Bonjour Shü, et merci de faire confiance à AlterHéros!
D’après ce que je comprends, tu ressens de la confusion quant au fait de ne pas vraiment savoir comment te définir. Tu as eu autrefois des relations sexuelles avec des garçons, mais tu ne ressentais pas de sentiments à leurs égards. Tu t’es donc identifié à ce moment-là comme étant lesbienne.  A présent, tu te surprends à ressentir de l’attirance physique et sentimentale pour un garçon en particulier. J’ai l’impression que tu as peur de «t’engager», parce que tu penses qu’il ne pourra jamais te suffire, du fait que tu aimes également les filles. Est-ce bien exact?
Pourtant, il est important de faire la différence entre l’orientation sexuelle et la fidélité. Une personne peut être bisexuelle et rester toute sa vie en relation monogame, sans pour autant ne jamais manquer de quoi que ce soit. Je pense que ce qui nous attire particulièrement chez certaines personnes, est davantage lié à des caractéristiques personnelles, qu’à leur sexe biologique. Une personne pourrait, par exemple, être particulièrement attirée par les personnes romantiques à l’esprit bohème, et une autre, attirée par un humour cinglant ou des valeurs particulières. Qu’en penses-tu? Ces caractéristiques sont-elles obligatoirement en rapport direct avec le sexe?
Maintenant, tu ressens tout de même le besoin de te définir.  Kinsey est un chercheur qui a beaucoup étudié la sexualité humaine, et qui a établi une échelle permettant de se situer par rapport à son orientation sexuelle et ses comportements sexuels. Celle-ci est graduée de 0 à 6, 0 étant l’hétérosexualité exclusive, et 6 l’homosexualité exclusive. Il serait intéressant que tu essayes maintenant de t’y situer!
 
0          Hétérosexualité exclusive (46% de la population)
1          Hétérosexualité prédominante, avec quelques expériences homosexuelles
2          Hétérosexuelle préférentielle, avec expériences homosexuelles plus qu’occasionnelles
3          Bisexualité sans préférences (autant de comportements homosexuels qu’hétérosexuels)
4          Homosexualité préférentielle, avec expériences hétérosexuelles plus qu’occasionnelles
5          Homosexuelle prédominante, avec quelques expériences hétérosexuelles
6         Homosexualité exclusive (4% de la population)
 
L’hétérosexualité, la bisexualité et l’homosexualité, sont donc des variations d’un même continuum. Kinsey a également prouvé que l’immense majorité des personnes cheminaient au cours de leur vie au sein de cette échelle. Certaines se fixeront un jour à un niveau particulier, et d’autres continueront à se balader sur l’échelle, durant toute leur vie, sans pour autant que cela ne dénote d’une faiblesse d’identité sexuelle de leur part.
D’après ce que tu me dis, avant de rencontrer ce garçon particulier, tu te définissais comme « lesbienne », car il n’y avait qu’avec les femmes que tu pouvais ressentir des sentiments amoureux. Tu avais également déjà eu quelques expériences hétérosexuelles dans le passé. A l’âge de 13-14 ans, tu te serais donc située aux numéros 4, ou 5.
Peut-être que le fait de rencontrer un garçon avec lequel tu peux également ressentir de l’affection te fait te remettre en question : pourrais-tu également avoir une relation complète et satisfaisante avec un homme? (sexuellement et affectivement) Te dirigerais-tu alors à présent vers une forme de bisexualité? La «bisexualité», pour Kinsey, peut être représentée par les numéros 2, 3, 4, et 5, c’est donc une catégorie extrêmement large. Mais cela reste de la bisexualité, bien qu’il en existe plusieurs niveaux. Après, il revient à chaque personne de définir sa propre vision de sa sexualité. Pourquoi ne pas définir toi-même ta propre bisexualité? Personne ne pourra jamais te contredire, puisque toi seule peux te faire une idée juste de ce que tu penses et ressens (mon attirance sexuelle va plus vers…? Au niveau sentimental, je suis plus à l’aise avec…? Mes fantasmes sont davantage dirigés vers…? Possibilité de relation longue durée avec les deux sexes? etc.)
Il y a une autre chose importante à savoir, c’est que d’avoir une « relation hétérosexuelle monogame longue durée », ne signifie pas pour autant que tu ne puisses pas avoir de fantasmes homosexuels. Cela est même un fait extrêmement fréquent au sein des relations hétérosexuelles, tout comme au sein des relations homosexuelles (fantasmes à propos de relations hétérosexuelles!). Il est même très sain d’avoir un imaginaire érotique fertile, car c’est lui qui est à la base du plaisir et du désir sexuel!
Nous allons donc maintenant envisager les 3 grands scénarios qui s’offrent à toi, dans cette situation (comme je n’ai pas cette information, faisons comme si tu n’avais pas encore parlé à ton copain de tes attirances homosexuelles):

1. Tu quittes ton copain, car tu penses que tôt ou tard tu le feras souffrir en désirant avoir des relations sexuelles avec des filles, et tu veux éviter cela avant  que vous ne vous attachiez trop l’un à l’autre (ce qui reviendrait à quitter ton copain à partir de simples hypothèses).
2. Tu restes avec lui mais tu ne lui parles pas de tes attirances homosexuelles. Penses-tu dans cette situation que ta réflexion pourrait avancer? Si tu décides de ne pas lui en parler, il serait important, je pense, que tu en discutes tout de même avec une personne de confiance, qui pourrait t’aider à cheminer à travers tes pensées (membre de te famille, ami(e)s, collègues de travail, internautes, etc.)
3. Tu parles à ton copain du fait que tu es également attirée par les femmes :

• Sous-scénario 1 : il accepte cela et décide de poursuivre sa relation avec toi, tout en te spécifiant qu’il ne souhaite pas que tu réalises ces fantasmes  tant que tu es avec lui, car il considère cela comme de l’infidélité.

Cette réaction, tout comme les autres, est tout à fait légitime. Cela dépend de la perception qu’a chacun de la fidélité et de l’orientation sexuelle. A ce moment-là, ça sera donc à toi de décider si oui ou non, tu te sens capable d’assumer cette relation-là, sans en souffrir.

• Sous-scénario 2 : il décide qu’une séparation entre vous vaudrait mieux, car cela le rend mal à l’aise de sortir avec une personne bisexuelle (personnellement, je pense que cette réaction serait quelque peu immature et étonnante, surtout face à l’honnêteté dont tu fais preuve en lui en parlant!)
• Sous-scénario 3 : il accepte ta confidence et l’accueille même avec engouement (certains garçons sont très excités à l’idée d’imaginer leur copine avoir des relations sexuelles avec d’autres filles), t’autorisant alors à avoir des relations homosexuelle en dehors du couple, sans que cela ne soit considéré comme de l’infidélité.

Bref, le plus important est de trouver une solution qui vous conviendra, tous les deux, dans le respect des souhaits et des limites de chacun. Le dialogue est donc très souhaitable!
Cependant, si tu penses qu’il serait plus facile pour toi, au début, d’en parler avec des personnes que tu ne connais pas, il existe une association en France pour les personnes bisexuelles : l’association « Bi ’Cause » à Paris (http://bicause.pelnet.com/). Tu verras, le site internet est tout de même assez pourvu!
J’espère que cette réponse aura pu t’éclairer… N’hésite surtout pas à nous réécrire si tu as une autre question à nous poser! Nous te répondrons avec grand plaisir!
 
Marion, stagiaire chez AlterHéros