Bonjour!
Je te remercie pour la confiance que tu nous accordes. J’espère qu’en faisant le tour des sections du site, tu as pu constater que tu n’es pas la seule personne à se sentir comme ça. Selon ce que tu m’as écrit, tu sembles avoir une identité masculine qui existe en toi depuis une longue période de temps. Tes intérêts ont toujours été typiquement masculins et tu as des projets de faire une transition pour vivre à temps plein dans le genre masculin. Tu pense que la transition de genre (le changement de sexe) est la solution à ce que tu vis, mais tu as de nombreuses questions.
La transsexualité masculine, c’est quand une personne qui est née femme a une identité intérieure masculine. Cette discordance a des conséquences dans toutes les facettes de la vie de la personne: psychologique, sociale, scolaire, amoureuse, etc. La transsexualité cause un mal-être constant et la seule façon de faire disparaître ce mal-être, c’est la transition, c’est à dire un changement physique, social et légal vers le sexe masculin. Dans ta lettre, tu me dis avoir un désir très fort d’être un garçon, et ce depuis maintenant 1 an. Ce désir est-il si fort que ça t’affecte dans ta vie de tous les jours? Est-ce que ça te donne des pensées noires? Ta lettre ne le dis pas, ce sont des questions que tu doit sérieusement te poser. Je ne peux pas te dire si tu es trans ou pas, seulement toi peut le savoir réellement. Peut-être découvriras tu que tu es plutôt transgenre, c’est à dire une personne qui s’identifie un peu aux deux sexes, ou peut-être découvriras tu qu’être une fille masculine te convient bien. Mais il est bien possible aussi que tu conclues que tu es bel et bien trans.
Je ne ferai pas la listes de toutes les démarches nécessaires à une transition de genre. Par contre, je peux t’indiquer un peu par où commencer. La première étape, la plus importante, est de vraiment explorer ton identité, d’expérimenter des façons nouvelles de l’exprimer. En le cernant mieux, tu pourras savoir plus précisément ce que tu dois faire pour atteindre le bonheur. Parmi toutes les choses que tu souhaites faire, il y en a certains qui sont à ta portée sans même que tu aies à faire de coming-out: changer ton style vestimentaire et couper tes cheveux. C’est peut-être  quelque chose que tu pourrais faire afin de voir comment tu te sens avec une apparence plus masculine. Tu peux même joindre l’utile à l’agréable. Par exemple au Québec, plusieurs jeunes, garçons et filles, se font raser la tête afin d’amasser des fonds pour la lutte au cancer. Il existe probablement des causes semblables ailleurs dans le monde.
Évidemment, plus tu masculiniseras ton apparence, plus ça fera réagir ton entourage, particulièrement ta mère. Tout d’abord, je suppose qu’elle a déjà remarqué que depuis longtemps tu as des comportement qui sont plus généralement associés aux garçon. Comment réagit-elle par rapport à ça? Est-ce qu’elle t’a encouragé ou est-ce que ça semblait l’exaspérer? C’est un bon indice de ce qui s’en vient pour toi. Mais, même si elle est ouverte d’esprit, tu peux t’attendre à de nombreuses résistances de sa part. Par contre, cela ne veut pas dire qu’elle n’acceptera pas que tu sois un gars ou que tu t’exprimes de façon plus masculine. Ce que je peux te conseiller, c’est de ne pas baisser les bras et de continuer de lui expliquer comment tu te sens, et de continuer à exprimer qui tu es avec fierté. Tu sais c’est ta responsabilité à toi de la rassurer, de lui dire que tu l’aimes toujours même si tu changes et que tu te sens biens là dedans. Continue d’insister afin de pouvoir t’habiller comme tu veux et agir comme tu veux. En tentant d’agir de façon féminine, tu vas seulement te causer de l’inconfort. Chaque petit geste que tu poses pour affirmer ta masculinité aidera à construire ton identité et ta confiance en toi. Il faut espérer qu’en voyant le bonheur que cela t’apporte, les yeux des gens autour de toi s’ouvriront. Ainsi, si un jour tu sens que ton identité masculine est bien solide et que la transition est la solution pour toi, tu seras prêt à faire ton coming-out auprès d’eux, c’est à dire de leur dire que tu n’es pas une fille masculine, mais bel et bien un gars.
Le coming-out est une étape importante et il faut absolument que tu te sentes à 100% pour le faire. Tu dois t’attendre à toutes les possibilités, y compris qu’on ne te prenne pas au sérieux. Mais si tu as l’appui de tes parents, cela t’ouvrira plein de possibilités. Peut-être pourras-tu convaincre tes parents de te trouver un ou une médecin, psychologue ou personne spécialiste en questions d’identité de genre avec qui tu pourrais discuter de ce que tu vis. Une telle personne pourrait servir de « contact » entre toi et ta famille, afin de faciliter la communication entre vous. Un spécialiste pourrait également commencer le processus d’évaluation qui te permettrait éventuellement de prendre de la testostérone si tu le désires. Voici d’autres ressources pour le coming out:
– Une association de parents de personnes LGBT dans la région où tu vis.
– Laura’s Playground (www.lauras-playground.com/) . La mère d’une jeune trans que je connais a pu trouver d’autres mères avec qui parler sur ce forum de soutien.
– Si tes parents ont une compréhension correcte de l’anglais, je te suggère fortement d’imprimer le guide Families in TRANSition (http://www.ctys.org/sites/default/files/familiesintransition-a_resource_guide_for_parents-080608.pdf) et de leur donner. Ce document est une mine d’or d’informations pour les parents de jeunes trans et couvre toutes les étapes de la démarche (acceptation, aspect médicaux, accompagnement du jeune).
– Alterhéros,… hé oui! Si ta mère veut nous écrire une question, cela sera un plaisir d’y répondre!
– Finalement, voici une excellent documentaire sur la réalité des jeunes trans (http://video.telequebec.tv/video/2750) . Cette émission prouve hors de tout doute qu’il est possible de faire une transition équilibrée et heureuse à adolescence. Je te suggère de la visionner avec ta mère.
Tu sais, il ne faut pas baisser les bras. Il est important de parler de ton identité de genre tous les jours à ta mère, même si ça lui casse les pieds. Tu ne dois pas t’attendre à avoir de la testostérone ou des chirurgies avant plusieurs années. Ce qui pourrait arriver par contre, c’est qu’on te prescrive un bloqueur d’hormones. Les bloqueurs se rendent dans le cerveau et désactivent  la petite alarme qui crie à ton corps de produire des œstrogènes. Leur effet est temporaire; dès qu’on cesse d’en prendre, la production hormonale reprend comme si rien ne s’était passé. C’est donc le médicament qui est souvent donné aux adolescents trans car il n’a aucune conséquence à long terme si le jeune décide finalement de ne pas effectuer de transition. Si graduellement, au cours de l’adolescence, tu fais des changements majeurs, comme par exemple celui de changer ton identité à l’école, et si tu le fait avec du soutien de ta famille et avec la collaboration de spécialistes attentionnés, alors tout ira très vite lorsque tu seras en âge.
Merci de nous avoir écrit. Continue de réfléchir et d’expérimenter pour découvrir ta réelle identité. N’hésite pas à nous réécrire si tu as d’autres questions!