J'ai peur que les gars de ma classe découvrent que je suis trans

Salut !
Je vous ai écrit la première fois il y a quelques temps et je vais mieux depuis. J’ai décidé de reprendre les cours, ce que je voulais faire depuis longtemps.
Je suis trans et dans ma classe il n’y a que des mecs. Ils ont quinze ans ils sont un peu bêtes (désolé les garçons de quinze ans, ne vous sentez pas concernés) et surtout très machos. Il n’y a pas de problème avec moi, ils n’ont pas l’air de pouvoir se douter.
Cela dit à leur contact je suis EXTREMEMENT anxieux, parce que je sais que je suis différent. Ils ne le voient pas. A priori partout, les gens que je croise me voient comme celui que je suis maintenant.
Et à l’extérieur de mon lycée je ne suis jamais inquiet à ce propos.
A votre avis pourquoi ce blocage ?

Élyse Vander

Bonjour Denis,
Merci de nous donner de tes nouvelles et de nous faire confiance de nouveau! Tout d’abord, je veux te dire que je suis très heureuse que tu ais repris le courage d’étudier, surtout que tu me dis que ça faisais longtemps que tu le voulais. Voilà quelque chose de très positif dans ta vie, mais tu ne peux l’apprécier car tu sens un décalage par rapport aux autres gars dans l’école, et tu crains d’être «détecté». Toi qui a bien confiance en toi en dehors des murs de l’école, te voilà confronté à une anxiété qui te paralyse.
Même si au plan physique tu a une apparence totalement masculine, tu te sens probablement bien différent des élèves et tu crains leur réaction. Tu es différent certes, mais tu peux te dire que chacun des gars dans cette classe a une différence, qui lui appartient et qu’il ne dévoile peut-être pas partout. Il y en a un qui est dyslexique et qui est extrêmement gêné de le montrer et qui vit l’anxiété de devoir lire devant vous. Un autre vit dans une situation familiale impossible et vit dans la peur de rentrer chez lui le soir. Il y en a un qui déteste le foot mais qui qui fait semblant d’être intéressé quand ses copains parlent du match d’hier, de peur d’être vu comme un extra-terrestre. Un autre découvre son homosexualité et pense qu’il n’osera jamais le dire à personne. Personne n’est 100% normal dans ta classe. Chacun a son son secret. Ce qui peut expliquer l’attitude «macho» de certain… l’adolescence est une période de la vie où plusieurs garçons, tout en étant très conscients de leur différence, souhaitent montrer une façade d’assurance et de force qu’ils n’ont peut-être pas tout à fait en dedans.
Pourquoi ton blocage? Il faut dire que la transition n’est pas seulement physique, mais aussi psychologique. Certes, les hormones donnent de magnifiques résultats, mais le plus grand défi consiste à s’approprier sa masculinité. Peut-être en es-tu encore dans ce processus. Il y a de bonnes chances pour que ton anxiété disparaisse graduellement quand tu verras que les gens continuent de te traiter tout à fait comme tu le désires. Tu en seras même probablement surpris! Malgré tout, il est possible que ton anxiété extrême subsiste malgré tous les efforts que tu feras. Si c’est le cas, n’hésites pas à aller vers une aide extérieure, par exemple un psy ayant une approche cognitivo-comportementale (la meilleure contre l’anxiété) ou un intervenant communautaire spécialisé en questions d’anxiété et phobie sociale. L’organisme REVIVRE, très connu ici au Québec pour son action dans ce domaine, a d’ailleurs une branche en France (http://www.revivre-france.org/). «Mais, me diras-tu peut-être, mon problème c’est que je suis trans, pas anxieux», ce à quoi je te répond qu’être trans n’est pas un problème en soi, et que souvent nous croyons à tort que puisque nous sommes trans, tous nos problèmes doivent être abordés sous cet angle et par des spécialistes en question trans (comme ce site héhé!). Or, ce que j’essaie de dire, ce que si à l’avenir ton anxiété sociale persiste malgré l’état avancé de ta transition,elle serait peut-être bien mieux gérée par des technique développées par les experts en question d’anxiété que par des experts trans!
Mais si il y a une chose qui n’aide pas, c’est le jeune âge des gars autour de toi. Sans nécessairement vouloir mettre les personnes trans sur un piédestal, je crois toutefois qu’une transition, ça provoque un grand saut au niveau de la maturité, car c’est une période de la vie qui développe le courage, la détermination, l’autonomie et le sens de l’initative. Il n’est pas étonnant donc que tu sentes un certain décalage entre toi et ceux qui t’entourent, et ce décalage contribue probablement à ton sentiment d’anxiété. Toi même tu me le dis: en dehors des murs de cette école, dans le monde «adulte», tu te sens bien. Mais tu sais, même si les jeunes peuvent être si cruels parfois,  ils peuvent également avoir un grand coeur. Même s’ils essaient de se montrer durs, il sont quand même bien capables d’avoir une belle ouverture d’esprit. Et ça je le sais très bien, car je suis enseignante en mathématique dans ce qui équivaut au lycée ici au Québec. Et je suis une femme trans! Et je sais pertinemment que nous les personnes trans on remarque tellement plus facilement les moindres petits détail qui nous déplaisent dans notre apparence, de notre voix ou de notre attitude, détails qui n’effleurent même pas l’esprit des gens et/ou qui ne les dérangent même pas. Et dans l’improbable éventualité où ils découvriraient que tu es trans, comment sais tu que ça changerait tant que ça leur façon de te voir?
Réfléchis bien à cette question! Et si tu n’y trouves pas réponse, ou si ton anxiété continue de t’handicaper, n’hésite pas à nous réécrire!

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