Je ne sais pas si je veux faire une transition médicale ou non. Que faire?
Bonjour, bonsoir,
En ce moment la question de mon genre me pose de plus en plus problème. J’ai 19ans et cela fait 3 ans que je remet en question mon genre. Cela est une quête infernale je n’arrive pas à me mettre d’accord avec moi-même et avec ce que je veux.
Jai commencé une transition social il y a peu, tous mes amis et professeurs utilisent « il » a mon égard et quand cela est arrivé j’étais vraiment heureux. Je porte un binder quand cela est nécessaire car je ne supporte pas que ma poitrine soit visible et jai du mal avec le reflet de mon corps dans le miroir. Je ne suis pas complexé par mon corps pour autant ! Habillé je fais très masculin mais pas assez à mon goût.
Le problème cest que certains jours je suis sûre de vouloir entamer une transition physique et faire mon coming out à mes parents et d’autres jours je suis persuadé que cela n’est qu’une phase, une lubie et que cela va passer.
Ce que je suis persuadé cest que je n’aime pas mon corps dans lequel je suis aujourd’hui car aux yeux de la société je suis une femme et tous les inconnus que je croise m’identifie comme tel. Et je ne le supporte plus.
J’aimerai entamer une transition pour être plus neutre mais jai peur de regretter, peur d’être une femme au final et de juste avoir fais une fixette. Jai peur d’en parler à ma famille (dont une grande partie ne l’acceptera pas) pour au final faire marche arrière. Jai peur de rejeter la personne que je serai devenu après une transition. Peur d’être rejeté après cette transition. En faite jai peur de me tromper.
Certaines fois m’imaginais en tant qu’homme est formidable , d’autres fois je suis juste paniqué et ce n’est pas ce que je veux devenir.
Je sais que je suis jeune et que j’ai la vie devant moi pour décider mais je ne supporte plus cette situation elle est un poids dans ma vie de tous les jours. Quand je rentre chez mes parents je dois revenir au pronom « elle » et toutes les bases que je pensais solides s’écroulent et tous mes questionnements reviennent.
Désolé de ce long message… j’aimerai juste avoir un avis extérieur sur ce que je pourrais faire dans ma situation.
Merci d’avance.
Yacob
Bonjour Yacob !
Merci de faire confiance à AlterHéros avec tes questionnements sur ton identité de genre. Ce que tu décris dans ton message me rappelle beaucoup ce que j’ai vécu quand j’ai commencé à transitionner. Je me suis rendu compte vers 17 ans que j’étais probablement trans et non-binaires, et les années qui ont suivi ont été assez mouvementées !
D’abord, je suis vraiment content de voir que ton identité est respectée par tes ami.e.s et tes professeurs ! C’est déjà un bon pas de franchi, non ?
Par contre, je comprends que ça peut être beaucoup plus difficile de faire ce coming-out à tes parents qu’à tes ami.e.s et tes professeur.e.s. Pour moi en tout cas, ça a été le cas. Mes parents ont été les derniers à qui j’ai fait mon coming-out, et je suis content d’avoir attendu d’être prêt pour le faire, car je me sentais plus en confiance et j’étais plus à l’aise pour répondre à leurs questions. Tu as tout à fait le droit d’attendre de te sentir dans une bonne position pour faire ce coming-out. Tu ne dois jamais de coming-out à quiconque, ce processus t’appartient entièrement ! Par contre, je comprends qu’il est difficile de rentrer chez tes parents et de te faire appeler « elle » alors que tu t’habitues à te faire appeler « il » à l’école. Un coming-out pourrait te permettre de résoudre cela et de te sentir mieux en présence de tes parents. Je vais citer une réponse que j’ai déjà donnée sur des trucs pour faire son coming-out :
Si tu décides de faire un coming-out en personne, l’idéal est de le faire à un endroit où tu te sens bien et où tu as la possibilité de t’isoler ou de quitter si jamais tu en ressens le besoin. Je te conseille aussi de bien te préparer afin de répondre à leurs questions. Il se pourrait que tes parents ne sachent tout à fait ce qu’être un homme trans veut dire, ou aient des conceptions erronées sur le sujet, alors il faudra que tu sois prêt.e à leur expliquer de quoi il s’agit. Si tu veux, tu peux aller voir certaines de mes anciennes réponses à ce sujet, comme celle-ci afin d’avoir de l’inspiration pour mieux expliquer ce que c’est que d’être trans.
Lors d’un coming-out, il est aussi important de souligner qu’est-ce que cela changera. Par exemple, tu parles d’avoir coupé tes cheveux pour mieux te sentir par rapport à ton identité. Est-ce qu’il y a d’autres changements que tu aimerais faire ? Veux-tu que tes parents utilisent d’autres pronoms (comme il, iel, ol, etc.) pour parler de toi ? Voudrais-tu qu’iels t’aident à acheter de nouveaux vêtements qui permettront d’avoir une expression de genre plus masculine ? C’est une bonne idée de penser à tout cela avant d’en parler à tes parents.
Je t’invite aussi à penser à ce qui ne changera pas. Souvent, lorsqu’on fait un coming-out à nos parents, iels se sentent un peu bousculé.e.s, car iels se sont fait des attentes par rapport à notre genre assigné à la naissance. Ça peut alors être utile d’insister sur le fait que tu restes la même personne que tu as toujours été, que tu restes leur enfant et que tu gardes la même personnalité et les mêmes intérêts, que de faire ce coming-out est en fait une façon de te sentir authentique avec elleux.
J’ai aussi un autre petit conseil qu’on m’avait donné lorsque j’étais beaucoup trop stressé de faire mon coming-out de personne non-binaire à mes parents. J’avais essayé plusieurs fois de leur dire, mais quand j’arrivais en face d’elleux, je n’en étais pas capable ! Quelqu’un m’a alors suggéré de le faire lorsqu’on était côte à côte plutôt qu’en face, par exemple assis sur le canapé du salon ou lors d’une promenade à pied. Ça m’a vraiment aidé à me sentir plus calme et en contrôle de la situation.
Tu peux également faire ton coming-out d’une autre façon, par exemple en écrivant une lettre ou un courriel à tes parents. Ces options sont vraiment super, car elles permettent de leur laisser le temps de décompresser avant d’aborder le sujet avec toi, si tu as peur de leur réaction immédiate. Cela permet aussi d’envoyer de joindre des sources d’information, comme une brochure ou un vidéo ! Par exemple, je te recommande cet article qui s’adresse aux parents d’ados LGBT. J’adore également ce vidéo qui permet de faire à ta place ton coming-out comme homme trans !
Pour ce qui est de la transition médicale, tu dis avoir envie d’entamer des démarches afin d’avoir l’air plus neutre et ainsi ne plus être perçu comme une femme en public, mais d’avoir peur de te tromper.
J’aimerais commencer par dire que tu n’es en aucun cas obligé de vouloir des hormones ou des chirurgies pour être trans. Il y a beaucoup de personnes trans pour qui une transition sociale est bien suffisante et qui n’ont pas besoin de faire de démarches médicales afin de se sentir bien. Si c’est ton cas, c’est tout à fait légitime, et le fait que tu n’es pas certain de vouloir masculiniser ton corps à l’aide d’hormones ou de chirurgies n’a pas à t’empêcher de faire un coming-out à ta famille ou d’entreprendre d’autres démarches de transition sociale. Ton corps t’appartient. Les soins médicaux que tu choisiras d’entreprendre ou non te concernent et tu n’es jamais obligé d’en parler à quiconque si tu n’es pas à l’aise de le faire.
Ceci étant dit, si tu veux masculiniser ton corps à l’aide d’hormones ou de chirurgie, sache qu’il est très normal de douter. Et puis, il faut se rappeler que ce n’est pas une course ! Tu as le droit de prendre ton temps pour te sentir prêt quand tu vas commencer, et tu as aussi le droit de commencer les hormones même si tu n’es pas sûr à 100 %. Ça m’a pris plus de deux ans avant d’envisager sérieusement une transition médicale, même si je savais que je n’étais pas bien avec mon corps comme il était. J’ai douté tout le long de l’attente pour voir un endocrinologue et même une fois que j’ai eu ma prescription de testostérone ! Et même quand j’ai commencé la prise d’hormones, je n’étais pas encore certain, mais j’avais conclu que la seule façon de savoir si ça allait me convenir était de l’essayer. Tout ça pour dire que tu peux tout à fait commencer les démarches maintenant, même si tu as encore des craintes. À tout moment, tu as le droit de changer d’avis ! Moi, après un an sur la testostérone, je trouvais que les changements arrivaient trop rapidement, alors j’ai pris une pause pendant quelques mois. Arrêter de prendre des hormones ou bien prendre une pause n’est pas signe qu’on détransitionne ou qu’on n’est pas réellement trans. Et même dans le cas très très rare où tu te rendrais compte que tu n’es plus bien avec les démarches de transition que tu as entreprises, ça n’invalide en rien ce que tu vis en ce moment.
J’ai remarqué aussi que tu ne nommes pas que tu es un homme dans ton message, et que tu dis que tu veux avoir l’air « neutre ». As-tu déjà entendu parler de la non-binarité ? C’est le fait de ne pas s’identifier à 100 % comme homme ou femme. Penses-tu que ça pourrait correspondre à comment tu te sens ? Si tu es curieux d’en apprendre davantage, je te conseille de lire cette réponse et cette réponse que j’ai écrites précédemment à ce sujet. De plus, je veux préciser qu’être non-binaire ne veut pas du tout dire que c’est moins légitime d’entreprendre une transition médicale. Mais savoir que l’on est non-binaire peut permettre de plus facilement cibler et de comprendre nos besoins en termes de transition médicale. Par exemple, moi-même je suis non-binaire (plus exactement j’ai deux genres : homme et genderqueer) et je prends de la testostérone à une dose plus faible que la moyenne des hommes trans, afin que les changements surviennent plus lentement et, comme mentionné plus tôt, j’ai également pris des pauses afin de stopper certains changements et de garder une apparence neutre.
Pour t’aider dans ce processus, je crois que ce diagramme pourrait t’aider. Il montre les effets attendus de la testostérone ainsi que leur période d’apparition. Les flèches jaunes montrent le début de l’apparition des effets, et les flèches mauves indiquent le moment à partir duquel les effets sont à leur maximum. L’important est de comprendre que certains effets sont irréversibles, c’est le cas par exemple de la mue de la voix et de l’agrandissement du clitoris. Par contre, beaucoup sont réversibles, comme la redistribution des graisses et le gain de masse musculaire et même l’augmentation de la pilosité, puisque le recours à l’épilation demeure toujours possible.
Effet physique | Réversibilité | Début de l’effet |
Acné | Réversible | 1 à 6 mois |
Redistribution des graisses | Réversible/Variable | 3 à 6 mois |
Augmentation de la masse musculaire et de la force | Réversible | 6 à 12 mois |
Augmentation de la pilosité faciale et corporelle | Irréversible | 3 à 6 mois |
Calvitie | Irréversible | Variable |
Arrêt des menstruations | Réversibles | 2 à 6 mois |
Agrandissement du clitoris | Irréversible | 3 à 6 mois |
Atrophie vaginale | Réversible | 3 à 6 mois |
Mue de la voix | Irréversible | 3 à 12 mois |
Malheureusement, puisque AlterHéros est un organisme québécois, je ne suis pas en mesure de t’indiquer comment avoir accès à l’hormonothérapie en France. Je t’invite donc à lire ce guide sur l’hormonothérapie en France et à contacter l’association trans la plus près de chez toi. Tu peux aussi regarder ce guide sur les chirurgies d’affirmation du genre possible pour les personnes assignées fille à la naissance.
J’espère que ma réponse t’aide à y voir plus clair. N’hésite surtout pas à nous réécrire si tu en ressens le besoin.
Je te souhaite bon courage,
Séré, intervenant pour AlterHéros