Bonjour Youss!
Merci de faire confiance à AlterHéros pour ta question.
Pour résumer, tu as peur d’être gay et depuis, tu testes tes réactions en regardant de la porno gay qui ne t’excite pas, mais tu as eu une érection une fois, ce qui t’a causé beaucoup de stress. Tu as ces pensées intrusives car tu as déjà trouvé un garçon beau et tu as déjà fait un rêve homosexuel. Tu te testes autour de 10 fois par jour en essayant de t’imaginer avec des garçons, mais cela ne te procure pas d’érection. Tu te demandes alors si tu es atteint tu TOC homo, car tu ne penses qu’à ça.
Nous recevons beaucoup de questions presque identiques à la tienne, alors je vais me permettre de citer des extraits de réponses antérieures.
Tout d’abord, voici l’extrait d’une réponse de mon collègue qui explique le TOC homo:
« D’abord, qu’est-ce le TOC homo? Il est primordial de différencier le processus d’acceptation d’une identité sexuelle minoritaire d’un trouble obsessionnel compulsif avec obsessions sexuelles. Pour ce faire, je vais citer quelques extraits de cet article scientifique de psychologie au Québec écrit par K.-J. Igartua. Je t’encourage également fortement à le lire au complet si tu désires approfondir tes connaissances sur ce sujet. Chez AlterHéros, nous sommes généralement très prudent.e.s à aborder le sujet du TOC homo. Pourquoi? Parce qu’il s’agit d’un concept en psychologie utilisé par des thérapeutes professionnel.le.s et qu’il est souvent mal interprété et mal utilisé au quotidien par les internautes. De plus, c’est un concept sur lequel il est possible de trouver une tonne d’informations fausses sur Internet. En effet, ce concept est trop souvent utilisé afin d’invalider des questionnements sains et normaux dans le développement identitaire d’une personne. Ceci peut donc contribuer à une forme d’homophobie intériorisée en offrant la prémisse que les questionnements sur l’orientation sexuelle sont liés à un trouble psychologique et non pas à un développement psychologique normal. Alors avant d’approfondir la question du TOC homo, rappelons-nous ces quelques éléments :
- Il est complètement sain d’avoir des questionnements sur son orientation sexuelle.
- Il n’y a pas d’âge ou de moments précis pour avoir des questionnements, des réflexions ou des idées érotiques au sujet de l’orientation sexuelle.
- Toutes les orientations sexuelles sont aussi belles les une que les autres. Aucune orientation sexuelle n’est meilleure ou inférieure à l’autre.
- Les orientations sexuelles ne sont pas limitées à l’hétérosexualité ou l’homosexualité, mais que les personnes bisexuelles, pansexuelles et asexuelles existent. Il est donc possible que nos désirs et comportements ne s’inscrivent pas dans une case précise.
- Les orientations sexuelles comprennent plusieurs composantes liées aux attirances physiques et aux attirances romantiques. Il est donc possible d’être romantiquement attiré par un type de personnes et sexuellement attiré vers plusieurs types de personnes.
- La sexualité est quelque chose de fluide : nos préférences, besoins, intérêts, désirs et libido peuvent varier avec le temps, selon les contextes et selon les rencontres que nous faisons.
- Ce n’est pas parce que quelqu’un a eu une idée, une attirance, un questionnement ou un fantasme homosexuel que cela nie son hétérosexualité.
Qu’est-ce que l’on entend par un processus d’acceptation d’une identité sexuelle minoritaire? En fait, nous vivons dans des sociétés qui établissent malheureusement l’hétérosexualité comme étant une sorte de norme à laquelle les individus devraient se conformer. C’est pourquoi la grande majorité des gens tiendra pour acquis qu’ils sont hétérosexuels. «C’est une identité qui est adoptée de façon subconsciente, sans vraiment y réfléchir. Par contre, lorsqu’un individu s’aperçoit qu’il a des pensées ou des pulsions homosexuelles, l’identité peut être remise en question. Ces idées pourront être plus ou moins difficiles à porter selon le degré d’acceptation de l’homosexualité dans sa culture d’origine.» Le processus d’acceptation d’une identité sexuelle minoritaire est le processus normal qu’une personne gaie, bisexuelle, pansexuelle, asexuelle ou queer accomplira afin d’accepter ou d’affirmer son orientation sexuelle. Il est normal que ce processus puisse être parfois long et parfois difficile pour certaines personnes, de par la pression sociale entourant la présomption de l’hétérosexualité et les idées préconçues concernant la diversité des orientations sexuelles. Il est aussi normal que ce processus soit différent pour chaque personne, bien qu’il soit souvent marqué par plusieurs facteurs de stress et d’angoisse entourant cette prise de conscience de son orientation sexuelle minoritaire.
À ne pas confondre, effectivement, avec un trouble obsessionnel compulsif homosexuel où l’obsession principale est un doute persistant et irrationnel de son orientation sexuelle. Dans la documentation scientifique, on note des manifestations de compulsions mentales liées au TOC homo de différents ordres :
1) chercher à se faire rassurer constamment sur son hétérosexualité par son entourage ou des services d’aide.
2) vérifier ses réactions physiologiques pour déceler un érotisme, comme en écoutant frénétiquement de la pornographie homosexuelle pour analyser les réactions du corps humain.
3) faire usage de techniques d’évitement comme une manœuvre pour réduire l’anxiété. Cela peut prendre la forme d’éviter de façon réfléchie des activités sociales, de mettre fin à des relations amoureuses ou de consommation excessive diverse.
Plusieurs différents types d’angoisses peut être liées au TOC homo : «la crainte d’un changement de son orientation sexuelle, la peur d’avoir des désirs pour les personnes du même sexe, l’inquiétude par rapport à leurs désirs hétérosexuels, la croyance que l’homosexualité est immorale, le désir d’éviter le jugement des autres et la honte». On y décrit également «différents sous-types de TOC sur l’orientation sexuelle, dont le TOC «tout ou rien» – où une idée vaguement homosexuelle surgit dans l’esprit sans aucun homoérotisme antérieur et cette idée est prise comme preuve d’une homosexualité latente ; le TOC «relationnel» où l’on utilise un échec ou une série d’échecs amoureux comme raison de remettre en question son orientation; le TOC «expérientiel » où une expérimentation antérieure avec le même sexe est prise comme preuve d’une orientation homosexuelle; le TOC «auto-dérisoire» où l’individu se répète qu’il est gai, mais l’étiquette fait davantage office d’insulte que de référence à sa sexualité.»
L’objectif ici est d’inviter les personnes à différencier l’anxiété accrue concernant les questionnements sur l’orientation sexuelle de l’attirance physique/émotionnelle que les personnes peuvent ressentir pour une/des personne·s du même genre qu’elles. Il est donc possible pour plusieurs personnes de cesser ces vérifications compulsives sur leur sexualité en différenciant l’anxiété accrue de l’attirance. Il est aussi fréquent que ces questionnements refassent surface dans des moments de stress ou de fatigue chronique, car on cherche à tout prix à trouver une cause à ce stress ou cette fatigue.
Bref, le TOC homo maintient chez la personne «un débat continuel en tentant de déceler des «preuves» d’un homoérotisme inavoué et chercher à prouver hors de tout doute son orientation sexuelle par raisonnement intellectuel.» Or, il est impossible de conclure de façon intellectuelle ce qui est de l’ordre de l’émotif. Il est impossible de démontrer par un raisonnement logique que l’on aime la vanille ou non. C’est d’abord et avant tout quelque chose de l’ordre du ressenti et de l’émotif.
Enfin, si tu notes que cela puisse faire échos à ce que tu peux vivre, je t’encourage à rencontrer un·e sexologue ou un·e psychologue avec qui parler de ta situation.
Pour finir, j’aimerais te rappeler que la question des orientations sexuelles est d’abord et avant tout quelque chose d’intime et d’émotif. Peu importe l’étiquette que tu souhaites porter, l’important c’est ce que tu sois bien, émotionnellement et physiquement, avec la/les personne·s que tu aimes et désires. »
Je comprends aussi que tu regardes de la pornographie à l’âge de 13 ans, ce qui n’est techniquement pas légal en France. Je tiens juste à ce que tu restes prudent et de garder un oeil critique sur le contenu que tu visionnes, car la pornographie peut influencer notre imaginaire sexuel lorsqu’on est jeune.
Ensuite, je sais que tu mentionnes ne pas vouloir entendre parler du fait qu’il n’y a rien de mal à être homosexuel, mais ça reste tout de même un fait. Les réactions qui se passent dans ton corps lorsque tu entends parler d’homosexualité sont probablement reliées à de l’homophobie intériorisée. Celle-ci peut aussi expliquer le fait que tu mentionnes ne vraiment pas vouloir être gay. Je te cite ici une réponse de ma collègue qui explique ce concept et qui donne quelques pistes pour répondre à tes questionnements:
« Tu vis plusieurs émotions qui pourraient relever de ce qu’on appelle l’homophobie intériorisée (peur, malaise, etc.). Ce concept, c’est lorsque l’on intègre les préjugés et la peur qui sont transmis par la société par rapport à l’homosexualité. C’est insidieux parce que c’est lié à nos émotions. Du coup, il est tout à fait possible que, rationnellement, on comprenne que toutes les orientations sexuelles sont aussi acceptables ou “normales”, que l’on sache que les hommes gais ne sont pas tous “féminins” et que l’on souhaite que tout le monde ait le droit au mariage, quelle que soit leur orientation sexuelle, par exemple. Pourtant, il est possible d’en même temps ressentir toutes ces émotions négatives et d’entretenir des craintes face à l’idée de ne pas être hétéro. Certaines craintes, malheureusement, peuvent être fondées, comme la peur de vivre de l’incompréhension ou de l’hostilité de la part de notre entourage. Par contre, le fait d’avoir une orientation sexuelle qui n’est pas celle de la majorité n’a rien de mal en soi et ne devrait pas nous faire sentir mal. Évidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire, mais ça vaut la peine de faire une introspection. S’interroger sur les préjugés et les fausses croyances que l’on peut entretenir afin de les démystifier et un bon moyen pour les déconstruire et être plus en paix avec nos interrogations sur notre orientation sexuelle, quelle qu’elle soit.
Parlant de ton orientation sexuelle, qu’est-ce qui te fait douter de celle-ci? Tu dis toujours avoir été attiré sexuellement et romantiquement par les femmes et ne jamais avoir ressenti d’attirance pour les hommes. Il est vrai que tu peux par exemple développer des sentiments pour des personnes de divers genres ou te rendre compte que tu as du désir pour les hommes avec le temps. Néanmoins, je t’invite à te faire confiance. C’est un sentiment qui vit en toi, ton orientation sexuelle, alors tu es le mieux placé pour la connaître. Si ça peut t’aider, tu peux guider tes interrogations en réfléchissant aux trois aspects de l’orientation sexuelle, soit les désirs, les comportements et l’identité. Les désirs, ce sont nos attirances et envers qui elles se déclarent (est-ce qu’on est plutôt attiré par tel ou tel type de corps, tel ou tel type de personne, qui on aurait envie d’embrasser, etc.). Les comportements, ce sont les actions que l’on pose réellement, à l’inverse des désirs qui renvoient à l’imaginaire (ex : avoir embrassé notre amie, avoir eu une relation sexuelle avec un homme, avoir regardé les fesses d’une personne dans la rue). Finalement, l’identité, c’est l’appropriation et le choix de mots pour se décrire par rapport à notre identité sexuelle (hétéro, gay, pansexuel‧le, etc.). »
Je tiens aussi à mentionner que les réactions physiques que tu as, soit une érection, ou même les préférences pornographiques ne représentent pas ton orientation sexuelle. Par exemple, un homme hétérosexuel pourrait préférer regarder de la pornographie homosexuelle, sans toutefois que cela remette en question son orientation sexuelle. Il en est de même aussi pour les rêves. Parmis les éléments déclencheurs à tes pensées intrusives, tu mentionnes avoir fait un rêve homosexuel. Par contre, les rêves ne représentent pas nécessairement notre réalité et ne sont pas des indicateurs de notre orientation sexuelle.
Finalement, il est tout à fait normal de trouver une autre personne belle, peu importe son genre, notre orientation sexuelle et nos attirances. Par exemple, de mon côté, j’apprécie la beauté de toustes mes ami·e·s, sans toutefois être attirée par toutes ces personnes.
J’espère alors avoir pu t’aider avec cette réponse, si jamais tu veux creuser plus loin, tu peux consulter la section regroupant toutes les réponses sur le TOC homo sur notre site internet.
Émilie (elle/she), stagiaire à AlterHéros