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13 octobre 2021

Je m'interroge sur mon identité de genre depuis la découverte de ma bisexualité...

Bonjour, je souhaite avoir des réponses concernant ma situation: cela fait bientôt 2 mois que j’interroge mon identité de genre, ces questionnements font suite à la découverte de ma bisexualité et produisent en moi beaucoup d’incertitude et donc d’angoisse. Mes états d’esprit sont très instables, certains jours je suis serein, d’autres je ressens un malaise en moi quand j’y pense, et encore d’autres j’angoisse énormément.
Je me suis déjà posé la question de si mon identité de genre correspondait à mon sexe masculin, je me suis dis que oui j’étais un homme mais que cela ne signifie pas grand chose pour moi. En effet, je préfère être genré au masculin (bien qu’à présent les façons de me genrer me font penser à mes questionnements) mais si l’on me genre au féminin, je ne serai que surpris sans que cela me révolte.
J’ai 15 ans, j’ai toujours été en adéquation avec mon genre, je me suis réjouis de ma puberté et mon envie d’être un «vrai» homme m’a pas mal animé pendant ma vie et continue de le faire. Je sais que l’identité de genre est complexe, c’est pour cela que j’aimerai que vous m’aidiez à avancer dans cette période angoissante.

Sandout

Marianne

Salut Sandout, 

 

Merci de nous écrire, ça prend toujours du courage pour s’ouvrir et confier aux autres nos réflexions intimes!

 

Depuis environ deux mois, tu te poses beaucoup de questions à propos de ton identité de genre et ça te fait traverser des montagnes russes d’émotions. Tu mentionnes que tu as commencé à avoir ces questionnements après avoir pris conscience de ta bisexualité. D’abord, je te félicite d’être à l’écoute de toi-même. Je sais que le quotidien peut être difficile quand on se pose de grosses questions à propos de son identité. C’est un très bon réflexe de nous faire signe et de chercher activement du soutien. Aurais-tu envie de nous en dire un peu plus sur ce qui te tracasse ou ce qui te cause du malaise?

 

Je tiens à te rassurer : les questions que tu te poses sont normales et tu n’es absolument pas la seule personne dans cette situation! Tu as raison quand tu dis que l’identité de genre peut être une chose complexe. Et ça peut être encore plus compliqué de s’y retrouver quand on ajoute les stéréotypes, les préjugés, la pression extérieure, la méconnaissance… Fiou! Essayons d’y faire un peu de ménage ensemble.  

 

L’identité de genre concerne le sentiment profond et intérieur d’être homme, femme, ni homme ni femme, à la fois homme et femme, tantôt plutôt homme et tantôt plutôt femme, etc. On entend souvent dire qu’une personne est soit un homme, soit une femme, mais la vérité est qu’il y a une multitude d’autres possibilités. Il existe des identités binaires (comme dans le cas d’une personne qui serait « exclusivement et constamment homme » ou encore « exclusivement et constamment femme ») et non-binaires (comme dans le cas d’une personne qui aurait un genre fluide ou changeant, d’une personne qui aurait un genre neutre, d’une personne qui n’aurait aucun genre, d’une personne qui aurait plusieurs genres, etc.). Notre genre dépend de notre perception de nous-mêmes. 

 

Es-tu capable de voir ce qui peut alimenter tes questionnements et tes angoisses? Est-ce que ça te semble lié à des événements particuliers? Tu dis que les questions sont survenues après la découverte de ta bisexualité. C’est fréquent et normal de douter de plusieurs aspects de notre vie quand on prend nouvellement conscience d’une facette de soi-même. Ça arrive qu’on ressente le besoin de vérifier si ce qu’on a longtemps tenu pour acquis est fondé et nous correspond réellement. C’est un processus qui est parfois très déstabilisant, mais qui nous permet de mieux nous connaître au bout du compte. 

 

Tu expliques que tu as toujours eu l’impression que le genre masculin te correspond plutôt bien. Tu préfères être genré au masculin, mais ça ne veut pas dire grand-chose pour toi. Tu vivrais de la surprise si on parlait de toi au féminin, mais ça ne te choquerait pas tant que ça. Certaines personnes accordent une très grande importance à leur(s) genre(s). D’autres voient leur(s) genre(s) comme un aspect secondaire, voire négligeable, de leur identité. Toutes ces options sont valides. Chaque individu a une relation personnelle et unique avec son ou ses propres genres. De ton côté, qu’est-ce que tu en penses?  

 

Par ailleurs, c’est super que tu sois enthousiaste face à ta puberté! Je suis contente que cette série de changements te réjouisse! C’est tant mieux si tu as l’impression de devenir plus viril et que ça te plaît! Je tiens quand même à te rappeler qu’il est souvent préférable de faire preuve de prudence avec des mots comme « vrai homme ». En général, ce qui alimente l’idée d’un « vrai homme » (ou d’une « vraie femme »), ce sont des stéréotypes. Et j’imagine que je ne t’apprends rien quand je te dis que :

  1. c’est très rare qu’un être humain corresponde à tous les stéréotypes qui existent à propos de son ou ses genres, c’est normal et correct de ne pas correspondre à certains stéréotypes et ça ne fait pas de nous des personnes « moins bonnes » ou « moins vraies »;
  2. une personne n’a pas besoin de répondre à une série de critères stéréotypés pour être réellement homme, réellement femme ou réellement non-binaire (tu trouveras la définition de non-binaire ainsi que celle de nombreux termes concernant les orientations sexuelles et les identités de genre en cliquant ici). 

Le seul critère qui est vraiment important, c’est de penser soi-même que certaines étiquettes (homme, femme, personne non-binaire, personne au genre neutre, personne au genre fluide, etc.) nous conviennent bien. Tu resteras toujours une vraie personne, peu importe les différentes caractéristiques de ton identité! 😉 

 

Certaines personnes ont besoin de plus de temps pour bien cerner leur identité de genre. C’est légitime et c’est normal. Aurais-tu envie de faire des expérimentations de ce côté? Aurais-tu envie, par exemple, de te représenter (en dessins, avec des avatars ou des pseudos sur Internet ou dans des jeux vidéo, en écrivant des histoires, en fermant les yeux et en faisant aller ton imagination…) de manière plus féminine, plus neutre ou plus masculine? 

 

Si tu pouvais claquer des doigts et faire en sorte que tout le monde te voie selon le(s) genre(s) de ton choix et te traite avec respect, quel(s) genre(s) choisirais-tu? 

 

As-tu l’impression que tu ressentirais des émotions agréables si les gens te percevaient autrement qu’entièrement comme un jeune homme? 

 

Comment te sens-tu quand tu penses au fait que certaines personnes n’accordent pratiquement aucune importance à leur(s) genre(s), n’ont aucun genre, ont plusieurs genres ou encore ont un genre qui change à travers le temps? As-tu l’impression que ça pourrait ressembler à ce que tu vis? Aurais-tu envie d’en savoir davantage à ces sujets? 

 

Ton message m’a fait penser à une réponse que Maxime a rédigée cet été pour une personne qui se demandait comment savoir qu’on a trouvé notre « bonne » identité de genre. Je t’en recopie un passage : Pour ce qui est de trouver La Bonne Identité, je dirais que pour certain.e.s, il y a un événement précis de déclic, un moment de « ah ok! », mais pas pour toustes. Pour d’autres, il peut s’agir d’un cheminement plus long ou complexe qui passe par plus d’étapes et qui n’est pas nécessairement linéaire. D’autres personnes revendiquent également le fait d’être en questionnement comme le principal facteur identitaire concernant leur genre! Ce que je veux dire par là, c’est qu’il est possible de trouver une identité qui fonctionne puis de réaliser plus tard qu’elle nous convient plus ou moins, ou encore d’être à mi-chemin entre deux identités ou plus, ou encore que notre identité change selon le contexte. C’est aussi très possible de ne jamais trouver de mot qui nous décrit parfaitement dans toutes nos nuances et nos complexités. J’espère ne pas trop te décourager en disant cela! Être en questionnement n’est pas toujours quelque chose de triste ou d’effrayant, ne pas se limiter ou se réduire à une case peut également être quelque chose de libérateur et de radical.

 

Je te propose de jeter un coup d’œil à ces deux schémas. Je trouve que le premier fait bien ressortir l’idée que les identités de genre sont sur un spectre (il ne s’agit pas nécessairement de cocher une case ou une autre, on peut se situer à différents degrés sur le spectre). Ce schéma indique aussi que notre identité de genre est une caractéristique indépendante et différente de notre expression de genre (notre manière de nous présenter, notre manière de reprendre ou de rejeter les codes de la féminité et de la masculinité à l’aide de nos vêtements, de notre coiffure, de notre façon de bouger ou de parler, de nos activités, etc.), de notre sexe assigné à la naissance ainsi que de nos attirances sexuelles et sentimentales.

 

 

Le deuxième schéma donne plusieurs exemples d’identités non-binaires (on n’en entend généralement pas assez parler, il se peut donc que tu découvres des mots et des possibilités). Peut-être que tu y trouveras des pistes faisant écho à ton propre vécu. 

Pour poursuivre tes réflexions, tu peux aussi consulter ces réponses d’AlterHéros. Elles traitent de sujets similaires ou complémentaires à ce dont tu parles.

 

Si tu le souhaites, tu peux directement aller parcourir la section « En questionnement / Identité de genre » de notre site web. 

 

Si tu continues d’avoir des doutes et que tu as l’impression que l’identité « entièrement et constamment homme » ne te convient pas tout à fait, je te suggère de jeter un coup d’œil à cette liste d’organismes qui s’impliquent auprès des personnes trans ou en questionnement (on dit qu’une personne est trans lorsque son identité de genre n’est pas identique au genre qu’on lui a attribué au moment de sa naissance).

 

Je te laisse également quelques liens au cas où tu aurais envie de parler au téléphone ou de chatter avec des organismes situés un peu plus près de chez toi. 

 

Étant donné que tes réflexions sont inconfortables et envahissantes certains jours, je t’invite à prendre soin de toi. Même si ça semble bien simple, parfois on l’oublie. Que dirais-tu de prendre du temps pour te reposer, pour essayer de te changer les idées, pour parler de ce que tu vis (avec tes proches ou avec des organismes), etc.? Plus tu seras en forme, moins tu risques de sentir que tes questionnements t’écrasent ou t’étouffent. Si tu sens que ton angoisse empire, tu peux également demander à consulter certain·e·s intervenant·e·s de ton école ou de ta ville (psychologues, travailleuses sociales et travailleurs sociaux, etc.). Leurs services sont confidentiels et il n’y a pas de honte à y avoir quand on demande un coup de main pour apprivoiser des moments difficiles.  

 

Tu peux nous réécrire quand tu le souhaites!

 

On pense à toi et on est avec toi! 

 

Marianne (elle/she), bénévole pour AlterHéros

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