un pénis à partir de mon clitoris, tout en gardant mon vagin. Encore une fois, il y a un univers de possibilité! Si tu veux explorer différentes options de démarches médicales, je te suggère le site transitionner.info, qui regorge d’informations à ce sujet. C’est aussi totalement légitime si tu n’es pas prête à penser à ce genre de démarches.
Je pense que ce qui pourrait te faire du bien, c’est justement de rencontrer des personnes trans et non-binaires, afin de bénéficier du partage de leur vécu et poser tes questions si tu veux. Comme tu es en Estrie, je te suggère l’organisme TransEstrie, qui est un organisme par et pour les personnes trans, non-binaires et en questionnement. La totalité des employé.e.s de l’organisme sont trans et la majorité sont également non-binaires! Il y a plusieurs services qui pourraient t’intéresser je crois. Notamment, tu pourrais t’y procurer un binder si tu souhaites en essayer un et participer au groupe de discussion pour les jeunes de 12 à 17 ans pour rencontrer d’autres personnes qui partagent tes préoccupations. À TransEstrie comme à AlterHéros, personne ne remettra jamais en question comment tu ressens ou tu exprimes ton identité de genre. Il y a plusieurs façons pour toi d’entrer en contact avec l’organisme:
- Chaque jeudi et un samedi par mois, il y a un Sans Rendez-vous au local de l’organisme au centre-ville de Sherbrooke pour permettre à tout le monde qui en a besoin de venir jaser avec un.e intervenant.e, essayer un binder, emprunter un livre ou juste s’assoir dans un environnement bienveillant et profiter du wi-fi! Demain, c’est plutôt un pique-nique qui aura lieu devant l’hôtel de ville de Sherbrooke. Tu y serais la bienvenue! Pour connaître les dates des prochaines activités, tu peux consulter le calendrier ou encore la page Facebook de l’organisme.
- Tu peux participer aux groupes de discussion qui se rencontrent deux fois par mois. Un groupe sur deux se passe en présentiel et l’autre se passe sur zoom. Pour avoir tous les détails, tu peux rejoindre le groupe Facebook Groupes de discussion pour personnes trans et non-binaires en Estrie. Si tu n’es pas à l’aise de parler dans un groupe de discussion, ça ne t’empêche pas de participer quand même juste pour écouter! Il n’y a aucune pression.
- Si tu préfères parler seul.e à seul.e avec un.e intervenant.e ou prendre un rendez-vous pour venir chercher un binder ou un livre en dehors des Sans rendez-vous, tu peux écrire à services@transestrie.org
Pour terminer, je veux te suggérer quelques autres réponses qui pourraient t’intéresser:
- Je me sens demi-girl, mais je me sens complètement illégitime…
- J’ai l’impression d’être un.e imposteur.e et de ne pas être « assez non-binaire » pour en faire partie ou d’être « trop cis » pour être non-binaire.
- Suis-je obligé.e de transitionner si je suis non-binaire?
- Puis-je me définir en tant que ni fille, ni garçon même si je me dis lesbienne et même si j’étais vraiment féminine avant?
- Est-ce possible de se faire enlever les seins au complet sans passer par un psy?
J’espère que ma réponse t’aide! N’hésite surtout pas à nous réécrire si tu as d’autres questions ou même juste pour donner des nouvelles. Ça nous fera toujours plaisir de te répondre.
Bon courage!
Séré, intervenant pour AlterHéros