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18 septembre 2018

Je suis autiste asperger et je me questionne à savoir si je ne suis pas trans...

Première question :
Bonjour,
Je suis TMX, j’ai 45 ans et je suis autiste Asperger. Je sais que je suis beaucoup plus vieux que la majorité de vos membres mais, à l’époque où remonte mon problème, il n’y avait pas autant d’informations qu’aujourd’hui et surtout Internet n’existait pas.
Depuis mon plus jeune âge, je souffre de problèmes liés à ma condition sexuelle. Je suis né garçon mais j’ai toujours eu plus ou moins de doutes à ce sujet. Etant autiste, mais ne le sachant que depuis seulement trois ans, et particulièrement très infantile, j’ai toujours eu des difficultés à me faire des amis. En fait, c’est surtout les amis du même sexe que le mien qui posent le plus de problème car je n’ai jamais eu trop de difficultés à me lier avec les filles / femmes qui me comprenaient mieux et c’était réciproque. A l’âge de douze ans (1985), j’avais envie d’avoir les oreilles percées. Je n’en ai jamais parler à personne pas même à mes parents car j’avais peur de leur réaction et surtout honte d’avoir cette attirance puisque j’était supposé être un garçon. Globalement, j’avais quelques sensations bizarres et notamment une enie d’être une fille. Il faut dire que l’idée de faire mon service militaire me faisait très peur et j’avais d’ailleurs attribué cette envie d’être une fille pour ne pas le faire. C’est en tout cas ce que je croyais au début. Par la suite, j’ai tout fait pour refouler ma féminité ainsi que mon infantilisme exacerbé. Mais plus les années passèrent, plus j’étais mal dans ma peau et plus je me détestais, moi et mon sexe. Chaque année à la même époque, pendant l’été, je fais une dépression plus ou moins importante et dont je ne connais absolument pas l’origine. Certaines de ces dépressions m’ont obligé à me faire hospitaliser car ma vie était menacée. Depuis plusieurs années, ma haine pour mon sexe est devenue de plus en plus forte car je ne supporte absolument pas mes érections. J’en ai parlées à ma psychologue qui me dit que c’est normal que j’en ai puisque je suis un homme. J’en suis arrivé au point de mettre une cage de chasteté mais je n’ai pas pu la porter très longtemps car mes testicules ne sont descendus dans mes bourses. N’ayant aucune attirance sexuelle pour qui que ce soit, je me suis renseigné et de fil en aiguille j’ai fini par tomber sur un article parlant de la dysphorie de genre et comment cette dernière peut être liée au Syndrome d’Asperger.
Aujourd’hui, je ne sais plus qui je suis. Suite au décès de mon père l’an passé, toutes les protections que j’avais mises en place pour paraître «un homme normal» et non «un petit enfant autiste» ont volé en éclat. Je ne me sens pas homme mais je ne suis pas une femme non plus. J’ai passé un test de genre qui m’a révélé que j’étais 61% féminin, 28% masculin et le reste indéterminé. Mon mode de pensée est 100% féminin puisqu’étant autiste. J’ai très peur et je ne sais plus quoi faire. J’aimerais faire mon coming out mais comment le faire quand on ne sait pas de quelle identité de genre, on est car le problème est que le genre est multiple. Je suis gender queer mais c’est tout ce que je sais.
J’aurais besoin de conseils et surtout de savoir comment faire pour que ma mère, ma soeur et mes rares amis puissent l’accepter. Je suis très seul et ce questionnement m’obsède chaque jour un peu plus.
Merci d’avance pour vos précieux renseignements.
Cordialement,
TMX
Rose Dorian
Bonjour TMX,

Tout d’abord, merci de faire confiance à AlterHéros!
S’il est vrai que nos services s’adressent principalement aux plus jeunes, il n’y a pas d’âge pour se poser des questions sur son identité de genre. J’aimerais souligner votre courage puisque, comme vous le dîtes, on parlait encore peu de ces sujets il n’y a pas si longtemps. J’en profite aussi pour vous dire d’emblée que je suis moi-même autiste Asperger. Bien que chaque personne soit différente, il ressort plusieurs similarités dans le vécu des personnes neurodiverses ou neurodivergeantes qui vivent aussi la diversité sexuelle ou de genre. Je vous invite à lire le livret du projet Neuro/Diversités à ce sujet.
Si je comprends bien, vous vous questionnez depuis très longtemps à propos de votre identité sexuelle; vous souffrez par rapport à certaines parties de votre corps considérées comme masculines; vous éprouvez une grande détresse qui s’accentue chaque été et vous aimeriez savoir comment faire pour que vos proches vous acceptent. À travers ces difficultés, vous avez appris il y a trois ans que vous étiez autiste et vous aimeriez clarifier comment l’autisme vient s’insérer dans vos questionnements.
Vous parlez d’un possible lien entre l’autisme et la dysphorie de genre. On remarque en effet que plusieurs personnes autistes se questionnent sur leur genre, ont un genre différent de celui assigné à la naissance ou ont une expression de genre différente des personnes neurotypiques (non autistes). Est-ce que cela veut dire que c’est statistiquement significatif? Une récente étude (en anglais) suggère que les personnes autistes ne sont pas plus nombreuses à vivre de la dysphorie de genre que leurs pairs neurotypiques. En même temps, cela n’empêche pas que les autistes qui vivent de la dysphorie de genre éprouvent des difficultés bien spécifiques.
C’est difficile de faire le point sur son identité de genre et ses préférences quant à son expression de genre (comment je me présente, je m’habille, je m’exprime, etc.) quand on ne comprend pas tout à fait ce qu’on ressent, ce que les autres ressentent, ce que la société attend de nous et comment s’y intégrer. Certaines personnes autistes savent avec certitude quelle est leur identité de genre alors que pour d’autres, c’est un véritable casse-tête. Vous dîtes que vous vous reconnaissez comme personne genderqueer et comme personne n’ayant aucune attirance sexuelle (peut-être comme une personne asexuelle dans ce cas?), donc il semble que vous ayez déjà quelques éléments de réponse sur lesquels vous appuyer.
Vous vous décrivez comme une personne plus infantile. Qu’est-ce que cela signifie pour vous? Qu’est-ce qui vous amène à dire cela? Est-ce positif ou négatif? Une des manifestations du capacitisme (la discrimination envers les personnes qui vivent un handicap, qui ont des capacités différentes) est de considérer que les intérêts et les comportements des autistes sont immatures et inférieurs alors que les personnes neurotypiques seraient plus sérieuses. Pourtant, par exemple, une personne qui sautille de joie et qui se passionne pour les dessins animés n’est pas une personne moins intelligente ou moins mature. En même temps, on peut aussi se réapproprier le droit d’avoir des goûts et comportements que la société attribue généralement aux enfants. De la même façon, quand la société classe une personne dans la «case homme», ses goûts et ses attitudes considérés comme traditionnellement féminins sont souvent ridiculisés. Vous partagez comment vous n’osiez même pas parler de votre envie d’avoir des boucles d’oreille à vos parents. Le décès de votre père a changé certaines choses, vous expliquez que cela a fait voler vos mécanismes de défense en éclats et vous a permis d’avoir un espace pour explorer plus librement votre identité de genre.
Puis, vous partagez que vous ressentez une haine pour votre sexe et que vous ne supportez pas le fait d’avoir des érections. Vous en avez parlé à votre psychologue qui vous a dit que c’était normal pour un homme. Clairement, cette réponse ne vous apporte aucun soulagement, d’autant plus que vous confirmez ne pas vous sentir homme. Vous ressentez de la détresse par rapport à l’état actuel de votre corps. Quel serait votre corps idéal, celui qui ne vous apporterait pas de souffrance? Est-ce que la méthode du tuck and tape serait intéressante pour vous? Il existe également certains outils d’affirmation de genre qui permet de modifier l’expression de genre selon vos objectifs. Par exemple, le gaff est un sous-vêtement utilisé par certaines personnes désirant camoufler leur pénis et leur testicule. Il est possible d’en commander sur internet, notamment sur le site The Breast Form Store.
Enfin, je vous invite aussi à lire cette autre réponse concernant le coming out ou la sortie du placard. N’hésitez surtout pas à nous écrire à nouveau si vous avez d’autres questions ou si vous aimeriez explorer un sujet en particulier. D’ici-là, je vous souhaite de continuer à découvrir qui vous êtes et ce qui vous fait du bien!
Rose Dorian Ramirez, technicienne en travail social pour AlterHéros

Deuxième question : 

Bonjour,
 
Tout d’abord, merci pour m’avoir répondu. J’avoue avoir eu quelques inquiétudes car, étant donné mon âge, j’avais peur que mon message ne passe à la trappe. Et comme c’est un sujet très sensible pour moi depuis de nombreuses années même si j’ai tout refoulé, j’avais vraiment besoin d’être écouté.
 
Ensuite, je vous remercie pour les informations que vous m’avez données car elle clarifie un peu le problème qui se pose à moi. Je vais essayer d’apporter plus de précisions.
 
Concernant mon orrientation sexuelle, je suis effectivement assexuel car le sexe est pour moi sans intérêt et me fait même assez peur. Par contre, je pourrais, je pense, avoir une relation courtoise avec une femme car je suis attiré naturellement par les femmes. De toute façon, je n’arrive quasiment pas à me faire des relations d’amitié avec des hommes ce qui n’est pas le cas avec les femmes. Donc, de ce côté, je ne suis pas complètement aromantique.
 
Au sujet de mon côté infantile, mon noyau interne est purement bébé. Je ne suis pas propre et doit donc être langé en permanence. Il ne s’agit pas d’incontinence au sens strict puisque ma vessie se remplit et se vide complètement après. J’ai eu une période de propreté où je controllais à peu près les choses. Mais comme pour ma partie féminine, je compensais énormément. A un moment donné, ça n’a plus été possible. Sinon, ma chambre ressemble à s’y méprendre à une chambre de tout petit. Je dors dans un lit à barreaux en grenouillère et body avec mes peluches et autres doudoux. C’est l’environnement qui m’apaise et me rassure le plus. Cela n’a été possible que depuis que j’ai ma maison car j’ai habité chez mes parents jusqu’à l’âge de 39 ans. Je ne suis pas complètement indépendant concernant ma vie de tous les jours notamment au niveau de la nourriture et du ménage. Cette situation renforce mes difficultés naturelles.
 
S’agissant de mon corps et de comment je pourrais améliorer ma vie, la situation n’est pas aisée pour moi. Ayant 45 ans, une transition physique vers le sexe opposé est absolument impossible. De plus, même s’il est indéniable que je me sens plus femme qu’homme, j’ai quand même une petite partie masculie. En plus, n’ayant déjà pas beaucoup de relations sociales, je n’ai pas envie de perdre le peu que j’ai. J’ai jeté un coup d’oeil sur les différents genres existants. A l’heure actuel, le genre qui semble me correspondre le mieux est le genre neutrois. Mais je ne peux exclure d’être aussi un peu neurogenre étant donné mon autisme. Pour que je me sente mieux, il faudrait que mon corps reflète mon identité de genre. J’ai commencé à me raser intégralement exceptée la tête évidemment et je pense passer par une épilation afin de ne plus avoir ces vilains poils que je ne supporte pas et qui me rappelle trop ce que je ne suis pas. Je changerai probablement de coiffure afin d’être plus neutre. Par contre, j’ai quelques inquiétudes quant au côté vestimentaire. Je souhaiterais porter des vêtements un peu plus féminin mais vue l’intolérance qui règne en France ça ne passera pas. Pourtant j’ai envie d’être bien dans ma peau et bien dans mon corps. Déjà, je porte des boucles d’oreille, un pendentif en forme de guitare ainsi qu’une bague avec des kanjis japonais. Pour le reste, je ne sais pas quoi faire. J’ai peur de passer pour un fou ou de me faire massacrer à cause de mon look. Quand je vois les messages de haine et les menaces de mort laissés en commentaire sur les vidéos YouTube des personnes comme moi, j’ai très peur pour ma propre sécurité. La haine vis-à-vis des gens différents en France est telle, que se déplacer dans ce pays en ne se conformant pas exactement aux règles imposées pourrait être vraiment mal perçu voire dangereux. Je sais que ce genre de problème ne se pose pas trop aux Etats-Unis, au Japon ou au Canada mais c’est bien différent en France.
 
Enfin concernant mon coming out, j’ai commencé à en parler à ma mère qui a du mal à l’accepter. Elle me soutient mais je vois ben que ça passe mal. Ma psychologue accepte de m’appeler par mon prénom au lieu de me dire Monsieur ce qui me va mieux. En ce qui concerne ma soeur et sa propre famille, je ne sais pas comment je vais aborder le problème. Concernant mes trois amis, deux sont au courant du problème mais le troisième ne l’est pas encore car je ne sais pas comment lui en parler. Dois-je seulement le lui dire car je ne connais pas exactement son ouverture d’esprit ?
 
Je vous remercie d’avance pour votre réponse. Etre dans une telle situation est vraiment un crêve coeur pour moi qui n’ai jamais demandé à vivre ça. Je ne souhaite à personne de vivre ce genre de chose car c’est vraiment difficile.

TMX

Bonjour TMX,
Je suis heureuse d’apprendre que le fait d’écrire à AlterHéros vous a permis de vous exprimer et d’en apprendre un peu plus sur vous-même. Vous nous écrivez à nouveau (voir la question précédente) en mettant l’accent sur des points plus précis.

Tout d’abord, vous vous définissez comme une personne asexuelle ayant potentiellement une attirance romantique pour les femmes. L’aspect de votre orientation sexuelle et romantique est donc assez clair pour vous. Par rapport à votre identité de genre, vous vous sentez plus femme que homme. Vous vous reconnaissez dans le genre neutrois, un genre plus neutre et dans le neurogenre, un genre qui est interrelié à votre neurodiversité. À ce sujet, plusieurs personnes autistes expriment qu’elles vivent leur genre d’une façon différente de celle des personnes neurotypiques ou que leur autisme fait partie de leur genre. On peut aussi parler d’autigenre ou d’autisme-genre. De plus, c’est tout à fait possible que vous utilisiez plusieurs concepts pour décrire votre identité. C’est vous qui avez le dernier mot après tout ! 😉

Vous avez déjà en tête des idées de la façon dont vous aimeriez exprimer votre genre comme l’épilation et le choix d’une coiffure plus neutre. En même temps, vous craignez d’être victime de violence si vous vous affichez publiquement avec des vêtements plus féminins. Malheureusement, il est vrai qu’il y a encore des préjugés et des actes haineux perpétrés à l’endroit des personnes de la diversité sexuelle et de genre, et ce, un peu partout à des degrés différents. Vous souhaitez donc trouver des façons d’être vous-même sans compromettre votre sécurité. Vous expliquez que vous sentez beaucoup de haine en France par rapport aux personnes différentes. Est-ce qu’il y a certains endroits où vous pourriez vous sentir plus en sécurité? Par exemple, chez des personnes de confiance ou dans des organismes communautaires LGBT+ de votre région? C’est souvent rassurant de commencer par des endroits où on sait d’avance qu’on nous acceptera pour qui nous sommes. Vous pourriez rencontrer des personnes qui vivent des situations similaires et aussi partager des trucs et des conseils, sur le coming out notamment. À ce sujet, c’est à vous de décider à qui vous souhaiter vous dévoiler, quand et de quelle façon.

Je vous invite aussi à observer les personnes autour de vous. Puisque que ce qui est perçu comme masculin ou féminin change avec chaque communauté, vous pourrez peut-être déterminer ce qui est vu comme acceptable ou au contraire choquant dans votre région afin d’évaluer comment vos choix pourraient être perçus. Vous pouvez choisir d’incorporer tranquillement des éléments plus féminins à votre style pour faire une transition en douceur. Pour vous, quels vêtements seraient plus féminins? Aimeriez-vous porter des couleurs spécifiques, d’autres types de bijoux, des accessoires à cheveux, d’autres pièces de vêtements, des chaussures différentes, du maquillage, d’autres types de sous-vêtements ou autre chose encore?

Pour ce qui est d’une transition physique, vous dîtes que ce serait absolument impossible en raison de votre âge. Quelle serait votre apparence physique idéale? Qu’est-ce qu’une transition physique impliquerait pour vous? Plusieurs interventions médicales demeurent tout à fait possible à votre âge, je vous invite à lire cette autre question qui traite d’un sujet similaire.

Enfin, vous décrivez votre côté plus infantile. Je ne suis pas une professionnelle de la santé et je ne connais pas non plus votre condition médicale; je ne peux donc pas me prononcer par rapport aux aspects physiques que vous nommez comme l’incontinence. En même temps, je comprends tout à fait votre préférence pour les éléments qui rappellent l’enfance! Les couleurs et les textures douces et reposantes ou au contraire les couleurs vives et les jouets qui stimulent les sens sont appréciés à différents niveaux par plusieurs personnes autistes. D’autres personnes se reconnaissent aussi dans les pratiques ABDL « Adult Baby Diaper Lover ». En français, on pourrait parler d’une communauté qui comprend notamment des bébés adultes ou des amateurs de couches. C’est tout à fait normal d’avoir envie de relaxer et qu’on prenne soin de soi, surtout si on a tendance à faire de l’anxiété. Certaines personnes ont aussi exprimé que cela leur permettait de se réapproprier du pouvoir dans les situations où elles dépendaient d’autres personnes pour leurs soins en raison de leur handicap. C’est vous qui savez ce dont vous avez besoin et si vos pratiques vous apportent des bienfaits ou non.

J’espère que ces nouvelles informations pourront alimenter votre réflexion. N’hésitez pas à nous réécrire si vous avez d’autres question!

Rose Dorian Ramirez, technicienne en travail social pour AlterHéros

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