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3 juin 2019

J'ai l'impression de ne pas vivre une vraie dysphorie de genre. Est-ce que je fais ça juste pour l'attention?

Bonjour,
Alors, depuis quelques temps, je m’identifie plus comme un garçon. Ça doit faire un an minimum que je me pose des questions sur moi-même, mais depuis un mois, j’ai décidé de me faire parler au masculin. J’ai parlé de mon sentiment intérieur à mes deux meilleures amies et elles l’ont très bien pris. Elles ont commencé à m’appeler Alex et à utiliser le masculin en me désignant.
Je me suis toujours posé comme question si j’étais juste un garçon manqué ou trans. Même non-binaire. En fait, mes questionnement avait commencé quand j’avais treize ans, mais j’ai un mon premier copain et j’ai arrêté de me poser des questions sur mon genre parce que « un gars peut pas sortir avec un autre gars ». Après notre rupture, un an plus tard, j’avais donc quatorze ans, ça recommencer par passe. Je vivais dans le déni complet.
Finalement, j’ai quinze ans et j’essaye de commencer à savoir si je suis un gars ou juste en manque d’attention. C’est ça ma question.

morgymcfly

Bonjour,
Alors, depuis quelques temps, je m’identifie plus comme un garçon. Ça doit faire un an minimum que je me pose des questions sur moi-même, mais depuis un mois, j’ai décidé de me faire parler au masculin. J’ai parlé de mon sentiment intérieur à mes deux meilleures amies et elles l’ont très bien pris. Elles ont commencé à m’appeler Alex et à utiliser le masculin en me désignant.
Je me suis toujours posé comme question si j’étais juste un garçon manqué ou trans. Même non-binaire. En fait, mes questionnement avait commencé quand j’avais treize ans, mais j’ai un mon premier copain et j’ai arrêté de me poser des questions sur mon genre parce que « un gars peut pas sortir avec un autre gars ». Après notre rupture, un an plus tard, j’avais donc quatorze ans, ça recommencer par passe. Je vivais dans le déni complet.
Finalement, j’ai quinze ans et j’essaye de commencer à savoir si je suis un gars ou juste en manque d’attention. C’est ça ma question.
J’ai l’impression de vouloir faire juste ça pour l’attention. C’est vrai que des fois, je me sens mal dans ma peau et j’essaye de faire le moins de contact visuel avec ma poitrine, mais je ne sais pas si j’expérimente la vrai dysphorie de genre. Pratiquement tous les reportages que j’ai vu, parle de la dysphorie de genre comme quelque chose de tellement mauvais que les personnes en pleurent, se cachent, essayent de se suicider, etc… Or, moi, je ne me sens pas de même. Oui, un jour, j’ai pleuré à cause de mon corps féminin, mais c’est arrivé une seule fois. Maintenant, je ne pleure pas et quand mes amies me mégenrent, oui ça me dérange un peu parce que j’aimerais être un « il » et un « Alex« , mais pas au point de me faire remettre en question pis commencer à me mettre en boule dans un coin. Quand je regarde mon corps, j’essaye d’ignorer toutes les parties féminines pour me concentrer sur moi et ça marche.
À l’école, je dois porter une jupe, des petits souliers pour fille et tout, et tout, or, la plupart de la journée, je me sens correct. Je me sens pratiquement bien, mais c’est vrai que j’ai hâte de remettre mes joggings et mon coton ouaté à la fin de la journée. Je veux m’habiller de plus en plus masculin parce que je me sens plus à l’aise ainsi que confident, et quand je porte du linge de fille, je me sens moins bien dans mon corps. Je me sens… féminin, mais je me sens pas mal au point de vouloir pleurer ma vie sur mes courbes.
J’ai l’impression de ne pas vivre une vraie dysphorie de genre ou, du moins, une moins grande dysphorie, donc je me sens moins valide. Est-ce que je fais ça juste pour l’attention?
Merci,
Alex
Salut Alex !
Merci pour ta question. Si je comprends bien, tu es en questionnement sur ton identité de genre, et tu ne te sens pas valide parce que tu dis ne pas expérimenter de dysphorie de genre, ou du moins pas autant que ce que tu as pu voir dans certains documentaires.
Avant toute chose, je voulais te dire que je te comprends beaucoup. Permets-moi de te parler un peu de moi. Morgan n’est pas mon prénom de naissance ; ça fait depuis environ septembre dernier que je l’utilise et que j’ai demandé à mes ami-e-s de commencer à l’utiliser. J’ai choisi Morgan parce que je voulais un prénom neutre. Quand je parle de moi-même, j’essaie de ne pas genrer mes phrases, ou d’alterner les accords masculins et féminins. La plupart des gens me genrent encore majoritairement au féminin et ça ne me dérange pas vraiment, même si j’aime beaucoup quand on me genre au masculin.
Comme toi, j’ai l’impression de ne pas vivre de dysphorie de genre très intense. Ça se peut de vivre plus ou moins de dysphorie de genre, ou même pas du tout. Ça ne fait pas de nous une personne moins trans. Chaque personne vit son genre de façon unique ! C’est vrai que les médias montrent souvent des représentations de personnes trans qui vivent une dysphorie vraiment importante. Et c’est le cas pour certaines personnes, mais pas pour toutes. Le problème est que comme on a surtout cette représentation là, on a du mal à concevoir qu’on puisse être une personne trans (j’inclus ici les personnes non-binaires dans ce terme) qui ressent peu ou pas de dysphorie. Or, ce n’est pas l’intensité de notre dysphorie qui fait de nous une personne plus ou moins valide dans notre genre. Ce sentiment de manque de validité dont tu parles est en fait très fréquent chez les personnes trans et non-binaires. Moi-même, qui m’identifie comme personne non-binaire, j’ai fréquemment ce genre de pensées où je me demande, par exemple, si mon désir de me faire appeler Morgan au lieu de mon nom de naissance, ou de me faire genrer en alternance, ne sont pas des caprices et un besoin d’attention. Même chez certain-e-s de mes ami-e-s qui sont des personnes trans qui s’identifient clairement en tant qu’hommes ou en tant que femmes, il y a souvent cette idée de « ne pas être assez trans », de devoir prouver au monde qu’on est un « vrai homme », une « vraie femme ». Cette idée est encouragée par la société qui veut ranger tout le monde dans deux catégories bien distinctes : les catégories « hommes » et « femmes », avec les stéréotypes qui vont avec.
Je voudrais te parler d’un terme que j’aime beaucoup et que j’ai découvert l’été dernier lors de la marche pour la fierté trans. Il s’agit de l’ « euphorie de genre ». C’est un peu l’opposé de la dysphorie de genre ; au lieu de désigner des choses qui nous font sentir inconfortables par rapport à notre genre, ça désigne des choses qui nous font sentir bien. Par exemple, ta sensation quand tu reviens chez toi le soir et que tu enfiles ton coton ouaté pourrait rentrer dans cette euphorie de genre. Ou quand tu te fais appeler Alex. Ou quand je me fais appeler Morgan. Se concentrer sur ces éléments qui nous font du bien est important aussi, afin de pouvoir reconnaître nos besoins et les faire respecter.
À ce propos, je trouve ça génial que tu expérimentes d’autres façons de te genrer ou de te faire nommer. Si ça te fait du bien, c’est le principal ! Et ce qui te fait du bien à un moment donné de ta vie peut ne pas être ce qui te fera du bien à un autre moment. C’est correct d’expérimenter, de changer. Certaines personnes vont avoir une perception de leur genre fixe dans le temps, d’autres vont avoir une perception plus fluide. Tout est correct tant que la personne se sent bien et que les autres personnes respectent son choix de prénom, de pronoms, et leur identité en général.
Certaines personnes trans se reconnaissent assez clairement dans les étiquettes « homme » ou « femme », mais beaucoup ne s’y reconnaissent pas – c’est le cas des personnes non-binaires. Ce terme peut regrouper un ensemble très vaste d’identités qui se situent hors de la binarité homme/femme. À ce propos, si ça t’intéresse, je te conseille d’aller regarder la « licorne du genre ». C’est un schéma qui montre qu’on peut très bien se sentir pas du tout femme et pas du tout homme, ou un peu femme et beaucoup homme, ou beaucoup homme et femme en même temps. Les combinaisons sont infinies ! Et si tu veux trouver un terme qui correspond parfaitement à ton identité, sache qu’il en existe de nombreux aussi : homme, femme, non-binaire, mais aussi demi-boy, demi-girl, agenre, genderfluid…
Aussi, ce schéma est intéressant parce qu’il distingue bien l’identité de genre, l’orientation sexuelle, l’orientation romantique, l’expression de genre. En effet tu peux très bien être attiré par un gars et être un gars quand même ! En fait, peu importe notre identité de genre, on peut avoir n’importe quelle orientation romantique ou sexuelle, et n’importe quelle expression de genre. C’est correct de s’identifier d’un certain genre (ou à aucun genre) et de ne pas correspondre aux stéréotypes associés à ce genre. On peut très bien être un homme (cis ou trans) qui aime porter des robes ou se maquiller, comme on peut très bien être une femme (cis ou trans) qui aime porter un nœud papillon. Tu peux même faire ta propre licorne du genre ici !
De la même façon, certaines personnes trans ou non-binaires vont vouloir prendre des hormones ou faire des opérations pour se sentir confortables dans leur genre, mais certaines personnes vont se sentir bien sans faire ce qu’on appelle une « transition médicale ». Et ça ne fait pas des personnes qui ne veulent pas faire de transition médicale des personnes moins valides dans leur transidentité ; chaque personne ressent différemment ce qui est le plus confortable pour elle, et chaque personne est valide dans son identité de genre, peu importe son niveau de dysphorie ou son expression de genre. Donc que tu expérimentes beaucoup de dysphorie, un peu, ou pas du tout, tu n’es pas moins légitime dans la façon dont tu ressens ton genre. Et tout ce qui peut contribuer à ton euphorie de genre (à ce que tu te sentes confortable avec ton genre et bien avec toi-même) est valide et important, et en aucun cas un manque d’attention. J’espère que ça aura répondu à ta question, n’hésite pas à nous réécrire si tu as d’autres questions ou si tu as besoin d’être orienté vers des ressources.
Morgan

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