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26 février 2021

J'ai fait mon coming out à mes parents asiatiques, mais je vis toujours dans le peur en plus de la dysphorie...

J’ai fais mon coming out à mes parents asiatiques, mais je vis toujours dans le peur en plus de la dysphorie…

Bonjour!
J’ai 23 ans, je suis d’origine chinoise. Récemment, j’ai informé mes parents que je suis genderqueer et bisexuel.
Je ne voulais pas come out encore mais c’était simplement trop lourd, ils soupçonnaient depuis longtemps de toute facon.

Ceci a vraiment blessé ma mère, je me sens coupable même après ses commentaires humiliants. Ils pensent que c’est une déviance, un choix, ou que j’etais influencé par des mauvaises personnes ou par ce que j’avais vécu durant ma jeunesse, etc.

Après avoir informé mon pére, ils ont fait un ultimateum qu’ils vont me mettre à la porte et me renier si jamais je suis en relation avec un homme ou que je deviens plus « abnormal », qu’ils ne veulent pas voir leur fils se faire en**ler par un autre homme.
De plus, mon père voulait qu’on confisque mes trucs de maquillage et vetements pour prévenir cette « déviance ». Il veut enlever tout support pour moi et me dit de rester loins des groupes lgbtq. J’essaie de respecter leurs opinions et comprendre leurs inquiétudes mais ils font toujours aucun effort pour comprendre moi. C’est un sujet qui ne s’explique pas dans ma culture.

En même temps, la dysphorie me détruit, je ne reconnais pas mon corps male. J’hais être forcé de me présenter d’un certain facon parce que je suis né un garcon.
Mais si je ne suis pas libre de faire des choses pour faciliter celle-ci. Je n’ai aucune espace pour être moi. Ni à la maison ni à mon emploi ou je dois m’habiller en suit(qui empire ma dysphorie).

Parfois je veux tellement fuguer. Mais je ne peux pas, car je sais les conséquences de la situation familiale et culturelle vont être trop pour moi . Je suis trop faible.
Mais clairement, je ne peux pas continuer à vivre comme ça dans la maison non plus. Et je n’arrive pas à imaginer le cauchemar si ils savaient la possiblité que leur fils unique soit une femme trans.

Je ne vois vraiment plus d’espoir et je souhaite de disparaitre. Je n’ai plus de motivation pour travailler ou pratiquer mes loisirs. Comme mon coming out, je trouve que tout sert a rien.

J’ai quelques amis qui me supportent mais ils ont de la difficulté à comprendre ma situation complexe.
Désolé pour ce dérangement, j’aimerais savoir si vous avez des conseils ou des ressources pour ma situation particulière? Est-ce je devrais juste fuguer? Quoi faire avant que ça soit trop tard?

Désolé encore pour ce long texte avec pleins de petits détails. Je vous souhaite une bonne soirée.

Merci!

Dahlia

Kay Wo

Bonjour Dahlia (super prénom d’ailleurs !),

 

Merci beaucoup d’avoir écrit à AlterHéros par rapport à ce qui se passe dans ta vie. Il n’est absolument pas nécessaire de t’excuser pour la longueur de ton message ; en fait, cela nous aide beaucoup de connaître plus de détails sur ta situation afin que nous puissions mieux te soutenir!

 

Tout d’abord, wow! Tu as traversé des moments difficiles avec tes parents et tu vis toujours, à l’heure actuelle, dans une situation extrêmement difficile. Merci beaucoup de nous en faire part. Avant de commencer, j’aimerais te partager que je m’identifie aussi comme une personne queer, bi-asiatique (Chinoise aussi !) qui est genderfluid et bien que je n’aie pas la même expérience personnelle que toi, je peux vraiment m’identifier à la dimension du fait d’avoir des parents asiatiques >_<. Commençons.

 

Ohh la pression de faire un coming out… pas seulement en tant que bi, mais aussi en tant que genderqueer? La pression de devoir se cacher continuellement peut devenir très pesant ; c’est tout à fait compréhensible que cela t’ait poussé à faire ton coming out auprès de tes parents alors que tu ne le voulais pas nécessairement encore. C’est déjà une situation difficile, mais avoir des parents chinois.e.s en plus de tout cela?! Contrairement à de nombreuses familles que nous voyons à la télévision ici et qui ont des histoires de coming out roses et encourageantes, de nombreux parents asiatiques ont des attentes très spécifiques ou très élevées pour leurs enfants, et pas seulement en ce qui concerne leur identité de genre et leur sexualité! Il faut travailler dur, étudier dur, être compétitif.ve, avoir de bonnes notes, avoir une carrière ambitieuse et lucrative, se marier, avoir des enfants, posséder une maison etc, etc, etc… Tu as obtenu un B+ en cours de sciences? ÉCHEC. Tu aimerais devenir professionnel.le en travail social? Ce n’est pas une carrière! COMMENT ÇA, T’ES QUEER ??? La pression, les attentes, la déception et ce qui ressemble à un amour conditionnel plutôt qu’inconditionnel peuvent être paralysant. C’est particulièrement difficile quand on vit au Québec où il y a de la blanchité à perte de vue et peu d’expériences/ressources partagées qui te donnent l’impression de ne pas être seul.e dans tout ça. C’est donc à ce moment qu’AlterHéros arrive pour te montrer que tu n’es pas seul.e !

 

Alors, parlons des parents. La réaction de tes parents est nulle. Je ne dis pas cela pour les critiquer, mais quand on pense aux parents dans le contexte nord-américain, iels sont censé.e.s être là pour leurs enfants, les soutenir et les élever même lorsque leurs enfants font quelque chose qu’ils n’approuvent pas. Mais ce n’est pas la réalité pour beaucoup de familles asiatiques. C’est compliqué parce qu’on nous apprend dès notre plus jeune âge à toujours honorer et respecter nos parents, quoi qu’iels fassent ou nous disent, au point que nous nous sentons coupables si nous faisons quoi que ce soit qui leur déplaise. Mais ce qu’iels ont dit et ce qu’iels te demandent de faire est blessant. Je pourrais parler encore et encore des complexités des parents asiatiques (en particulier des parents immigré.e.s), mais en fin de compte, lorsqu’iels sont confronté.e.s à quelque chose qu’iels ne comprennent pas, iels ont tendance à revenir à ce qui leur est familier. Dans ce cas, pour ta mère, c’est penser qu’être queer est un choix, que c’est déviant ou que tu as subi un traumatisme ou une expérience négative. Pour ton père, sa réaction est de faire tout ce qu’il peut pour t’empêcher d’être qui tu es, avec des menaces et des ultimatums. Il t’isole et veut te couper complètement d’une communauté qui pourrait être une source de soutien pour toi. Tes parents essaient de « gérer » ton genre et ta sexualité d’une manière qu’iels considèrent comme un problème et cela n’est tout simplement pas acceptable.

 

Lorsqu’il s’agit de la dysphorie de genre que tu navigues, il est complètement compréhensible que tu aies l’impression qu’elle te détruit. Tu ne disposes pas d’un environnement sécuritaire pour pouvoir expérimenter ton genre, pour essayer de t’éloigner du sexe que l’on t’a attribué à la naissance. Tu es quotidiennement mégenré.e, tout en ressentant un inconfort et un malaise avec ton propre corps. La dysphorie de genre est une chose complexe et les gens ont souvent besoin d’une aide extérieure pour pouvoir surmonter ces sentiments, qu’il s’agisse d’un.e professionnel.le ou d’une personne de confiance qui en a déjà fait l’expérience. Il semble cependant que tu ne disposes pas de cette source de soutien et que ta famille te décourage de chercher ce type d’aide extérieure.

 

Il semble que tu aies atteint un point dans ta vie où tu dois prendre certaines décisions, sinon il est possible que tu demeures coincé.e dans un environnement où tu seras réprimé.e et complètement malheureux.se parce que tu ne peux pas être tout simplement toi-même. D’après ce que tu m’as écrit, vivre chez tes parents est insupportablement oppressant, mais s’enfuir n’est pas non plus une option en raison des conséquences familiales et culturelles… Qu’en penses-tu? Je ne peux pas te dire quoi faire, mais ce que je peux dire, c’est que pour beaucoup de gens qui luttent contre l’acceptation de leur famille et de leur identité sexuelle/de genre, le fait d’avoir une certaine distance physique avec leurs parents peut faire toute la différence, y compris pour moi! Je sais qu’il peut être très difficile, avec la pression familiale et culturelle, de faire quelque chose qui pourrait décevoir tes parents ainsi que la communauté chinoise, mais il est important de se rappeler que tu es ta propre personne qui mérite de pouvoir vivre la vie qui te rendra heureux.se.

 

Pour moi, j’ai utilisé l’excuse d’étudier dans une université d’une autre ville pour justifier la nécessité de déménager de chez mes parents. La poursuite d’un diplôme ou même d’un bon emploi est souvent considérée comme acceptable pour de nombreux parents asiatiques, c’est donc ce que j’ai décidé de faire. Une fois que tu ne vivras plus dans le même ménage, tu pourras expérimenter beaucoup plus de liberté pour faire ce que tu veux, essayer ce que tu veux et surtout, ne partager que ce que tu veux avec eux. Cette option ne convient pas à tout le monde, mais il est peut-être temps d’envisager des stratégies réelles et concrètes plutôt que le soulagement temporaire que pourrait apporter une fugue. Est-ce que vivre dans une autre ville t’attire? Serais-tu en mesure d’établir un budget et d’économiser suffisamment grâce à un emploi pour trouver un endroit où vivre seul.e ou avec des colocataires? Aller à l’université pourrait être une option et il existe souvent des aides financières et des bourses qui peuvent t’aider à en minimiser le coût. Le réseau des Universités du Québec a généralement des frais de scolarité beaucoup plus bas qu’ailleurs! Peut-être pourrais-tu commencer à postuler pour des emplois qui t’obligeraient à déménager?

 

Tu as dit dans ton message que tu es trop faible pour faire un changement dans ta vie, mais je ne pense pas que ce soit vrai. En tant que personne, tu n’es pas faible, mais tu pourrais te sentir faible à cause de la situation précise dans laquelle tu es. Qui ne le serait pas? C’est normal de se sentir ainsi à l’occasion, mais quand tu commences à te sentir désespéré.e, c’est un signe qui peut indiquer qu’un changement doit se produire, sinon tu risques de rester bloqué.e dans ces sentiments. Je pense que ce qui pourrait t’aider à retrouver un peu d’espoir, c’est de commencer à élaborer un plan qui t’aidera réellement à te débarrasser d’une grande partie de la toxicité dans laquelle tu gravites. Au lieu de le présenter comme une fuite, quelque chose que ta famille et ta culture pourraient percevoir comme honteux, pourquoi ne pas plutôt essayer de le considérer comme une étape dans ton développement personnel en tant que personne indépendante. Avoir un véritable plan de vie sera probablement beaucoup plus acceptable pour tes parents et ta communauté, et le centrer sur ce plan plutôt que sur le besoin de s’échapper peut vraiment te soulager d’une partie de la pression. Pourquoi ne pas commencer par de petites étapes réalistes qui te semblent gérables et réalisables? Tu peux réfléchir à ce que tu veux faire de ta vie dans un futur proche et commencer à chercher ce qu’il te faudrait faire pour y parvenir… Et commencer à économiser pour réaliser ces futurs projets! Même si tu vas à l’encontre de la volonté de ton père, je te suggère de continuer d’essayer de contacter, ne serait-ce qu’en ligne, les ressources LGBTQ+ (comme AlterHéros!) qui peuvent t’aider dans ce processus. Il pourrait être judicieux également de réfléchir à la manière de compromettre ou naviguer certains aspects de ta vie afin de pouvoir vivre plus librement et plus ouvertement sans devoir nécessairement couper complètement les ponts avec tes parents et ta communauté. Cela demandera du temps, de la réflexion et du travail de ta part, mais c’est un investissement envers toi-même qui en vaut tellement la peine!

 

Il y a tellement de choses à découvrir et de communautés qui t’aiment et t’accepteront pour ce que tu es, mais cela signifie que tu devras leur tendre la main et établir des liens avec elles. Ta relation avec tes parents sera probablement difficile pendant un certain temps, surtout s’iels ne peuvent pas accepter que leur enfant soit genderqueer et bisexuel.le. Mais c’est quelque chose qu’iels doivent accepter eux-mêmes et c’est à toi de choisir le temps et l’énergie que tu veux consacrer à les aider à le faire. Il est important de savoir qu’il est possible qu’iels ne changent jamais… et même si c’est chiant, j’aimerais que tu te souviennes que cela ne repose pas sur toi. C’est le résultat de leur histoire personnelle et de leur éducation qui se heurtent à la culture dans laquelle vous vivez actuellement. C’est quelque chose que beaucoup de jeunes Asiatiques queer ont dû accepter, alors je te suggère de te préparer émotionnellement à cette réalité. Il est normal, et en fait tellement sain, d’avoir des limites avec ses parents, car cela t’aidera à décider quelles parties de ta vie tu peux et veux partager avec eux.

 

Je sais que cette réponse a été très longue, mais j’espère qu’elle a pu t’aider à te sentir un peu moins seul.e et peut-être un peu plus optimiste quant à ce que ton avenir peut ressembler. Ce sera un travail difficile, certes, mais les résultats seront très positifs! Nous te laissons ci-dessous quelques ressources qui pourraient t’être utiles ou utiles dans ton parcours.

  • Interligne : Il est possible d’appeler, de texter ou de clavarder avec un.e intervenant.e bénévole à Interligne à n’importe quel moment de la journée pour n’importe quel sujet lié à la diversité sexuelle ou la pluralité des genres.
  • Il semblerait qu’il y ait le groupe Queer & Trans Asiatiques de Montreal qui existe et qui est possible de prendre contact avec avec le courriel suivant : queertransasiatiquedemontreal@gmail.com . Le groupe, entièrement bénévole, se nomme Rainbow Noodles! <3
  • Project 10 / questions@p10.qc.ca (basé à Montréal, Projet 10 organisent aussi des activités hebdomadaires virtuelles pour les jeunes 2SLGBTQIA+ de 14 à 25 ans). L’organisme a également un programme te permettant d’accéder à bas prix à des accessoires d’affirmation de genre, si c’est quelque chose qui pourrait t’intéresser.
  • Le JAG (actif en Montérégie! Des groupes de soutien pour personnes trans sont organisés virtuellement de façon régulière)
  • Divers-Gens (aussi actif en Montérégie! Un organisme spécialisé pour les jeunes LGBTQ+)
  • Aussi possible de consulter cette ancienne réponse si c’est quelque chose qui t’intéresse : Comment rencontrer d’autres jeunes LGBTQ au Québec?
  • Cet article aborde différentes astuces pour organiser un déménagement hors de chez nos parents. Certains groupes Facebook se spécialisent dans l’offre et la recherche d’appartements ou de colocations. Celui que j’aimerais proposer est uniquement géré par et pour les personnes de nos communautés LGBTQ+ montréalaises : Chez Queer Montréal. Sinon, des sites comme Kijiji, LesPAC, Craiglist peuvent guider des recherches de logement pour Montréal.
  • Advenant que ta famille se pose des questions ou aimerait rencontrer d’autres parents d’enfants trans ou genderqueer, je te laisse un organisme québécois ici spécialement conçu pour les parents : Jeunes identités créatives
  • Le site (en anglais) Asian Pride Project regroupe les expériences de plein de personnes asiatiques LGBTQ+ ainsi que de leur famille.

Note que tu es plus que bienvenu pour nous écrire de nouveau si tu as des questions complémentaires, pour nous donner de tes nouvelles ou simplement si tu as envie de jaser!

Bonne chance cher.e camarade asiatique! N’oublie pas que tu as notre soutien!

 

Kay Wo (she/they/he • elle/ille/il)

Pour AlterHéros

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