Je ne sais pas trop par où commencer dans ce processus d'épanouissement de ma bisexualité...
Salut je suis bisexuel et j’ai fais mon coming out à mon entourage le plus proche cette année et ça c’est très bien passé. J’ai maintenant envie de sortir de ma coquille, rencontré de nouvelles personnes, m’afficher et m’assumer mais je suis saisie par beaucoup de peur. Jusqu’à ce jour je me suis toujours comporté comme étant hétérosexuel et je n’ai eu aucune nouvelle relation depuis plusieurs années. Je ne sais pas trop par où commencer dans ce processus d’épanouissement mais j’ai besoin d’avancer. J’aimerais qu’on m’aide.
Merci.
Frederik
Salut Frederik!
Merci grandement pour la confiance que tu accordes envers l’équipe d’AlterHéros! C’est super touchant de recevoir ton message et il me fait grandement plaisir de pouvoir te répondre aujourd’hui. J’aimerais d’abord et avant tout te féliciter pour la route que tu as parcouru récemment! C’est super cool que tu te définisses comme bisexuel et que tu aies reçu un accueil positif de la part de tes proches! C’est tellement important de se sentir validé et soutenu par les gens que nous aimons!
Tu affirmes vouloir sortir de ta coquille, rencontrer de nouvelles personnes, t’afficher et t’assumer en tant qu’homme bisexuel, mais que tu es saisi par un grand sentiment de peur. L’inconnu, ça fait peur, n’est-ce pas? 😉 Ne t’inquiètes pas, ces sentiments sont complètements normaux! Nous aborderons tout cela au cours de cette réponse. Mais je tiens encore une fois à souligner tout le chemin que tu as parcouru et te féliciter de nous avoir écrit. Je crois que c’est un excellent réflexe et que cela démontre très bien ta volonté de d’émanciper et t’épanouir en tant que personne bisexuelle. On est là pour ça!
Pour commencer, tu fais référence à un sentiment de peur qui te fige à l’idée d’explorer plus activement ta bisexualité. Est-ce que tu sais un peu d’où provient cette peur? Est-ce une peur de l’inconnu, en raison du fait que les dimensions des rencontres en hommes et de la revendication d’une identité bisexuelle sont nouvelles pour toi? Une peur de possibles réactions négatives de personnes autour de toi face au dévoilement de ta bisexualité? Ou bien, serait-ce possible qu’inconsciemment, tu aies intériorisé certaines idées négatives entourant l’homosexualité et la bisexualité, ce qui te freine dans ton processus d’émancipation? Je m’explique! C’est tout un défi de se départir de toutes les idées négatives que l’on intériorise inconsciemment pendant notre jeunesse, notre adolescence, et même à l’âge adulte! Nos sociétés tendent toujours à valoriser l’hétérosexualité au détriment de toutes les autres orientations sexuelles. Cela peut être déboussolant d’être confronté au fait que nous n’appartenons pas nécessairement à ce modèle hétéronormatif. Encore plus confrontant lorsqu’on entend plein de stéréotypes faux entourant la bisexualité et que l’on doit justifier notre bisexualité autant auprès des hommes homosexuels que des femmes hétérosexuelles que nous rencontrons… Pour reprendre mes mots de cette réponse « L’hétéronormativité renvoie à l’idéologie dominante selon laquelle la norme sociale à laquelle tous les individus devraient se conformer est l’hétérosexualité. Il s’agit de cette pensée selon laquelle les rôles sociaux, les genres, les sexes et les sexualités devraient correspondre à un modèle hétérosexuel. Ce système de valeur est souvent inconscient, comme le sont d’autres systèmes d’oppression comme le sexisme ou le racisme. On ne naît pas homophobe par exemple, mais on le devient : en grandissant on vient à adhérer et à intérioriser les idées selon lesquelles l’homosexualité ou la bisexualité sont des orientations inférieures à l’hétérosexualité. Ces idées sont véhiculées par divers moyens, que ce soit pas nos familles ou nos institutions (le mariage, l’adoption, les médias, la façon dont les livres d’école traitent de la sexualité, le traitement social de la diversité sexuelle dans différentes institutions religieuses, etc). Ainsi, inconsciemment, on intériorise l’idée selon laquelle nous devons être hétéro. À chaque souper familial de notre enfance par exemple, il y a probablement eu cette grande tante qui te demandait à chaque fois si tu avais une petite copine, sans jamais ouvrir la porte à la possibilité qu’il se peut que ce soit également un copain. Sans cette ouverture de la part de cette tante et par peur des possibles réactions, il est fort compréhensible que l’on se soit construits de faux personnages pour plaire à notre entourage […] simplement parce que jamais dans notre enfance ou adolescence nous avons ressenti que c’était tout simplement une possibilité valide et positive de revendiquer une orientation sexuelle autre que l’hétérosexualité. C’est la raison pour laquelle nous décrivons ce phénomène la contrainte à l’hétérosexualité. Or, nous sommes de plus en plus nombreux et nombreuses, comme chez AlterHéros, à revendiquer un changement de discours et de mentalité, à travailler directement avec les jeunes d’ici et d’ailleurs pour rendre visible que l’amour et la sexualité peuvent s’inscrire à l’extérieur de l’hétérosexualité.»
Ouf, c’était une grosse citation ça! La raison pour laquelle je voulais prendre le temps de parler d’hétéronormativité, c’est simplement pour t’inviter à être indulgent envers toi-même. C’est un sacré gros travail de se départir d’idées négatives que nous avons pu intériorisées envers la bisexualité et les rencontres entre hommes. Il est ainsi possible que cela entretienne un sentiment de peur à l’idée de s’afficher dans l’espace public en tant qu’homme bisexuel. Je comprends entièrement cette crainte, c’est profond et inexplicable parfois, mais ça se manifeste souvent par un sentiment de blocage. L’important, c’est d’écouter tes limites, tes besoins ainsi que de respecter ton propre rythme dans ce processus. Et n’oublie pas que tu n’es pas seul à traverser ces sentiments! À tout moment, tu peux nous écrire pour ventiler et brainstormer sur la suite des choses!
Maintenant, comment avancer dans la découverte de tes attirances tout en douceur et déconstruire tranquillement ces sentiments de peur qui t’habitent? Et bien, je tiens à souligner que ce travail difficile, tu l’as déjà amorcé en nous écrivant. Ce cheminement, tu le fais un peu plus à tous les jours. J’espère que tu le remarques aussi. Sinon, plus en détails, il y a plein de pistes d’actions que tu peux entreprendre pour tenter de transformer tranquillement ce sentiment de peur qui t’habite en un sentiment de fierté d’être simplement toi-même. Par exemple, il est possible d’échanger avec des personnes qui ont un vécu similaire au tien, de t’impliquer dans un organisme LGBTQ+ en tant que bénévole, de t’informer sur l’histoire riche de nos communautés LGBTQ+ à travers la littérature, les séries Netflix et les documentaires, de participer à divers événements par et pour les communautés LGBTQ+ et même de t’inscrire sur différents sites de rencontre pour hommes qui aiment les hommes.
Pour citer cette réponse : «Il existe de nombreux sites de rencontre dédiés ou utilisés par des hommes homosexuels ou bisexuels. On peut penser à Gay411 ou OkCupid par exemple. Ces sites nécessitent de se créer un compte et de répondre à quelques questions en remplissant un profil. Si tu as un téléphone intelligent, il est aussi possible d’utiliser des applications de rencontre comme Grindr ou Scruff [qui sont largement plus populaires]. Ces outils numériques peuvent être intéressants pour prendre un premier contact avec un homme et de planifier une rencontre en vrai. Naviguer les sites ou applications de rencontre n’est pas toujours évident : cela peut parfois être frustrant et décourageant. Toutefois, de récentes études suggèrent que près de 70% des hommes homosexuels ou bisexuels ont rencontré leur(s) partenaire(s) via ces outils numériques en 2010… Comme quoi ces applications peuvent être utiles pour certaines personnes! Un point positif important de ces outils numériques, c’est que selon la taille de la ville où tu habites, les applications permettent d’avoir une idée des différents hommes intéressés à rencontrer d’autres hommes dans ta région. Advenant l’absence de milieux de socialisation pour la communauté LGBTQ+, ces applications peuvent être un bel outils pour rencontrer d’autres hommes.» Il n’en reste que tu es l’expert de ta propre situation et tu sais ce qui est mieux pour toi. Je me permets néanmoins de te partager mes réflexions à ce sujet. J’ai honnêtement utilisé beaucoup les applications de rencontre dans ma vie, et en particulier lorsque j’habitais en campagne. Malgré tous les côtés dérangeants de ce type de socialisation, ces applications m’ont également aidé à briser une forme d’isolement social. En effet, cela m’a permis de rentrer en contact avec différents garçons de la ville où j’habitais, mais également des petites municipalités autour. Je me suis fait des amis gais ou bisexuels de cette façon, rencontré trois différents garçons avec qui j’ai fait un p’tit bout de chemin amoureux, agi en tant que guide touristique de la région pour des touristes homosexuels venus de l’extérieur, etc. Bref, les applications de rencontre ne sont qu’un outils. Tout dépend de comment on les utilise. Cela peut être un outils intéressant pour rencontrer d’autres garçons lorsque la grosseur du territoire et la densité de population ont un impact direct sur les possibilités de rencontres.
Ensuite, les évènements LGBTQ+ sont une excellente façon de soutenir une cause qui nous tient à coeur tout en étant une occasion intéressante de rencontrer d’autres personnes. Les programmations d’événements LGBTQ+ sont de plus en plus nombreuses : que ce soit via des associations sportives LGBTQ+, des conférences scientifiques, des événements à caractère social ou festif, etc. C’est une façon de pouvoir faire des rencontres dans un environnement social sécuritaire où toutes et tous demeurent authentiques. Dans ces événements, il est parfois plus facile de débuter une conversation avec quelqu’un qui semble nous intéresser! Mais surtout, ces événements offrent un environnement sécuritaire où tu n’as pas à craindre les réactions négatives des autres en fonction de ton orientation sexuelle (Bon, soyons honnêtes, il y a encore malheureusement des personnes ignorantes concernant la bisexualité et qui auront tendance à invisibiliser les spécificités de ton orientation…). En parlant d’événements, il y a la programmation de Fierté Montréal qui est officiellement en ligne et qui aura lieu du 9 au 15 août 2021.
Est-ce que tu savais que le 23 septembre est la journée annuelle internationale pour la visibilité de la bisexualité et des personnes bisexuelles? Cela peut être un chouette moment pour prendre parole sur les différents médias sociaux et de parler des différents défis que tu vis en tant qu’homme bisexuel. Ou tout simplement pour partager du contenu d’éducation concernant la bisexualité! Les médias sociaux peuvent être une grande partie de nous, dépendant des personnes, et peuvent être un outils sur comment on souhaite se présenter aux autres. Cela peut être un des éléments à prendre en compte lorsque tu fais référence à t’afficher et t’assumer. 🙂
Je te laisse au passage ces différentes réponses pouvant compléter mes présents mots. Ces dernières explorent la bisexualité, les premières relations entre hommes, la communauté LGBTQ+ et la vie rurale en tant que personne LGBTQ+! Bonne lecture!
–Quelles sont les précautions à prendre lors d’une première relation sexuelle entre hommes?
–Pouvez-vous me dire des choses positives sur l’homosexualité pour me rassurer?
–Comment rencontrer le bon copain en étant homosexuel dans une région du Québec?
–Comment dire à un garçon que je m’intéresse à lui sans craindre une réaction homophobe?
–J’ai beaucoup de questions concernant ma bisexualité.
Et n’hésite pas à nous contacter de nouveau si tu en ressens le besoin ou simplement pour nous donner de tes nouvelles! Il nous fera toujours plaisir de pouvoir discuter avec toi! Et bienvenu dans notre grande famille! <3
Solidairement,
Guillaume (il/he), pour AlterHéros