Bonjour à toi,
Merci vraiment beaucoup de nous écrire. Je comprends que le harcèlement que tu subis à l’école te fait ressentir beaucoup de souffrance, de peur et de culpabilité. C’est important que tu ne restes pas seul avec ça et j’apprécie que tu sois venu chercher de l’aide auprès de nous. À la lumière de ton message, je vais tenter de te donner de l’information et de te proposer des actions concrètes que tu pourrais prendre pour régler la situation.
Alors, à ma compréhension il y a deux aspects principaux de ton message que j’aimerais pouvoir adresser : ce que tu vis à l’école et ton attirance pour les garçons.
Premièrement, tu décris de la violence verbale et psychologique très intense et à tous les jours. Il est normal d’avoir mal et de ne pas savoir quoi faire dans une telle situation, particulièrement à ton âge. Je veux vraiment insister sur le fait que tu n’as absolument rien fait pour mériter cela : ce n’est pas à cause de tes vêtements, de ton apparence, de ta personnalité, de tes comportements, ni même de ton attirance pour les garçons que tu es traité ainsi. Il n’y a rien de tout ça qui est de ta faute. Le harcèlement homophobe (avec les mots comme PD, pédale) ne vise pas les homosexuels, ni les garçons qui peuvent sembler homosexuels, il s’agit d’une haine et d’un mépris pour l’homosexualité basé une mécompréhension totale de ce qu’elle représente ou signifie : n’importe qui pourrait être victime de ce type de violence. Les élèves ayant tenu des propos violents et abusifs à ton égard sont les seuls et uniques responsables de ceux-ci, et ces propos ne sont pas un reflet de qui tu es. Juste par ton message, tu démontres une grande dose de maturité, de sensibilité et de capacité d’introspection. Il s’agit de qualités et de capacités qui t’aideront tout le reste de ta vie, contrairement à tes collègues ayant recours à la violence. Je ne crois pas que tu as à te sentir coupable de ne pas arriver à défendre tes sœurs ni à arrêter la situation. C’est quelque chose d’extrêmement complexe et difficile à gérer, et à ce que je peux voir tu prends déjà des actions pour que cela arrête, en nous écrivant par exemple.
J’aimerais te demander : est-ce que d’autres personnes dans ton entourage sont au courant du harcèlement, tes sœurs, tes parents, tes professeurs ou d’autres adultes de ton école par exemple? Si ce n’est pas déjà le cas, je t’encourage vraiment à en parler à une personne de ton entourage à qui tu fais confiance, voire à dénoncer la situation auprès de l’école. Normalement, toute forme de violence ou de harcèlement va à l’encontre des règles et il existe des systèmes et des mesures en place pour accompagner et protéger les victimes et pour responsabiliser les élèves ayant posé des gestes violents dans une perspective de justice réparatrice. C’est notamment le cas en France! Tu peux ainsi en parler avec un prof, à ton ou ta CPE, à l’infirmière scolaire… tu peux même en parler avec tes propres parents si tu en ressens le courage. Ces personnes sont là pour agir et pour te protéger et pourront prendre rendez-vous avec le/la proviseur.e de ton école. Tu peux aussi appeler anonymement au Non Au Harcèlement au 3020. Il s’agit d’un service spécialement conçu pour les jeunes, tu seras écouté, je te garantis. Les personnes responsables à ton école devraient être en mesure d’écouter tes besoins et ce que tu aimerais qu’il arrive. Je n’ai jamais étudié en France, je ne sais pas à quel point ces mesures sont systématiquement respectées au quotidien dans les collèges et les lycées, mais je crois que ça pourrait vouloir la peine d’essayer, qu’en dis-tu? Est-ce qu’il y a un.e adulte de confiance dans ton école dont tu serais à l’aise pour partager ta situation? Aussi, est-ce qu’il y a d’autres élèves avec qui tu es plus proche à qui tu pourrais demander de réagir et intervenir lorsqu’ils sont témoins de harcèlement à ton égard?
Je comprends qu’il peut être très difficile d’en parler. Il est possible que tu te dises que tu préfères te débrouiller tout seul pour faire face à cette situation. Mais on est toujours plus fort à plusieurs, qu’en penses-tu? C’est d’ailleurs leur propre stratégie. C’est pourquoi en parler avec une personne de confiance est un premier pas, un peu comme quand tu nous écris aujourd’hui! D’autre part, il est possible que tu ressentes de la peur de parler de ces formes de harcèlement que tu vis : tu peux avoir peur de te sentir à nouveau humilié si tu révèles les paroles liées au harcèlement que tu subis, peur que ça ne serve à rien, peur que les choses empirent ou peut qu’on puisse s’en prendre à ta famille. Je comprends qu’on peut avoir le réflexe de se taire dans ces formes de situation, mais sache que c’est exactement ce que les agresseurs recherchent. Je t’encourage donc sincèrement à lutter contre ce réflexe et à en parler rapidement à quelqu’un de confiance. Il est possible qu’une des raisons pour lesquelles tu hésites à en parler soit que tu crains de devoir dévoiler ta propre orientation sexuelle en dénonçant tes agresseurs. Sache que rien ne t’oblige à parler de tes propres attirances dans ce processus, tout le monde peut être victime de ce genre de violence, indépendamment de son orientation sexuelle. Si jamais c’est quelque chose qui peut te mettre en confiance, tu peux choisir un.e adulte de confiance dont tu connais l’ouverture d’esprit et que tu sais bienveillant.e envers les personnes LGBT. Qu’en penses-tu? Parler à une personne de confiance de ce que tu vis, c’est finalement de leur dire « vous ne me faites plus peur ». Il s’agit d’un acte de courage qui permettra à la situation d’être reconnue et que les différentes formes de harcèlement que tu vis puissent s’arrêter.
Sinon, il y a d’autres choses que tu peux faire. Voici quelques lignes d’écoute que tu pourrais appeler, les gens à l’autre bout du fil sont qualifiés pour t’écouter, te soutenir et te donner des conseils précis :
- Suicide écoute : 01 45 39 40 00
- Non au harcèlement : 30 20
- Ligne Azur (concernant l’homophobie et les pensées suicidaires) : 0 810 20 30 40
- SOS homoĥobie : 01 48 06 42 41
De façon générale, je t’invite à faire des choses qui te font du bien dans ta tête ou dans ton corps ou encore qui t’aident à te relaxer ou te distraire, tout en gardant une priorité pour ta santé, ta sécurité et ton bien-être. Tu pourrais aussi peut-être t’impliquer dans un club, un comité, une activité ou un organisme qui rejoint tes intérêts, ça peut être un groupe Facebook ou une chaîne Discord aussi, c’est une bonne façon de rencontrer des gens avec qui l’on a déjà des points en commun.
Maintenant, dans un deuxième temps, j’aimerais te parler de tes attirances et de l’orientation sexuelle. La première chose à retenir c’est qu’être gay est une bonne chose, c’est une expérience qui peut absoluement être plaisiante, amusante et enrichissante. Ce n’est pas une sentence ou une punition! Ce n’est pas non plus lié à ses compétences de séduction, ses expériences de rejet avec certaines filles, sa force physique, sa masculinité ou sa féminité. En fait, l’orientation sexuelle c’est les attirances sexuelles et/ou romantiques que l’on développe, ou plutôt découvre, naturellement pour un type de personne, pour leur genre précisément. Tu as raison quand tu dis que ce n’est pas quelque chose qui hors de notre contrôle, que l’on ne peut pas forcer ni changer consciemment. Encore une fois, je veux te signifier que l’amour et la sexualité entre hommes ne sont pas des sources de faiblesse et de honte, mais bel et bien de force et de fierté. Je t’assure 🙂
J’aimerais également te partager que l’on ne devient pas gay, tout comme on ne devient pas hétéro, bi ou asexuel.le. On le découvre, simplement! Ceci étant dit, l’orientation sexuelle n’est aucunement un indicateur de force ou de faiblesse. Entre toi et moi, ce sont ces agresseurs qui sont les plus faibles : s’attaquer aux autres de cette façon n’est aucunement quelque chose d’honorable, bien au contraire. Parallèlement, c’est toi qui est fort dans l’histoire, puisque c’est toi qui remet en question ces paroles, c’est toi qui nous écrit aujourd’hui pour trouver des solutions et c’est toi qui met le bien-être de ta famille au coeur de tes préoccupations. Il faut du courage et c’est vraiment à ton honneur!
Cela dit, je comprends que ton manque de contrôle sur ta vie est difficile à supporter et j’espère que tu arriveras à changer cela rapidement! Je crois qu’en nous écrivant tu as déjà fait un premier geste important pour reprendre le dessus, les prochaines étapes devraient s’enclencher au rythme que tu établis.
L’équipe d’AlterHéros reste toujours disponible pour répondre à tes questions si tu le souhaites. Aussi, sache que tu peux nous écrire aussi uniquement pour nous donner de tes nouvelles! Ça nous ferait plaisir 🙂
Avec beaucoup de bienveillance,
Maxime, intervenant·e pour AlterHéros
Iel/they/them, accords neutres