Des fois je me genre garçon et j'pense que je n'assume pas par peur du regard des autres...

Bonjour ,
Je me pose beaucoup de question sur mon genre quand j’étais petite je disais souvent à ma mère que j’étais un garçon ou « je veux ressembler à un garçon » quand je jouais avec des amis en maternelle/primaire comme le jeu papa et maman je faisais toujours un rôle garçon (le frère, le père etc)
Et en ce moment j’ai du mal defois je me sens garçon et je me dis tu peux pas t’es une fille et j’essaye de pas y penser mais ça prend le dessus je veux me faire une coupe courte sauf que ma mère ne veut pas enfin en me disant ça risque de pas faire beau sur toi alors que j’ai essayer avec un bonnet et tt mes amis me dise que ça me va hyper bien et defois je me genre garçon et j’pense que je n’assume pas tout simplement par peur du regard des autres je sais vraiment pas je suis bloqué

Crackito

Séré

Bonjour Crackito !

Merci beaucoup d’accorder ta confiance à AlterHéros en nous posant cette question. 

Je veux d’abord te dire à quel point je suis content que tu aies eu le courage de nous écrire. Ce n’est pas toujours facile de dévoiler qu’on se questionne sur notre identité de genre, mais tu as réussi à le faire ! C’est déjà un très grand pas en avant.

 

Tu dis donc que tu as déjà exprimé à ta mère que tu étais un garçon quand tu étais plus jeune. Ces questionnements ne semblent jamais être complètement partis et en ce moment tu te demandes si tu es un garçon, car tu te sens ainsi. Tu aimerais faire quelques changements, comme de te couper les cheveux ou te genrer au masculin, mais tu as peur de la réaction de ta mère et du regard des autres, c’est bien ça ?

 

La première chose à dire, c’est que tu es la seule personne à pouvoir déterminer quelle est ton identité de genre. Ni tes parents, ni le gouvernement, ni tes ami.e.s peuvent mieux savoir que toi si tu es un garçon, une fille ou une personne non-binaire. De plus, comme je le disais dans une réponse précédente : 

« Il n’y a aucune preuve qu’il soit possible pour quelqu’un de changer son identité de genre ou son orientation sexuelle pour devenir cisgenre ou hétérosexuel. C’est d’ailleurs pourquoi les thérapies de conversions, qui prétendent pouvoir guérir les personnes LGBTQ+, sont interdites dans plusieurs pays.

Alors, oui, tu peux enterrer les envies que tu as d’être reconnu comme un garçon ou de transitionner, mais il n’y a aucune garantie que cela fera en sorte que tu te sentiras plus à l’aise avec le fait d’être perçu comme fille. […] Je crois que beaucoup de personnes trans, quand elles font face aux difficultés qui peuvent venir avec leur coming-out ou leur début de transition, se disent qu’elles aimeraient bien pouvoir choisir la simplicité de devenir cisgenre et d’être à l’aise avec leur genre assigné. Je sais que, pour ma part, j’ai beaucoup pleuré en me demandant pourquoi je ne pouvais pas me forcer à être une fille comme les autres et aussi pourquoi je ne pouvais pas au minimum me forcer à être un garçon trans au lieu d’une personne non-binaire. 

Cela est dû à ce qu’on appelle la transphobie internalisée. Ça veut dire qu’on entend les messages transphobes de la société depuis qu’on est tout jeune, et qu’on les a intégrés dans notre façon de penser. Ces messages disent qu’être trans est quelque chose qui est ridicule et qu’on doit éviter à tout prix. Ils disent qu’être cisgenre est désirable et mieux, qu’une “vraie” femme a une vulve et un “vrai” homme a un pénis. Ils disent que les personnes non-binaires n’existent pas vraiment, et que celles qui croient l’être se font des illusions. À force de voir ces messages dans les médias et à l’école, de la part de nos familles et de nos ami.e.s, on vient à croire qu’ils sont la vérité. Mais ils sont faux. 

Les personnes trans sont légitimes. Les hommes sont des hommes, peu importe leurs organes génitaux, et de même pour les femmes et les personnes non-binaires. Les personnes non-binaires existent depuis toujours et on a des preuves de leur existence dans de nombreuses sociétés à travers le monde et les époques. La diversité humaine doit être célébrée, et la diversité d’identité et d’expression de genre en fait partie. 

Je dis souvent qu’on ne sait pas pourquoi certaines personnes sont trans, et que la raison n’est pas importante, car être trans n’est pas mieux qu’être cis. Mais au fond, on est trans parce qu’on nous a assigné le mauvais genre à la naissance, alors si on voulait qu’il n’y ait plus de personnes trans, il faudrait simplement cesser d’assigner des genres à la naissance et laisser les humains explorer et exprimer leur genre comme iels le souhaitent. »

 

Qu’est-ce que tu en dis ? Crois-tu qu’il serait mieux pour toi de commencer à explorer ce que ça veut dire, pour toi, de te sentir comme un garçon, au lieu d’essayer de ne pas y penser ?

Une autre chose qui est importante à dire, c’est que ton corps t’appartient. Tu n’as pas à faire aucune démarche qui te rend mal à l’aise et tu as l’autonomie de décider lesquelles tu veux entreprendre. Tu as indiqué dans le formulaire de question que tu as entre 14 et 18 ans. À cet âge, tu as amplement le droit de décider quelle coupe de cheveux tu aimerais avoir, peu importe ce qu’en pense ta mère. Pour beaucoup de personnes trans et non-binaires, la coupe de cheveux est une des façons les plus faciles d’explorer une nouvelle expression de genre. Je t’encourage donc à suivre ton instinct, d’autant plus que les cheveux, ça repousse ! Il n’y a donc aucune possibilité de commettre une erreur irréparable en essayant de couper ses cheveux. 

Je sais qu’il peut être difficile de contredire ses parents et d’essayer de nouvelles choses, mais comme je l’ai dit au début, ta mère ne peut pas mieux connaître que toi ce qui t’aiderait à te sentir mieux et de vivre une meilleure congruence entre ton apparence et comment tu te sens à l’intérieur de toi. 

Bien sûr, ta sécurité demeure la priorité. Si tu penses que ta mère pourrait avoir des comportements abusifs ou dangereux envers toi si tu essaies une nouvelle coupe, c’est une autre question. Mais rappelle-toi toujours que ce n’est pas le fait de transitionner ou de faire des changements qui fait qu’une personne est trans. Si tu te sens comme un garçon, tu es un garçon et personne ne peut t’enlever ça, que tu aies les cheveux courts ou longs. Comme je le disais dans une réponse précédente, « même si tu restes dans le placard parce que tu as peur d’aborder ce sujet avec tes parents, ça ne fait pas de toi quelqu’un qui est “ moins trans ” ou “ moins non-binaire ” que si tu avais la possibilité de transitionner. Par ailleurs, il n’est jamais trop tard pour transitionner. Si tu ne peux pas le faire maintenant dans ton milieu, cela ne veut pas dire que tu ne pourras jamais transitionner, ni que tu seras trop âgé.e pour le faire lorsque tu t’en sortiras. »

 

Par ailleurs, tes ami.e.s semblent te supporter dans tes démarches, non ? Est-ce avec eux que tu te genres au masculin ? Si oui, c’est vraiment chouette que tu aies un réseau à l’extérieur de la maison qui te permet d’explorer ce que ça veut dire, d’être toi-même. Tu sais, tu n’es pas obligé.e de parler de tes questionnements avec tout le monde en même temps. Personnellement, j’ai dit à mes ami.e.s que je n’étais pas une fille au moins deux ans avant d’en parler à mes parents ou à des personnes en dehors de mon cercle rapproché. Faire cela dans cet ordre m’a aidé de plusieurs façons.

Premièrement, la réaction de mes ami.e.s a été très positive, ce qui m’a aidé à gagner confiance en moi. Puisque mes parents ont eu une réaction beaucoup moins chaleureuse (mais au final quand même positive !), ça m’aurait beaucoup freiné dans mon exploration si je leur avais parlé dès le début. Mais heureusement, je me sentais en sécurité avec mes ami.e.s, donc j’ai pu essayer plusieurs choses avec eux et me faire une tête sur ce que je voulais réellement. Progressivement, j’ai apporté des changements à mon apparence en ayant moins peur du regard des autres, car je savais que j’avais des ami.e.s pour me défendre et m’appuyer au besoin.

Deuxièmement, ce temps d’exploration m’a aidé à mieux comprendre et parler de mon identité, ce qui a beaucoup facilité mon coming-out auprès de mes parents, car j’avais désormais les mots pour exprimer clairement ce que je ressentais. J’ai donc pu répondre aux questions de mes parents beaucoup plus facilement que si je leur avais parlé de mes questionnements au tout début. Cela a fait qu’ils m’ont pris plus au sérieux, je crois, et ça a facilité nos discussions. 

 

J’espère que ma réponse t’aide à mieux envisager la suite. Si tu as besoin de parler davantage, n’hésite pas à nous réécrire ou bien à appeler la ligne d’écoute anonyme de l’Association nationale de lutte contre la lesbophobie, la gayphobie, la biphobie et la transphobie.

Je te souhaite bonne chance dans ton exploration,

Séré, intervenant pour AlterHéros

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