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12 mars 2006

[Témoignage] Sortir du placard par l'écriture

Bonjour à tous!

Après avoir lu plusieurs témoignages, je me suis finalement décidée à vous faire part de quelques fragments de mon vécu.

Si je remonte le pendule de ma vie, je ne me souviens pas avoir été vraiment attirée par les garçons.
Au primaire, je me tenais avec eux, mais ce sont les filles qui avaient une place sur mon échelle de préférence. À cet âge-là, disons qu’on ne pense pas vraiment à l’amour, celui avec un grand A.
Mais il y a toujours des petits couples de jeunes, tous fiers de se sentir comme les adultes.

Si on me demande si j’ai déjà eu un chum, je réponds que oui. En 5e ou 6e année du primaire et ça duré 2 mois tout au plus. On s’est donné 2 ou 3 becs sur la joue, on s’est tenu la main et la seule fois qu’on est allés au cinéma, un de nos amis est venu et s’est assis entre nous deux.
C’est pour vous dire à quel point c’était du sérieux entre lui et moi!

Tout au long du secondaire, j’avoue ne pas vraiment avoir songé à mon orientation. Je n’avais que faire de penser à l’amour, contrairement à plusieurs de mes amies.
Je crois que la première fois que j’ai réalisé que les filles m’attiraient, c’est en secondaire 5. Je me disais: » Ok, peut-être que tu es homosexuelle. Mais attends au cégep. Si tu dois sortir d’un quelconque placard, ce sera là-bas. » Mais une fois au cégep, ça ne s’est pas passé comme je l’avais prévu.
D’abord parce que je ne m’étais pas encore acceptée, ni même entièrement avouée. Alors donc, je souriais et disais à ceux qui voulais bien l’entendre que pour moi, c’était les études avant l’amour. Au fond de moi, cette petite phrase qui avait pris naissance au secondaire devenait drôlement dérangeante. Mais je n’étais pas pour sortir avant de m’accepter.

Dire que j’ai dû traverser l’Atlantique pour savoir qui j’étais réellement! C’est en Europe que j’ai rencontré mon premier vrai amour. Je suis allée travailler en France et elle a été ma compagne de travail pendant quelque temps. Assez longtemps pour que je tombe amoureuse, mais vraiment amoureuse! Elle n’était que d’un an mon aînée.
Dans mon journal, c’est en pensant à elle que j’ai écrit le plus de pages. Il s’écoula, à un moment donné, plusieurs jours avant que je ne la voie. Je vous ouvre mon journal et vous laisse y entrevoir quelques passages que j’ai écrits à ce moment-là.

 » Elle n’est pas venue me voir comme il avait été convenu. Combien de fois ai-je tenté de la rejoindre au téléphone? Aucun succès. Elle m’a oubliée, m’a abandonnée. Voilà comment je me sens en ce moment: abandonnée.
Depuis trois semaines, elle a été ma principale raison ou motivation pour me lever chaque matin. Je n’ai pas été préparée à ce subit abandon. (…)

Je crois bien que tu es la première personne dont j’ai pu fixer les yeux aussi longtemps. Je crois également que tu es la personne pour qui j’écris le plus de mots, semblables à ceux que je couche sur papier. Les autres personnes, ce ne fut que passager : 2 ou 3 jours et elles étaient oubliées. Mais toi, oh comme tu occupes mes pensées depuis le jour où je t’ai rencontrée. Ce ne fut pas un coup de foudre instantané, comme il est souvent romancé, mais qui s’est développé jour après jour pour arriver à son apogée, soit aujourd’hui. C’est maintenant une certitude que je t’aime! Je voudrais t’avoir à mes côtés pour te le déclarer. (…)
Je crains que, lorsque nous nous reverrons, tu sois différente. Te voir transformée serait t’avoir perdue. J’aimerais que tout cela se termine de façon magique, voir féerique. (…)
Le feu de bonheur qui me gardait joyeuse ces derniers jours n’est plus que braise. Si je ne te revois pas avant mon départ, si rien ne vient rallumer ma joie intérieure, alors la chaleur se refroidira et j’ignore combien de temps sera nécessaire afin que se rallume la joie qui m’habitait quand tu étais à mes côtés. Reviens-moi mon adorée! »

Je l’ai revue, mais il ne s’est rien passé, d’autant plus qu’elle était hétéro. Aujourd’hui, on a gardé contact, heureusement. Bien que je me souvienne de la douleur que j’ai ressentie en écrivant ma tristesse de ne pas la voir, je n’ai plus mal. Je l’ai aimée, amoureusement, mais un amour impossible ne peut pas survivre indéfiniment. Loin d’elle, je ne suis plus amoureuse.

J’ignore ce que ça me ferait de la revoir maintenant : est-ce que mes douloureux sentiments ressurgiraient? Je n’en sais rien. Tout ceci pour dire que d’une certaine façon, grâce à sa rencontre, j’ai eu un réel aperçu de ce que pouvait être l’amour.

Je suis revenue chez-moi et depuis, j’en ai parlé à ma mère qui m’a acceptée comme je suis. Je n’ai pas été capable de le dire clairement à mon père, mais je crois qu’il l’a deviné quand je lui ai fait lire mes poèmes, dans lesquels je ne cache aucunement mon homosexualité.

Pour l’instant, j’ai décidé de sortir du placard en empruntant, non pas la porte de la voix, mais celle de l’écriture, cette voix silencieuse. Et seuls ceux qui savent qu’elle existe pourront peut-être me voir sortir, comme vous qui vous êtes rendus jusqu’à la fin de mon texte.

Au plaisir de s’aider et peut-être de faire connaissance.
Merci de m’avoir lue!

Sibylle

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