18 novembre 2020

Je voudrais coucher sexuellement avec des garçons, mais le contact avec leur sexe me fait peur et me provoque des répulsions, alors que j'en ai vraiment envie...

Salut, je vais être direct, j’espère ne pas choquer, je me sens bloqué dans ma vie. Je voudrais coucher sexuellement avec des garçons mais quand j’imagine l’acte dans le réel, le contact avec leur sexe me fait peur et me provoque des répulsions, alors que j’en ai vraiment envie. Si j’étais homosexuel, alors je n’aurai pas cette répulsion. Suis je normal ? Je ne sais pas quelle est mon orientation du coup. En fantasme, je le sais très bien vu que mes rêves et mes désirs sont orientés vers les mêmes personnes et ça ne varie presque pas, sauf de temps en temps avec des filles, donc je connais pas mon orientation dans le réel, je suis totalement perdu et je suis frustré que le réel ne colle pas à mes désirs sexuels alors que j’ai de plus en plus de désirs gay en moi qui voudrait pour une première fois faire une expérience gay dans le réel et pas une expérience hétéro , j’en rêve parfois la nuit que je fais l’amour à un garçon de ma classe et que je l’embrasse, et au réveil je suis frustré et triste que ce n’est pas réel. Je me sens donc totalement dépassé, mélangé et perdu à cause des mes répulsions pour le sexe homosexuel dans le réel. Je ne sais pas quoi faire !
Guillaume

Marion Brodeur-Laperrière
Salut Guillaume!
Je constate que tes questionnements sur ton orientation sexuelle et tes fantasmes te prennent beaucoup d’énergie, alors je suis contente que tu aies pris le temps de nous écrire pour t’aider à mettre un peu d’ordre dans tes pensées. Si je résume, tes désirs et fantasmes sont majoritairement dirigés vers les garçons et tu souhaites vivre une relation sexuelle homosexuelle dans un avenir plus ou moins rapproché. Pourtant, quand tu t’imagines passer concrètement à l’acte, tu ressens de la peur et du dégoût face à leur pénis. Du coup, tu es confus par rapport à ton orientation sexuelle puisque, malgré ce dégoût, tu as aussi envie d’une telle expérience.
La première chose que j’ai envie de te dire, c’est que c’est tout à fait normal d’avoir ce genre d’interrogations. La sexualité humaine est complexe et comporte de nombreuses facettes qui ne semblent pas toujours s’aligner, alors il peut être mélangeant de naviguer à travers tout ça, particulièrement à l’adolescence, alors qu’on est en pleine découverte de soi, de ses désirs et de ses aspirations!
Au fil de tes questionnements à propos de ton attirance pour les garçons, tu nommes avoir souvent eu peur ou avoir ressenti du dégoût en t’imaginant avoir réellement une relation sexuelle avec un garçon, particulièrement en lien avec leur pénis. Ces émotions créent de la confusion chez toi puisqu’en même temps, tu as des fantasmes de nature homosexuelle et tu souhaites vivre une relation sexuelle avec un garçon. Je t’invite à t’interroger sur la nature de cette peur et de ce dégoût. Est-ce que ce sont certaines pratiques sexuelles en particulier qui provoquent ces réactions? Il faut savoir que certains fantasmes peuvent être excitants sans que l’on souhaite les reproduire dans la vraie vie et que c’est tout à fait correct. Est-ce que c’est plutôt le principe de «concrétiser» ton homosexualité qui te fait peur? À l’inverse, qu’est-ce qui t’excite dans tes fantasmes? En quoi diffèrent les scénarios de tes fantasmes et ceux où tu réfléchis consciemment à les mettre en pratique dans le réel? Il est possible que, consciemment, tu ressentes de l’attirance pour les garçons et désires des rapprochements physiques avec eux, mais que, inconsciemment, cela te fasse peur ou te rebute. Cette peur et ce dégoût peuvent s’ancrer dans ce qu’on appelle de l’homophobie intériorisée. C’est lorsque l’on intègre les préjugés et la peur qui sont transmis par la société par rapport à l’homosexualité, sans nécessairement en être conscient.e. Ça peut se traduire par la peur de «ne pas être normal.e», l’impression de ne pas être «un vrai gay» si on ne s’adonne pas à telle ou telle pratique sexuelle, des émotions négatives envers soi, etc. C’est insidieux parce que c’est lié à nos émotions. Du coup, il est tout à fait possible que, rationnellement, on comprenne que toutes les orientations sexuelles sont aussi acceptables ou «normales», que l’on sache que nos fantasmes ne reflètent pas toujours nos désirs dans la vie réelle et que l’on souhaite que tout le monde ait le droit au mariage, quelle que soit leur orientation sexuelle, par exemple. Pourtant, il est possible d’en même temps ressentir toutes ces émotions négatives et d’entretenir des craintes face à l’idée de ne pas être hétéro. Certaines craintes, malheureusement, peuvent être fondées, comme la peur de vivre de l’incompréhension ou de l’hostilité de la part de notre entourage. Par contre, le fait d’avoir une orientation sexuelle qui n’est pas celle de la majorité n’a rien de mal en soi et ne devrait pas nous faire sentir mal. Évidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire, mais ça vaut la peine de faire une introspection. S’interroger sur les préjugés et les fausses croyances que l’on peut entretenir afin de les démystifier et un bon moyen d’avancer sur le chemin de l’acceptation de soi et, par conséquent, d’un plus grand sentiment de paix et de bien-être.
Par ailleurs, je tiens à faire une petite parenthèse à propos de l’orientation sexuelle en tant que telle parce qu’il semble que le fait de ne pas connaître la tienne, de ne pas savoir si tu peux te nommer «homosexuel» ou pas te dérange. Si je reprends les mots que j’utilise souvent pour l’expliquer, l’orientation sexuelle se décline en trois aspects : les désirs, les comportements et l’identité. Les désirs, ce sont nos attirances et envers qui elles se déclarent (est-ce qu’on est plutôt attiré par tel ou tel type de corps, tel ou tel type de personne, qui on aurait envie d’embrasser, etc.). Les comportements, ce sont les actions que l’on pose réellement, à l’inverse des désirs qui renvoient à l’imaginaire (ex : avoir embrassé notre amie, avoir eu une relation sexuelle avec un homme, avoir regardé les fesses d’une personne dans la rue). Finalement, l’identité, c’est l’appropriation et le choix de mots pour se décrire par rapport à notre identité sexuelle (hétéro, gai, pansexuel.le, etc.). Certains hommes, par exemple, qui auraient des désirs invariablement de l’identité de genre des personnes qui l’intéressent, mais n’avoir eu des expériences sexuelles qu’avec d’autres hommes, pourraient se définir comme gais (se basant plutôt sur leurs comportements) ou comme pansexuels (se basant davantage sur leurs désirs) ou même d’autres termes s’ils lui conviennent mieux! L’identité, c’est vraiment propre à chaque personne, sa façon de se percevoir et son sentiment d’appartenance à une orientation sexuelle plutôt qu’une autre. Du coup, si tu te sens plus à l’aise de te considérer homosexuel parce que c’est ce qui te semble le plus juste par rapport à ce que tu ressens, c’est la seule chose qui compte. C’est ton identité à toi, après tout!
J’aimerais aussi ajouter que, bien que de nombreux mots existent pour se définir au plan de l’orientation sexuelle, rien ne t’oblige à en choisir un! Ça peut être mêlant ou intimidant parfois, mais les mots sont là pour créer un sentiment de communauté (trouver d’autres gens qui se définissent comme nous et nous comprennent peut faire beaucoup de bien), mais surtout pour nous aider nous-mêmes à nous comprendre et nous définir. Si les mots ne te font pas de bien, tu n’as absolument pas besoin de t’apposer une étiquette! L’important, c’est que ça résonne avec ton ressenti. Si c’est quelque chose qui peut te faire du bien, tu peux explorer les différents termes d’identités qui existent, voire en inventer un si ça te convient mieux!
Tu sais, c’est tout à fait normal de t’interroger sur tes désirs et tes fantasmes. C’est aussi normal de te demander si les pensées que tu as ne font que t’exciter lorsque tu te les imagines ou bien si tu as réellement envie de vivre ces scénarios. Peut-être qu’en amorçant une réflexion plus poussée sur ce qui t’excite et te fait peur, sur ce que tu es prêt à vivre ou non, tu pourras mieux cerner tes désirs et tes besoins. Peut-être aussi voudras-tu vivre certaines expériences pour mieux savoir ce qui te plaît ou non dans la sexualité. L’important, c’est que tu ne te sentes pas forcé de faire quelque chose dont tu n’as pas envie. C’est bien correct d’essayer quelque chose et de ne pas aimer ça! Et sache que tu peux mettre un terme à une activité sexuelle qui ne te plaît pas à tout moment, même si c’est en plein milieu de l’acte!
Quoi qu’il en soit, je t’invite à poursuivre ta réflexion sur les raisons derrière la peur et le dégoût qu’il t’arrive de ressentir ainsi qu’à propos des différences entre tes fantasmes «fictifs» et ceux que tu imagines en «situation réelle».  Cela pourra probablement te permettre de mieux cerner ce qui t’excite de ce qui te rebute et, plus globalement, de mieux te connaître sur le plan sexuel. Permets-toi d’explorer ton érotisme comme il te plaît et n’oublie pas le plus important : la sexualité devrait d’abord être source de plaisir. Rien ne t’oblige à t’engager ou à poursuivre une pratique sexuelle dans laquelle tu ne te sens pas à l’aise.
 
J’espère avoir pu t’aider à faire un peu le point sur ta situation et à alimenter une réflexion positive. Si jamais quelque chose n’était pas clair, que je n’ai pas répondu à une de tes interrogations ou pour tout autre chose, n’hésite pas à nous réécrire! Ça nous fera toujours plaisir de te répondre.
 
Prends soin de toi,
 
 
Marion, bénévole pour AlterHéros

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