Salut Madi!
Je te remercie de nous avoir écrit! Si je résume ta situation, ça fait un peu plus de deux ans que tu as réalisé que tu ressentais de l’attirance pour les filles et que tu as commencé à t’identifier comme lesbienne en fonction de cette attirance. Tu précises d’ailleurs que, bien que tu puisses trouver certains garçons jolis, tu ne ressens rien d’autre pour eux que de l’amitié. Pourtant, depuis quelques semaines, suite à des rêves où tu sors avec des garçons, tu t’es mise à remettre ton orientation sexuelle en question et te demande si tu ne te serais pas trompée.
La première chose que je peux te dire à propos de l’orientation sexuelle, c’est qu’on ne peut pas se tromper! N’est-ce pas merveilleux? Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse lorsque l’on s’interroge sur notre orientation sexuelle, d’abord parce ce que l’on ressent est toujours valide et ensuite parce que le ou les mots que l’on choisit d’utiliser pour nous définir n’appartiennent qu’à nous! Laisse-moi m’expliquer un peu.
Comme je l’avais écrit à une personne dans
cette autre réponse qui pourrait t’intéresser : « L’orientation sexuelle se décline en trois aspects : les désirs, les comportements et l’identité. Les désirs, ce sont nos attirances et envers qui elles se déclarent (est-ce qu’on est plutôt attiré par tel ou tel type de corps, tel ou tel type de personne, qui on aurait envie d’embrasser, etc.). Les comportements, ce sont les actions que l’on pose réellement, à l’inverse des désirs qui renvoient à l’imaginaire (ex : avoir embrassé notre amie, avoir eu une relation sexuelle avec un homme, avoir regardé les fesses d’une personne dans la rue). Finalement, l’identité, c’est l’appropriation et le choix de mots pour se décrire par rapport à notre identité sexuelle (hétéro, lesbienne, pansexuel.le, etc.). Certaines femmes, par exemple, qui auraient des désirs invariablement de l’identité de genre des personnes qui l’intéressent, mais n’avoir eu des expériences sexuelles qu’avec d’autres femmes, pourraient se définir comme lesbiennes (se basant plutôt sur leurs comportements) ou comme pansexuelles (se basant davantage sur leurs désirs) ou même d’autres termes s’ils lui conviennent mieux! L’identité, c’est vraiment propre à chaque personne, sa façon de se percevoir et son sentiment d’appartenance à une orientation sexuelle plutôt qu’une autre. »
Par ailleurs, je pense qu’il est important de mentionner que la sexualité est un concept qui est fluide, particulièrement à l’adolescence. Ce que ça veut dire, c’est que les désirs et les attirances peuvent se modifier tout au long de la vie. Il serait possible, par exemple, de n’avoir du désir qu’exclusivement pour les filles, puis d’éventuellement en développer aussi pour les garçons. De ce fait, on peut choisir de s’identifier avec différents mots au fil du temps, parce que ça correspond mieux à notre réalité, mais aussi parce que ça résonne davantage avec notre ressenti.
Dans ton message, tu dis que tu peux trouver les garçons beaux, mais que tu n’as pas envie de « relationner » avec eux. Quand tu utilises ce mot, parles-tu de relations sexuelles, amoureuses ou les deux? Parce qu’il est tout à fait possible d’avoir une attirance au niveau sexuel (avoir envie d’embrasser, d’avoir des relations sexuelles, etc.) pour les personnes d’un certain genre, mais de ne pas avoir d’attirance romantique (être en amour, avoir envie de partager sa vie, etc.) pour elles, et vice-versa! Évidemment, il est tout aussi possible de trouver belles certaines personnes, de manière purement esthétiques, sans ressentir de désir pour elles pour autant.
Je prends quelques mots par rapport au terme « TOC hétéro » que tu utilises dans ta question. J’imagine que tu utilises ce terme en référence au fameux « TOC homo » dont on entend souvent parler à AlterHéros. Sache que ce terme est très souvent mal utilisé, renvoyant plutôt à de l’homophobie intériorisée, donc à une peur d’être homosexuel.le basé sur des préjugés négatifs. Je t’invite à lire
cette réponse de mon collègue Guillaume à ce sujet, qui explique très bien le concept! Or, il n’y a pas de préjugés négatifs véhiculés en société par rapport à l’hétérosexualité, tu le devines bien! Alors il convient de faire la différence entre un trouble obsessionnel compulsifs (un trouble de santé mentale diagnostiqué par un.e professionnel.le) et un questionnement normal et sain par rapport à sa sexualité.
En bref, il est absolument normal d’avoir des questionnements et des remises en question à propos de ton orientation sexuelle. N’hésite pas à « tester » comme tu le fais : tu ne peux que mieux te connaître! Quoi qu’il en soit et quelles que soient tes conclusions face à tes attirances, rappelle-toi qu’elles sont valides et que tu peux choisir d’utiliser le terme qui te convient pour te définir en ce sens. Tu n’as pas à avoir peur de te tromper d’avoir « choisi » la mauvaise orientation sexuelle parce que la sexualité n’est pas quelque chose de fixe, mais plutôt un concept fluide et mouvant. Il n’y a donc aucun mal à décider de s’identifier d’une façon pendant une partie de sa vie, puis de s’identifier différemment plus tard. L’important, c’est que tu sentes que le ou les mots que tu utilises (si tu choisis d’en utiliser, parce que tu peux aussi choisir de ne pas choisir!) te fassent sentir bien et en cohérence avec toi-même.
Prends soin de toi et n’hésite pas à nous réécrire si tu as d’autres questions, si tu veux des trucs pour réduire ton anxiété ou quoi que ce soit d’autre. Ça nous fera toujours plaisir de te répondre! 🙂
Marion, intervenante pour AlterHéros