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19 février 2022

Je ne sais pas si je souffre de toc homo ou si ma dépression m'a rendu asexuel...

Bonjour, voilà moi je vous écrits car je suis actuellement en arrêt de travail pour dépression. Je ne sais pas si je souffre de tocs homo où pas. J’ai été pendant 10 ans avec une femme et tout se passait bien avec elle. Mais parfois, dans la rue où même avec des amis, je regardai leurs attributs. Je me forçais à ne pas regarder car je me disais que c’était mal. Mais après, ça ne m’excitait pas non plus. Je n’ai jamais regardé de porno gay ni rien, ça ne m’intéresse pas.

Mais aujourd’hui, séparé depuis peu, toutes ses pensées intrusives m’handicapent, je ne fais rien de mes journées. Cela nuit à mes interactions sociales. J’ai envie de leur dire tout ce qu’il m’arrive mais je n’y arrive pas. Je suis obligé de me concentré pour que dans nos conversations je ne lâche pas un «je ne sais plus si je suis hétéro où pas». C’est une souffrance psychologique énorme voir invalidante aujourd’hui. Est-ce que je souffre du Toc Homo où suis-je simplement refoulé ?

Ce que je voudrais dire aussi, et ça ça m’inquiète énormément aussi, c’est que ça fait 2 mois que je n’ai pas eu d’érections, pas de masturbation rien. Plus rien ne m’excite… Suis-je devenu asexuel ?

C’est un peu Bagdad dans ma tête, je précise que j’ai des médicaments car ça m’angoisse terriblement. Je ne dors pas la nuit. Aidez moi svp. Merci.

David

Émilie Grandmont

Salut à toi!

Merci de partager tes questionnements avec AlterHéros! Je comprends que ça peut être difficile parfois de parler de ce genre de doute, alors je suis contente de voir que tu as pu te confier à nous!

Donc, pour résumer ma compréhension de ta situation, tu te demandes si tu souffres du TOC homo, car tu as des pensées intrusives depuis ta séparation. Cela nuit à tes interactions sociales et tu ne fais rien de tes journées depuis. Tu as été en couple pendant 10 ans avec une femme et il t’arrivait parfois de regarder les attributs d’autres hommes, sans que ça t’excite. Tu es en souffrance psychologique et en arrêt de travail pour dépression. Une autre chose t’inquiète soit le fait que tu te demandes si tu es devenu asexuel, car cela fait deux mois que tu n’as plus d’érections et que tu ne te masturbes plus.

Premièrement, je vais t’insérer l’extrait d’une réponse de mon collègue par rapport au TOC homo, puisque nous recevons plusieurs questions semblables à la tienne:

« D’abord, qu’est-ce le TOC homo? Il est primordial de différencier le processus d’acceptation d’une identité sexuelle minoritaire d’un trouble obsessionnel compulsif avec obsessions sexuelles. Pour ce faire, je vais citer quelques extraits de cet article scientifique de psychologie au Québec écrit par K.-J. Igartua. Je t’encourage également fortement à le lire au complet si tu désires approfondir tes connaissances sur ce sujet. Chez AlterHéros, nous sommes généralement très prudent.e.s à aborder le sujet du TOC homo. Pourquoi? Parce qu’il s’agit d’un concept en psychologie utilisé par des thérapeutes professionnel.le.s et qu’il est souvent mal interprété et mal utilisé au quotidien par les internautes. De plus, c’est un concept sur lequel il est possible de trouver une tonne d’informations fausses sur Internet. En effet, ce concept est trop souvent utilisé afin d’invalider des questionnements sains et normaux dans le développement identitaire d’une personne. Ceci peut donc contribuer à une forme d’homophobie intériorisée en offrant la prémisse que les questionnements sur l’orientation sexuelle sont liés à un trouble psychologique et non pas à un développement psychologique normal. Alors avant d’approfondir la question du TOC homo, rappelons-nous ces quelques éléments :

  • Il est complètement sain d’avoir des questionnements sur son orientation sexuelle.
  • Il n’y a pas d’âge ou de moments précis pour avoir des questionnements, des réflexions ou des idées érotiques au sujet de l’orientation sexuelle.
  • Toutes les orientations sexuelles sont aussi belles les une que les autres. Aucune orientation sexuelle n’est meilleure ou inférieure à l’autre.
  • Les orientations sexuelles ne sont pas limitées à l’hétérosexualité ou l’homosexualité, mais que les personnes bisexuelles, pansexuelles et asexuelles existent. Il est donc possible que nos désirs et comportements ne s’inscrivent pas dans une case précise.
  • Les orientations sexuelles comprennent plusieurs composantes liées aux attirances physiques et aux attirances romantiques. Il est donc possible d’être romantiquement attiré par un type de personnes et sexuellement attiré vers plusieurs types de personnes.
  • La sexualité est quelque chose de fluide : nos préférences, besoins, intérêts, désirs et libido peuvent varier avec le temps, selon les contextes et selon les rencontres que nous faisons.
  • Ce n’est pas parce que quelqu’un a eu une idée, une attirance, un questionnement ou un fantasme homosexuel que cela nie son hétérosexualité.

[…]

À ne pas confondre, effectivement, avec un trouble obsessionnel compulsif homosexuel où l’obsession principale est un doute persistant et irrationnel de son orientation sexuelle. Dans la documentation scientifique, on note des manifestations de compulsions mentales liées au TOC homo de différents ordres :

1) chercher à se faire rassurer constamment sur son hétérosexualité par son entourage ou des services d’aide.

2) vérifier ses réactions physiologiques pour déceler un érotisme, comme en écoutant frénétiquement de la pornographie homosexuelle pour analyser les réactions du corps humain.

3) faire usage de techniques d’évitement comme une manoeuvre pour réduire l’anxiété. Cela peut prendre la forme d’éviter de façon réfléchie des activités sociales, de mettre fin à des relations amoureuses ou de consommation excessive diverse.

Plusieurs différents types d’angoisses peut être liées au TOC homo  : «la crainte d’un changement de son orientation sexuelle, la peur d’avoir des désirs pour les personnes du même sexe, l’inquiétude par rapport à leurs désirs hétérosexuels, la croyance que l’homosexualité est immorale, le désir d’éviter le jugement des autres et la honte». On y décrit également «différents sous-types de TOC sur l’orientation sexuelle, dont le TOC «tout ou rien» – où une idée vaguement homosexuelle surgit dans l’esprit sans aucun homoérotisme antérieur et cette idée est prise comme preuve d’une homosexualité latente ; le TOC «relationnel» où l’on utilise un échec ou une série d’échecs amoureux comme raison de remettre en question son orientation; le TOC «expérientiel » où une expérimentation antérieure avec le même sexe est prise comme preuve d’une orientation homosexuelle; le TOC «auto-dérisoire» où l’individu se répète qu’il est gai, mais l’étiquette fait davantage office d’insulte que de référence à sa sexualité.»

L’objectif ici est d’inviter les personnes à différencier l’anxiété accrue concernant les questionnements sur l’orientation sexuelle de l’attirance physique/émotionnelle que les personnes peuvent ressentir pour une/des personne​​‧s du même genre qu’elles. Il est donc possible pour plusieurs personnes de cesser ces vérifications compulsives sur leur sexualité en différenciant l’anxiété accrue de l’attirance. Il est aussi fréquent que ces questionnements refassent surface dans des moments de stress ou de fatigue chronique, car on cherche à tout prix à trouver une cause à ce stress ou cette fatigue.

Bref, le TOC homo maintient chez la personne «un débat continuel en tentant de déceler des «preuves» d’un homoérotisme inavoué et chercher à prouver hors de tout doute son orientation sexuelle par raisonnement intellectuel.» Or, il est impossible de conclure de façon intellectuelle ce qui est de l’ordre de l’émotif. Il est impossible de démontrer par un raisonnement logique que l’on aime la vanille ou non. C’est d’abord et avant tout quelque chose de l’ordre du ressenti et de l’émotif. »

Je me demande alors, pour quelle raison as-tu ces pensées présentement? Tu sembles affirmer ne jamais avoir ressenti d’attirances sexuelles envers des hommes. Tu mentionnes avoir déjà regardé leurs attributs, mais sans ressentir d’excitation. C’est normal de regarder d’autres personnes, sans ressentir d’attirances envers celles-ci! Cela ne remet pas en question notre orientation sexuelle. 

Ce que je crois apercevoir dans ton message, c’est que ces pensées intrusives que tu as sont liées à ta dépression. Tu mentionnes être en détresse psychologique. Nos pensées peuvent parfois prendre une forme inattendue et, de ton côté, celles-ci pourraient se présenter sous la forme de ces doutes, sans avoir nécessairement d’autres sources qui les feraient apparaître. Je ne pense donc pas que tu sois « refoulé », comme tu le mentionnes. 

De plus, la dépression peut aussi avoir un impact sur notre désir sexuel. La prise d’antidépresseurs a aussi comme effet de réduire cette dernière. Il se peut ainsi que tu n’aies plus d’érections à cause de ta santé mentale et de la prise de médicaments. Tu te demandais si tu étais asexuel. L’asexualité, c’est de ressentir peu ou pas du tout d’attirance sexuelle envers d’autres personnes. Ce n’est pas un problème, mais plutôt une forme d’orientation sexuelle, une identité. Être asexuel·le, ça ne veut pas dire que nous ne possédons pas de libido, d’excitation. Une personne asexuelle peut avoir des érections et se masturber. Pour d’autres, il peut y avoir aussi une absence de libido.

Dans ton cas, le meilleur conseil que je pourrais te donner est de consulter en psychologie, si ce n’est pas déjà le cas! Un·e professionnel·le aurait les capacités de t’aider avec ta dépression, ta détresse psychologique et tes questionnements. 

Voilà, j’espère avoir pu t’aider avec ma réponse. N’hésite pas à nous recontacter si tu as d’autres questions.

 

Émilie (elle/she), stagiaire à AlterHéros

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