Comment faire mon coming-out non-binaire à ma famille?

Bonjour,
Je m’appelle Laura et je suis assigné fille de naissance.
Ce pendent, depuis un long moment je ressens une grande douleur par rapport au fait que les personnes autour de moi me considèrent strictement comme une fille, alors que je suis non-binaire. Je n’ai pas fait de coming-out et je ne sais pas comment le dire à mes parents. J’ai peur qu’ils ne me prennent pas au sérieux.
Je ressens aussi de la honte. Quand j’étais petit en primaire jusqu’au milieu du collège, j’avais les cheveux court, mais on me demandait souvent si j’étais une fille ou un garçon. Je répondais que j’étais un garçon manquais. Les autres enfants ne comprenaient pas alors je finissais par dire que j’étais une fille. Et puis ma mère ces mise à me poser des questions comme « ton prénom, il te convient ? ». Je comprenais tous ce que ça sous-entendait. Mais, biens avant, en parallèle ma mère avait collé des rideaux et des draps rose dans ma chambre avec des décoration fleur et papillon. J’avais l’impression qu’en réalité je ne pouvais rien choisir. Et j’étais trop jeune pour savoir, parce que je ne connaissais que deux extrêmes. Je pouvais soit être une fille soit un garçon transgenre. J’ai honte, mais j’étais terrifié par toutes les questions et des obstacles sur le chemin pour devenir un garçon et je ne voulais pas aller aussi loin, je voulais garder une part de ce qui faisait aussi de moi une fille. Je ne savais plus quoi faire et je voulais que les questions cessent, que les gens arrêtent de me pousser vers l’un de ces deux genres qui ne me convenait pas. J’ai donc laisser mais cheveux pousser et choisi d’être une fille même si j’avais autant envi d’être un garçon.
Finalement, je déteste mes cheveux longs, mais ma mère me répète que les avoir court serais moche ou ne mirais pas. Ce n’ai pas la seule chose que je veux changer, je voudrais binder mon tors et sur tout changer mes pronoms, que l’on me genre au masculin. J’aimerais savoir si c’est possible pour une personne nom-binaire de changer de prénom officiellement et comment faire comprendre à mes parents la douleur que je ressens quand on me dit « c’est pour les garçons », « tu es une fille, je te rappelle ». Je ne sais pas comment leur faire comprendre que je suis sérieux, que ce n’est pas qu’une phase et que je suis nom-binaire, je ne veux pas être Trans. J’aimerais faire mon coming out et j’ai besoin d’aide.
Laur(a)

Séré

Bonjour Laur(a)!

Merci de faire confiance à AlterHéros avec tes questionnements sur les façons de faire ton coming-out en tant que personne non-binaire. Je veux aussi te féliciter d’avoir fait un premier coming-out en nous écrivant et en nous disant comment tu te sens! C’est déjà une belle première étape de faite. 🙂

Un coming-out peut effectivement être quelque chose de très angoissant, j’ai moi-même eu beaucoup d’inquiétudes et d’interrogations avant de faire mon coming-out non-binaire à mes parents. Tu as bien fait de venir chercher de l’aide et je vais faire de mon mieux pour te donner des outils pour faire ton coming-out.

D’abord, tu exprimes la peur que tes parents ne te prennent pas au sérieux et qu’iels croient que ce n’est qu’une phase. Un des mythes qui persistent encore au sujet de la non-binarité est qu’il s’agit d’une affaire de jeunes, qu’il n’y a que des adolescent.e.s et de jeunes adultes qui s’identifient ainsi et que ça leur passe quand iels vieillissent. Mais c’est complètement faux. Il y a des personnes non-binaires de tous âges et il y en a eu dans toutes les sociétés de toutes les époques. Penses-tu que ça pourrait aider tes proches à te prendre au sérieux si tu leur présentais des portraits de personnes non-binaires qui sont des adultes? Voici un article, intitulé Here’s what older trans and nonbinary people want you to know (Voici ce que les personnes trans et non-binaires plus âgées veulent que vous sachiez), qui présente 19 personnes trans ou non-binaires de 40 ans ou plus. Je t’en ai traduit quelques extraits, je crois que ce serait quelque chose que tu pourrais utiliser pour alimenter la discussion avec tes parents s’iels te disent que ton identité est une mode et que ça va te passer:

A quel âge avez-vous réalisé que vous pouviez être trans ou non binaire ?

Pas avant l’âge de 50 ans. J’étais le pasteur d’un jeune qui cherchait son identité et ne se sentait pas trans. Pendant que nous parlions, je continuais à me reconnaître.

Que diriez-vous à ceux qui disent que le fait de se déclarer trans ou non binaire n’est qu’une mode ou une tendance ?

C’est ce que j’ai toujours été, mais la société m’a forcé à m’intégrer dans un rôle binaire qui ne me convenait pas. Je suis heureux que les jeunes d’aujourd’hui puissent faire leur coming-out plus tôt et ne pas subir ce que j’ai dû subir.

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes trans et non-binaires ?

Soyez vous-même et soyez fier !

-Shanon, 60 ans, they/them, personne transmasculine genderqueer

 

A quel âge avez-vous réalisé que vous pouviez être trans ou non binaire ?

Je n’ai jamais été à l’aise avec mon genre. […] Même lorsque j’ai rencontré des personnes trans, elles semblaient (que ce soit parce qu’elles devaient le faire pour être considérées comme « assez » trans ou parce qu’elles l’étaient vraiment) s’identifier en tant qu’homme ou femme binaire, donc je n’ai jamais pensé que je pouvais être trans. […] J’ai lentement pris conscience des identités non binaires et je me rends maintenant compte que je suis non binaire (plus précisément agenre). Je pense que j’avais 48 ans quand j’ai mis un nom dessus pour la première fois.

Que diriez-vous à ceux qui disent que le fait de se présenter comme trans ou non binaire n’est qu’une mode ou une tendance ?

Je n’écoute pas les gens qui n’ont aucune idée de ce dont ils parlent, mais si je devais le faire, je leur demanderais pourquoi cela les dérange tant si c’est si peu important. Et pourquoi ils ressentent le besoin de contrôler l’identité d’autres personnes.

Quels conseils donnez-vous aux jeunes trans et non-binaires ?

Si vous vous questionnez sur votre genre, vous n’êtes probablement pas cis. Ne vous inquiétez pas si vous ne pouvez pas déterminer immédiatement votre place, et ne vous inquiétez pas si vous changez d’avis plusieurs fois.

-Drew, 52 ans, they/them, non-binaire

 

A quel âge avez-vous réalisé que vous pouviez être trans ou non binaire ?

Je suppose que je savais que j’étais non binaire à l’adolescence, mais dans les années 80 et dans mon pays, je n’avais pas un mot pour me définir. La façon la plus simple pour moi de m’intégrer quelque part était de me qualifier d’homosexuel. Plus tard, dans la trentaine, après avoir déménagé en Europe, j’ai commencé à réaliser que je n’avais pas besoin de m’adapter à une étiquette ou à un groupe et j’ai commencé à être plus moi-même. À ce moment-là, j’ai commencé à définir mon identité de genre comme non binaire.

Que diriez-vous à ceux qui disent que le fait de se présenter comme trans ou non binaire n’est qu’une mode ou une tendance ?

Mon existence n’est pas une mode, j’ai le droit d’être, le droit de m’exprimer. Le droit de ne pas suivre le troupeau et d’être fidèle à mon cœur et à mon esprit.

Quels sont vos conseils pour les jeunes trans et non-binaires ?

Soyez vous-même, soyez patient, soyez fort. Ce ne sera pas facile, mais votre chemin est le vôtre. Développez quelques bonnes relations personnelles et surtout si vous êtes plus jeune ne vous désespérez pas, vous deviendrez plus fort si vous restez fidèle à vous-même. Les problèmes que les autres ont à votre sujet sont les leurs et non les vôtres, et sont la conséquence de leur propre ignorance et de leurs craintes.

-Dionysos, 40 ans, il/lui, non-binaire

Ce qu’on remarque dans plusieurs des témoignages de l’article, c’est que plusieurs personnes non-binaires qui ont maintenant 40, 50 ou 60 ans auraient vraiment aimé connaître la possibilité de s’identifier ainsi beaucoup plus tôt dans leur vie, car elles ont beaucoup souffert d’avoir à prétendre être un homme ou une femme toutes ces années. Je crois que c’est quelque chose qui est important à nommer à tes parents. Ta souffrance est réelle et il y a une solution relativement simple à celle-ci, c’est-à-dire te laisser exprimer ton genre comme tu le souhaites. Tous les changements que tu nommes dans ton message sont tout à fait réversibles, donc il n’y a aucun risque à te laisser les entreprendre. Par ailleurs, il est très très rare qu’une personne trans ou non-binaire décide de « détransitionner », c’est-à-dire de défaire les démarches de transition (changement de nom, de pronom, d’habillement, prise d’hormone, etc.) qu’elles avaient entreprises. De plus, quand ça arrive, c’est en majorité parce qu’elle ne se sent pas acceptée par ses proches et qu’elle ne veut plus subir de discrimination, pas parce qu’elle n’est pas réellement trans ou non-binaire. Il y a des études scientifiques pour prouver ce que j’affirme. Une étude états-unienne a rapporté que seulement 8% des 28 000 répondant.e.s à un sondage mené en 2015 ont détransitionné et que plus de la moitié de ceux-ci l’ont fait seulement temporairement et en raison de pressions de la part de leurs parents. Au total, seulement 0,4% des personnes de l’échantillon avaient détransitionné parce qu’elles avaient réalisé qu’une transition ne leur convenait pas. Plusieurs autres études ont rapporté des pourcentages similaires.

Est-ce que tu crois que ces chiffres et ces témoignages pourraient aider tes parents à te prendre au sérieux?

Ensuite, tu te demandes comment leur expliquer que tu es non-binaire et que tu n’es pas trans. Une petite note de vocabulaire pour commencer: beaucoup de personnes non-binaires s’identifient aussi comme trans. En effet, être trans veut seulement dire qu’on a une identité de genre différente que celle qui nous a été assignée à la naissance, on n’a pas besoin de transitionner médicalement ou d’avoir un genre binaire pour être trans. Bien sûr, tu es libre de choisir les étiquettes que tu veux utiliser, mais je voulais juste que tu sois au courant que tu as le droit de t’identifier comme trans si tu en as envie. Voici une image qui illustre le fait que les personnes non-binaires peuvent aussi être trans:

Pour expliquer la non-binarité à tes parents, c’est important de savoir exprimer ce que ça veut dire pour toi. Tu as l’air d’avoir très bien amorcé tes questionnements sur la signification de la non-binarité dans ton parcours et comment tu en es venu à la conclusion que c’est ce qui te correspond le mieux. Je te suggère donc de te pratiquer à l’exprimer et à en parler. Si tu as de la difficulté ou que tu as peur de te faire interrompre, il est aussi possible d’écrire une lettre à tes parents ou bien de leur envoyer des ressources, comme ce vidéo qui permet de faire ton coming-out non-binaire à ta place! Tu peux aussi consulter les réponses qu’on a écrites sur le sujet à AlterHéros ou bien l’article au sujet de la non-binarité dans le Wiki Trans.

Je dis souvent aux personnes trans et non-binaires qui veulent faire leur coming-out qu’une des choses à laquelle il faut penser avant de parler de son identité à ses proches est ce qu’on veut changer, concrètement. Pour toi, cette réflexion me semble déjà faite! Tu aimerais utiliser un nouveau prénom, avoir les cheveux courts, binder ton torse et qu’on te genre au masculin. C’est très important de nommer ces besoins à tes parents, car iels ne peuvent pas les deviner et iels pourraient aussi avoir des conceptions erronées sur ce que signifie être non-binaire ou trans. C’est donc aussi capital de leur nommer ce que tu ne veux pas changer. Souvent, le plus gros obstacle que les parents de jeunes trans ou non-binaires ont à surmonter est leur peur que leur enfant devienne une autre personne ou change complètement. Premièrement, tu gardes la même personnalité même si tu n’es pas une fille. Tu peux leur nommer des choses que tu aimes et des parties de toi que tu ne veux pas changer. Comme tu le dis dans ton message, tu veux « garder une part de ce qui faisait aussi de toi une fille ». Qu’est-ce que ça veut dire pour toi? Quelles sont les parties féminines de toi que tu veux garder et continuer à exprimer? Tu sais, pour moi, faire un coming-out non-binaire a été une façon de reconnecter avec ma féminité et d’apprécier l’exprimer. Par exemple, je porte beaucoup plus de robes depuis que j’ai fait mon coming-out et entrepris différentes démarches de transition que quand je faisais semblant d’être une fille!

Finalement, tu demandes s’il est possible pour une personne non-binaire de changer de nom officiellement. La réponse est oui. Par contre, il semble que puisque tu es mineur, la demande doit être présentée par tes parents. Puisque AlterHéros est un organisme québécois, je ne peux pas t’outiller par rapport au changement de prénom en France, je te conseille donc de consulter une association trans française, comme l’association nationale transgenre ou une association régionale.

J’espère que ma réponse t’aide à envisager ton coming-out avec un peu moins de stress. Je t’invite à consulter cette réponse et cette réponse que j’ai précédemment écrites à ce sujet, car j’y aborde plus concrètement certains trucs pour faire un coming-out et choisir le moyen de s’y prendre. Puisque tu parles de binder ton torse, je t’invite aussi à consulter cette réponse qui donne des conseils pour binder de façon sécuritaire.

Je te souhaite bonne chance et bon courage. N’hésite surtout pas à nous réécrire si tu en ressens le besoin.

Séré, intervenant pour AlterHéros

 

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