Je pleure et je suis au bord du suicide depuis que ma fille a annoncé être homosexuelle...
[Avertissement / Trigger Warning : Cette question/réponse traite d’un sujet pouvant déclencher des émotions fortes. Celle-ci aborde le sujet du suicide. Si vous ressentez le besoin de parler, n’hésitez pas à nous écrire.]
Ma fille devait se marier elle vivait depuis 10 ans ac un homme mon gendre que je considérais comme mon fils
14 jours avant le mariage elle a tout envoyé baladé et nous a annoncer être homosexuelle j allais être operee d un cancer
Depuis je pleure je suis au bord du suicide
Je n accepte pas je ne comprends pas
Je ne sais pas ce que j ai mal fais je voulais parler ac d aitres parents je suis suivi psychiatriquement et psychologiquement
J en peux plus de vivre
Je veux en finir
Merci de m avoir lu
Laure
Bonjour Laure!
Je suis contente de voir que vous nous ayez trouvé et que vous fassiez confiance à AlterHéros pour répondre à vos questionnements par rapport à ce qu’il vous arrive. Vous voulez des réponses à vos questions et je suis fière de voir le cheminement que vous avez fait jusqu’à aujourd’hui, en étant suivie par un·e psychologue.
Si je comprends bien, votre fille vous a annoncé 14 jours avant son mariage avec un homme qu’elle était lesbienne et depuis ce temps, vous avez des pensées suicidaires et vous vous demandez ce que vous avez fait de mal. Vous voudriez aussi discuter avec d’autres parents dans la même situation.
Laissez-moi vous rassurer en premier lieu, vous n’avez rien fait de mal et votre fille non plus. L’homosexualité est aussi valide que l’hétérosexualité. Je comprends que ça peut être un choc de vous faire annoncer cette nouvelle, surtout après que votre fille ait été en couple pendant 10 ans avec le même homme, mais votre fille a tout de même pris le courage de vous faire part de son homosexualité. C’est une expérience qui a été dure pour vous, mais ça a probablement été encore plus dur pour votre fille de vivre toutes ces remises en question et ces doutes et pour finalement décider d’être fidèle à son ressenti et son bien-être en quittant son ex-copain aussi proche d’un mariage. En effet, découvrir des attirances homoromantiques n’est pas évident pour tout le monde, en particulier lorsqu’on grandit dans une société ou même une famille qui fait la promotion de l’hétérosexualité au détriment de toutes les autres variations saines et positives des orientations sexuelles. Pour citer cette réponse : «Malheureusement, beaucoup de personnes issues de la diversité sexuelle ressentent encore une peur, aujourd’hui, à l’idée de dévoiler leur orientation sexuelle à leurs proches. (…) À ce sujet, on grandit dans un monde qui dicte que tout le monde doit être hétéro jusqu’à preuve du contraire. Tous ces stéréotypes et stigmates prennent racine dans ce que l’on nomme l’hétéronormativité. Qu’est-ce que l’hétéronormativité? L’hétéronormativité renvoie à l’idéologie dominante selon laquelle la norme sociale à laquelle tous les individus devraient se conformer est l’hétérosexualité. Il s’agit de cette pensée selon laquelle les rôles sociaux, les genres, les sexes et les sexualités devraient correspondre à un modèle hétérosexuel. Ce système de valeur est souvent inconscient, comme le sont d’autres systèmes d’oppression comme le sexisme ou le racisme. On ne naît pas homophobe ou biphobe par exemple, mais on le devient : en grandissant on vient à adhérer et à intérioriser les idées selon lesquelles l’homosexualité ou la bisexualité sont des orientations inférieures à l’hétérosexualité. Ces idées sont véhiculées par divers moyens, que ce soit pas nos familles ou nos institutions (le mariage, l’adoption, les médias, la façon dont les livres d’école traitent de la sexualité, le traitement social de la diversité sexuelle dans différentes institutions religieuses, etc). Ainsi, inconsciemment, on intériorise l’idée selon laquelle nous devons être hétéro. Dans ce contexte, on grandit toute notre vie sans modèle positif de personnes qui ne sont pas hétérosexuelles. On grandit, en tant que personne lesbienne, gaies, bisexuelles, pansexuelles ou asexuelles, à devoir se battre pour faire reconnaître nos réalités et la validité de nos expériences. Il n’est pas étonnant que ces mêmes personnes puissent ressentir de la honte ou de la peur à l’idée de ne pas être hétérosexuel‧le‧s…» Et devant cette peur, certain‧e‧s peuvent décider de garder certaines informations personnelles pour soi-même ou de cacher cette partie très intime de soi-même.
Je comprends aussi que le fait de perdre votre gendre que vous considériez comme votre fils peut être difficile. Probablement que lui aussi de son côté doit prendre des distances, mais il n’y a rien qui vous empêche de discuter avec lui, pour vous supporter l’un et l’autre et discuter de vos émotions.
Ce qui est important en ce moment c’est que vous ayez du soutien de la part de votre entourage et que vous puissiez partager avec eux, mais il est aussi très important que votre fille ait du soutien, puisqu’elle vit probablement une situation très difficile, avec la stigmatisation et le manque de compréhension de son entourage, ainsi que tous les obstacles dont elle a dû faire face pour se rendre jusqu’ici.
Avez-vous quelques connaissances sur l’homosexualité? Cette orientation sexuelle et/ou amoureuse est normale, courante et très positive! Cela ne change pas la fille que vous connaissiez et ne l’empêche pas de vivre la même vie qu’elle souhaite vivre! Elle est probablement au courant de son orientation sexuelle depuis un bon moment et cette réalisation ne l’a pas changée. L’orientation sexuelle et/ou romantique n’est pas un choix et n’est pas non plus influencée par des facteurs externes. C’est pourquoi j’ai mentionné plus haut que vous n’étiez en rien la cause de son orientation. Les couples homosexuels peuvent aussi se marier et avoir des enfants. Ils peuvent faire tout ce que les couples hétérosexuels font! Il est certain que certaines personnes auront toujours des préjugés envers les personnes faisant partie de la diversité sexuelle, que l’homophobie est encore présente, mais les gens sont généralement beaucoup plus ouverts d’esprit qu’auparavant. Si vous voulez en savoir plus sur comment agir en tant que parent pour supporter votre fille et mieux comprendre son orientation, je vous invite à lire ce document de la Coalition des familles LGBT. Les conseils principaux de ce texte seraient d’être à l’écoute de votre enfant pour mieux la comprendre, de lui offrir du support et d’être présente pour elle, pour lui éviter l’isolement.
Pour ce qui est de vous-même, quelles sont vos craintes qui vous poussent à avoir des pensées suicidaires? Est-ce lié aux idées que vous avez sur l’homosexualité? Est-ce vos craintes que votre fille change? Ou est-ce le fait que son mariage n’a pas eu lieu? Peu importe la raison, vous mentionnez être suivie en psychiatrie et en psychologie, avez-vous abordé ces enjeux avec ces derniers? Avez-vous parlé de vos idées suicidaires et de ces événements récents? Si ce n’est pas le cas, je vous invite à contacter Suicide Écoute au 01 45 39 40 00 pour obtenir de l’aide et du support. Aussi, que ce soit pour vous ou pour votre fille, pour poser vos questions et obtenir du support par rapport à l’orientation sexuelle et/ou romantique, vous avez aussi la possibilité de contacter la Ligne Azur au +0 810 20 30 40, la ligne d’écoute de SOS homophobie au 01 48 06 42 41 ou alors de visiter le site C’est comme ça.
Finalement, vous mentionnez vouloir parler avec d’autres parents. Malheureusement, je ne connais pas de groupes de parents concernant les enfants faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+ en France étant donné qu’AlterHéros est une association canadienne, donc mon conseil serait de contacter une des lignes d’écoute mentionnées plus haut pour discuter avec un·e intervenant·e.
Si vous souhaitez entendre d’autres parents s’exprimer sur le coming-out de leurs enfants, j’aimerais vous partager la toute nouvelle websérie coming-out, réalisée au Québec, qui donne le portrait de différentes expériences de coming-out et des témoignages de proches. Ce qui sort notamment de cette websérie, c’est une grande invitation à la bienveillance entre proches. Après tout, les membres de notre famille demeurent les mêmes, et ce, peu importe les informations personnelles concernant leurs attirances romantiques ou leur sexualité… Et qu’il serait triste de perdre des années à leurs côtés en raison d’un inconfort pour quelque chose dont ils ou elles n’ont pas choisi et dont ils ou elles ne peuvent rien y changer. Qu’en pensez-vous?
Au besoin, je vous suggère ces autres réponses de questions provenant de parents :
- Comment accompagner mon fils dans son processus de coming-out homosexuel?
- Comment accompagner mon fils dans son cheminement d’acceptation de son orientation sexuelle?
- Ma fille se dit lesbienne, j’ai du mal à y croire, je souhaite que ce soit passager…
J’espère avoir pu vous aider avec ma réponse. N’hésitez-pas à nous recontacter si vous avez d’autres questions! Il nous fera plaisir de poursuivre le dialogue à vos côtés! 🙂
Émilie (elle/she), stagiaire à AlterHéros