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1 février 2021

Être lesbienne ne me dérangerait pas, mais le problème c'est la société dans laquelle on vit...

Je suis sûrement lesbienne mais je n’arrive pas à l’accepter et en parler.

Bonjour, je suis une fille, j’ai 15 ans, il y a plus d’un an j’ai vu un couple de lesbienne dans une série, c’est comme ça que j’ai commencée à me poser des questions sur mon orientation sexuelle . C’était la première fois que je voyais un couple de lesbiennes dans une série, j’étais vraiment excitée à l’idée qu’elles s’embrassent, qu’elles soient ensemble et voir l’évolution de leur couple, j’avais jamais ressentie ça en voyant un couple hétéro. Suite à ça, j’ai commencée à me poser cette fameuse question : «est ce que je suis lesbienne ?» puis il y a eu cette période où j’avais «peur d’être lesbienne», j’y pensais tout le temps mais quand j’ai repris les cours, j’ai essayée de mettre tout ça de côté et ne plus y penser. Puis il y a eu le confinement, pendant cette période je me suis mis à regarder pleins de films/séries seulement pour un couple de lesbienne, j’ai fais des recherches sur la communauté lgbt ou bien encore à faire des tests «est ce que je suis lesbienne ?» sur google. Pendant cette période, la chose la plus bizarre était que être lesbienne ne me déranger absolument pas, c’était même comme si j’étais contente de me dire que je l’étais.

Puis il y a eu ma rentrée au lycée, c’est là où je me suis réellement rendue compte que je n’avais plus d’attirance pour les garçons, à part peut être des petites pensées du genre «lui il est plutôt beau, je suis sûr que pleins de filles doivent être amoureuse de lui» mais ça s’arrête là. Je me sentais de plus en plus attirée par les filles, je regardais principalement les filles au lycée et dans la rue, m’imaginer embrasser une fille ne me dérangeait pas, je m’imaginais même vivre avec une fille plus tard.
Maintenant, en plus de tout ça, il y a une fille dans ma classe que j’aime bien mais je ne sais si c’est de l’amour. Je l’a trouve vraiment belle, j’adore sa personnalité et sa façon d’être, j’aimerais bien l’embrasser, j’ai envie de lui parler mais en même je sais pas quoi lui dire donc j’évites de me retrouver seule avec elle mais après quand je suis proche d’elle j’ai pas de papillons ou quoi dans le ventre et je ne pense pas à elle tout le temps, je reste facilement 2 semaines sans qu’elle me manque.

Si je suis ici, c’est plutôt pour parler de ce que je vis en ce moment à cause de toutes ces questions sur mon orientation sexuelle. En soit être lesbienne ne me dérangerait pas mais le problème c’est la société dans laquelle on vit alors par moment je me dis que c’est peut-être juste mon imagination et que je suis hétéro, c’est comme si j’avais honte d’être comme ça et maintenant j’ai encore moins confiance en moi, je me sens mal dans ma peau, mes notes baissent, je stresse en permanence et j’arrive même pas à trouver un côté positif à ma vie. De plus, ma belle mère est homophobe, l’autre jour elle m’a dit : «si j’avais une fille lesbienne, je l’a frapperais tous les jours jusqu’à ce qu’elle devienne hétéro» , le pire c’est que quand elle m’a dit ça je n’ai rien dis comme si j’étais d’accord avec elle alors que j’avais juste peur. J’ai vraiment envie d’en parler à quelqu’un de mon entourage parce que je n’arrive plus à supporter mes amies me dire : » Alors il y a un garçon de ta classe qui te plaît ?» , je ne suis pas sûr de mon orientation sexuelle mais quand on me pose ce genre de questions ça me fait du mal et quand les gens de ma classe parlent de garçons je me sens mal à l’aise. J’ai essayée d’en parler à plusieurs reprises à mes amies filles mais je n’arrive pas car j’ai trop peur qu’elles me voient différemment ou qu’elles disent des phrases du genre : «ne tombe pas amoureuse de moi» ou bien qu’elles soient gênées quand je suis avec eux. J’ai un ami qui est gay, je me suis donc dit que c’était une bonne idée de lui en parler à lui en premier car il va surement avoir une réaction positive mais je n’arrive quand même pas à lui dire, c’est plus fort que moi quand je commence à écrire un message pour lui dire, je l’efface automatiquement après car je n’arrive pas à lui envoyer. C’est comme si tant que je parle à personne c’est pas vraiment réel, d’un côté je veux en parler mais j’ai peur du regards des autres et de l’autre j’ai pas envie d’en parler parce que si j’en parler je serais ce que les autres pensent de ça. En plus, mes parents voient que je ne vais pas bien alors ils me demandent ce qui ne va pas et je leur réponds toujours la même chose : «c’est rien, c’est juste le lycée avec les devoirs c’est trop dur». J’aimerais tellement leur dire ce qui ne va pas mais je ne peux pas et donc ils ne me prennent pas au sérieux et me disent : «Réveille toi !» ou bien «faut que tu changes là ça va pas du tout tes notes». Je sais vraiment plus quoi faire, j’ai vraiment besoin d’aide parce à des moments je me dis que je préfères disparaître que vivre comme ça. Est ce que je suis vraiment lesbienne ou je m’imagine des choses ? Est ce que j’en parle ? Quelle va être la réaction des autres ? Et si tout le monde me rejete ? Est ce que j’aime vraiment la fille de ma classe ?

Merci de m’avoir lue en tout cas.

Kinvea

Marion Brodeur-Laperrière
Salut Kinvea!
Merci de prendre le temps de nous écrire. C’est toujours une bonne idée d’aller chercher du soutien quand on se pose ce genre de question et tu es au bon endroit pour en recevoir! Si je résume ton message, il y a un bon moment maintenant que tu t’interroges sur ton orientation sexuelle et tu sembles en être arrivée à te considérer lesbienne. Tu dis toutefois que ce n’est pas tant l’idée d’être lesbienne en soi qui te crée de l’anxiété, mais plutôt l’attitude de la société et de ton entourage par rapport à l’homosexualité et la peur d’être rejetée si tu en parles. De plus, garder tout ça à l’intérieur te pèse et tu en ressens les impacts négatifs sur ta confiance en toi et ta performance scolaire.
Pour commencer, je veux te dire que les questionnements que tu vis sont tout à fait normaux et légitimes. C’est souvent au début de l’adolescence que l’on commence à s’interroger à propos de l’amour et de la sexualité, ce qui comprend l’orientation sexuelle. De ce que tu nous racontes, tu es déjà passée par plusieurs phases d’exploration (trouver des informations sur la communauté LGBTQ+, réfléchir à tes sentiments et tes attirances, remarquer que tu regardes davantage les filles, te projeter dans le futur, etc.). C’est super! Apprendre à se connaître et s’interroger sur son orientation sexuelle, ce n’est pas nécessairement facile, mais tu sembles déjà avoir fait un bon bout de chemin. Et même si tu as encore parfois des doutes, ce n’est pas grave! La sexualité, c’est fluide, ce qui veut dire que ça peut varier dans le temps. L’important, c’est que tu sentes que ça te semble juste dans le moment présent. Peut-être que, dans le futur, tu sortiras avec une fille et que tu réaliseras que, finalement, tu n’es pas vraiment attirée par elles. Ou peut-être que ça te confirmera ce que tu ressens en ce moment!
D’ailleurs, il y a une fille dans ta classe qui a l’air de te plaire, même si tu dis ne pas ressentir de «papillons» face à elle ou qu’elle soit toujours dans tes pensées. C’est vrai que c’est souvent comme ça que l’on décrit l’amour, mais c’est aussi un sentiment qui se développe. Parfois c’est le coup de foudre et parfois, l’amour peut naître d’une belle amitié! Évidemment, je ne peux pas dire à ta place si tu es amoureuse de cette fille ou non, mais ce que je peux te dire, c’est que tu ne perds rien à l’aborder. Sans même que ce soit avec une visée amoureuse, pourquoi ne pas te rapprocher d’une personne que tu trouves sympathique et intéressante! Dans tous les cas, tu aurais gagné une amie. Pour amorcer une conversation, tu pourrais par exemple lui faire un compliment, que ce soit sur un accessoire qu’elle porte ou une information intéressante qu’elle a partagé lors d’une présentation orale. Si vous vous suivez sur les réseaux sociaux, tu pourrais aussi lui envoyer des memes rigolos. En ayant une interaction positive et en misant sur des points communs, il est généralement plus facile de créer des liens.
Ceci dit, ce qui te cause de l’anxiété n’est pas tant ta relation avec cette camarade de classe et plutôt ta relation avec ton entourage. Tu tiens à ta famille et à tes ami.es, alors il est normal d’avoir peur que ces liens soient affectés si tu leur parles de ton orientation sexuelle. Tu dis entre autres que ta belle-mère a eu des propos homophobes très violents en ta présence. Sache que l’adage «qui ne dit mot consent» est absolument faux. C’est tout à fait légitime d’avoir gardé le silence parce que tu avais peur et je suis désolée que tu aies fait face à ce genre de commentaire. Malheureusement, l’homophobie existe encore. La haine est généralement une réaction face à l’inconnu ou à l’incompréhension d’une réalité différente. À long terme et à grande échelle, l’éducation est une bonne piste pour contrer l’homophobie. Par contre, je ne te conseille pas de te mettre en danger en confrontant une personne qui a des propos violents. Tu n’as pas à avoir honte ou à cacher qui tu es, mais ta sécurité est primordiale, alors tu peux évaluer l’ouverture des gens avant de leur parler de ton orientation sexuelle. Tu peux tâter le terrain en parlant d’un article que tu as lu ou en parlant d’une série que tu as écoutée, par exemple. Ce sera à toi de juger si tu es à l’aise de leur parler de toi ou si tu préfères ne pas leur en parler.  Bien sûr, rien ne presse et tu n’as pas à prendre ce genre de décision sur un coup de tête. (J’ouvre ici une parenthèse pour te dire que si tu te sens en danger dans ton environnement (à la maison ou à l’école), n’hésite pas à en parler à un.e adulte de confiance comme un parent ou le/la psy de l’école. S’il s’agit d’un danger immédiat, je t’encourage évidemment à appeler les secours.)
Dans ton message, tu nommes déjà une idée que j’allais te nommer : trouver une personne de confiance à qui en parler en premier. Dans ton cas, tu dis avoir un ami qui est gai, alors il s’agit effectivement d’une bonne personne à te confier parce qu’il ne risque pas d’avoir de réaction négative. C’est normal que ce soit stressant quand même. Si tu n’arrives pas à lui écrire un message de coming out, tu peux l’inviter à passer du temps ensemble, dans un lieu où tu te sens à l’aise, plutôt que d’en parler par écrit. Tu n’es pas non plus obligée de faire ton coming out d’entrée de jeu. Tu peux commencer par simplement ouvrir le sujet avec lui, par exemple en lui demandant comment il a su qu’il était gay, si ou comment il en a parlé à ses parents ou à ses ami.es. Il est possible qu’il comprenne pourquoi tu abordes le sujet avec lui et peut-être qu’il pourra te donner des trucs! Une fois la glace brisée, il devient souvent plus facile d’en parler. Ensuite, si tu veux en parler à d’autres ami.es, ou même à ta famille, tu pourrais lui demander d’être présent. Ça peut être rassurant d’avoir un.e allié.e dans ces moments-là. Pour tes parents, tu peux aussi choisir d’en parler à une personne de ta famille avec qui tu te sens plus proche, comme une sœur ou un cousin par exemple. Si tu préfères ne pas en parler en face à face, il y a aussi d’autres façons de le faire, comme en écrivant une lettre par exemple.
Toutefois, si tu souhaites avoir une discussion en face à face, je te conseille de porter attention au moment que tu choisis pour en parler afin de te sentir la plus à l’aise possible. Tu veux t’assurer d’avoir l’attention de la ou les personnes à qui tu t’adresses, d’être dans un endroit calme, de ne pas être pressée dans le temps et, au besoin, d’avoir la possibilité de quitter les lieux. En posant un cadre qui te permet d’avoir une discussion et de répondre aux questions qu’on te pose, ça peut rendre les choses un peu plus faciles, te permettre de dire tout ce que tu as à dire et de mettre au clair le fait que ça ne change rien à qui tu es ou à votre relation. Face à tes amies, tu pourrais par exemple tout de suite aborder le fait que ce n’est pas parce que tu leur dis que tu aimes les filles que ça veut dire que tu es amoureuse de toutes les filles! Que tu leur en parles parce qu’elles sont tes amies et que tu as besoin de leur soutien en tant que telles.
Enfin, je veux aborder le fait qu’il y a des moments où tu dis souhaiter disparaître et que tu as parfois du mal à trouver du positif dans ta vie. Bien qu’il soit normal de ressentir toutes sortes d’émotions, que ce soit de la honte ou de la peur, si tu te sens en détresse ou que tu as des pensées sombres, je t’encourage à contacter une ressource d’aide. En cliquant sur ce lien, tu trouveras les numéros de plusieurs ressources d’urgence ainsi que leur site internet. Il y a entre autres Fil santé jeunes qui a également un service de clavardage si tu es plus à l’aise. Quoi qu’il en soit, ne reste pas seule avec ta détresse : va chercher de l’aide.
Pour résumer, le fait que tu aies une si belle introspection t’as déjà amenée à mieux te connaître et à réfléchir au monde qui t’entoure. Les remises en question et les doutes sont normaux, mais ne t’empêche pas d’aller vers une personne qui t’intéresse pour autant! Que ce soit de l’amour ou de l’amitié, je suis certaine qu’il en ressortira quelque chose de positif.  Pour ce qui est de l’entourage, il est vrai qu’il peut être stressant de leur parler de son orientation sexuelle et c​’est pourquoi je t’encourage à suivre ton idée d’en parler d’abord avec une personne en qui tu as confiance et de qui tu ne crains pas le jugement. Avoir un.e allié.e est précieux! Évalue à qui tu souhaites en parler, quand et comment le faire. C’est ton choix, alors sens-toi à l’aise de ne pas le faire ou de le faire de la manière qui te convient le mieux (en personne, par lettre, etc.). L’important, c’est que tu te sentes en sécurité et que tu y ailles à ton rythme. Si tu prends le temps de discuter avec tes proches, de répondre à leurs questions et de leur expliquer ce que ça implique pour toi et pour votre relation, ça peut leur permettre de mieux comprendre ce que tu vis et d’avoir moins peur face à une situation qu’ils et elles ne comprennent peut-être pas. Dans tous les cas, si tu sens que tu vis de la détresse ou que tu as des idées noires, sache qu’il y a des ressources qui existent et qui sont disponibles 24/7. Tu n’es pas seule et il y a des gens qui tiennent à toi.
J’espère avoir pu t’aider un peu avec mon gros pavé! N’hésite surtout pas à nous réécrire si tu en ressens le besoin : il nous fera toujours plaisir de te répondre.
Prends soin de toi,
Marion

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