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3 décembre 2019

Pouvez-vous m'éclairer sur les possibles liens entre anorgasmie et autisme ou anorgasmie et viol ?

[ Asperger – sexe – orgasme ]
Bonjour à toutes et à tous. Je m’appelle Lara, j’ai 21 ans. Je suis une adulte diagnostiquée Asperger.
J’ai une anorgasmie primaire ( = impossibilité ou quasi-impossibilité d’atteindre l’orgasme depuis toujours).
Je suis sexuellement active depuis que j’ai 15 ans.
Mes premières expériences ont été des viols avec mon premier copain.
J’ai ensuite eu plusieurs autres copains et me suis débridée de plus en plus.
J’ai eu mon premier et seul orgasme dans mon sommeil, seule, quand j’avais 20 ans. Je n’arrive pas à atteindre l’orgasme éveillée seule ou avec un partenaire.
Aujourd’hui avec mon copain actuel, nous avons une forte libido. Je prends du plaisir jusqu’à me sentir rassasiée mais sans pour autant atteindre l’orgasme.
Ma question : quelqu’un aurait-iel une expérience similaire / des conseils à me donner / quelque chose à me partager sur les possibles liens anorgasmie-autisme ou anorgasmie-viol s’il vous plaît ?
Lara

Équipe -Pose ta question!-

Bonjour Lara,
Merci beaucoup de faire confiance à AlterHéros.

Tu demandes s’il y a d’autres personnes ayant une expérience similaire de l’anorgasmie dans un contexte post agression sexuelle ou dans un contexte de neurodiversité. Je peux te dire que ta situation est pas mal commune, en fait. Il y aussi certainement des liens anorgasmie-autisme et des liens anorgasmie-viol – et je pense que les deux choses peuvent également s’entrecouper.

Si je comprends bien ton explication, tu aimerais atteindre l’orgasme ? Je demande cela pour plusieurs raisons. Tout d’abord, atteindre l’orgasme n’est pas de tout une nécessité pour avoir du plaisir seul.e ni avec un.e partenaire – tout comme tu mentionnes dans ta question où tu dis qu’il est possible pour toi de prendre du plaisir jusqu’à te sentir rassasiée lors des relations avec ton copain. Aussi, ce n’est pas tout le monde qui parvient à l’orgasme lors des relations sexuelles (même lors de la masturbation). Si toi et ton copain vous sentiez bien dans votre relation, c’est ça qui est primordial. Je demande aussi parce qu’il peut arriver souvent qu’il y a une certaine pression en couple d’atteindre l’orgasme et même un certain focus sur le fait de ne pas l’atteindre si c’est le cas. Souvent, cette pression n’est pas quelque chose qui est fait exprès, mais elle pourrait être présente quand même et pourrait avoir des effets nuisibles dans une relation, et surtout pour la personne qui n’atteint pas l’orgasme. Donc, si tu ressens de la pression de la part de ton partenaire, ceci serait quelque chose d’important d’aborder avec lui si tu penses qu’il serait possible de le faire en sécurité. Si tu trouves qu’il y a une pression à atteindre l’orgasme, mais que cette pression vient plus de toi-même que de ton partenaire, ceci est aussi quelque chose qui pourrait être important à questionner. Comme j’ai mentionné, il y a généralement un grand focus sur l’idée d’atteindre l’orgasme (surtout lors des relations sexuelles), alors il pourrait être vraiment difficile de ne pas intérioriser cette idée et les messages qui vont avec cette notion. Alors, pour le répéter parce qu’il est important : atteindre l’orgasme n’est pas du tout nécessaire pour avoir du plaisir seul.e ni avec un.e partenaire.

Si le cas est que tu aimerais atteindre l’orgasme pour des raisons personnelles, il y a des choses qui pourraient peut-être aider à cet effet. Certaines personnes trouvent qu’il est plus facile d’atteindre l’orgasme s’illes se stimulent (ou se font stimuler) en plusieurs endroits qui donnent du plaisir à la fois (de la stimulation du clitoris lors de la pénétration vaginale ou anale, par exemple).  D’autres trouvent qu’il est plus facile d’atteindre l’orgasme avec de la stimulation concentrée sur une même zone ou sur une zone à la fois. Tu mentionnes aussi que tu t’es débridée de plus en plus après tes premières expériences ; il est certain que le plus confortable qu’on est (avec son corps, avec sa sexualité, avec un.e partenaire, etc), le plus facile il pourrait être d’atteindre l’orgasme. Cela peut aussi nécessiter de l’expérimentation pour trouver qu’est-ce qui pourrait marcher (j’imagine qu’il est possible que tu as déjà fait de l’expérimentation comme ça, par exemple, mais des fois ça peut prendre plusieurs tentatives).

Concernant les liens anorgasmie-autisme et anorgasmie-viol, comme mentionné, il est certain qu’il existe des tels liens et que ces liens peuvent aussi s’entremêler. Je ne peux pas dire nécessairement qu’est-ce qui se passe dans ton cas, mais je peux parler plus généralement des liens. Il y a vraiment beaucoup à dire sur chacune de ces choses et sur les deux choses ensemble mais je vais essayer de mentionner quelques points pertinents. La plupart des personnes qui ont des expériences de viol ressentent des effets sur leur sexualité, surtout si les expériences de viol font partie des premières expériences sexuelles et si ces expériences arrivent à un jeune âge. Le viol agit comment un traumatisme et le traumatisme va avoir des effets sur la sexualité (je ne veux pas libeller tes expériences, par exemple, si tu ne les considères pas comme du traumatisme ; je parle en termes généraux). Il est fréquent que des expériences de viol peuvent avoir des effets sur la possibilité d’atteindre l’orgasme. Ceci n’est pas de tout pour dire qu’il n’est pas possible d’atteindre l’orgasme après des telles expériences. Par exemple, il est possible d’apprendre des compétences même si on a eu des telles expériences, et il me semble de ta question que tu as déjà des compétences là-dessus. Je trouve que ça c’est vraiment formidable – ça prend du courage. Il peut être possible d’apprendre d’autres compétences ou techniques si tu trouves que ceci pourrait faire partie des choses qui se produisent lors des relations sexuelles ou de la masturbation (ou même plus généralement). Parfois, cela peut aider de parler avec sa/son partenaire des telles expériences pour que l’autre personne soit consciente, mais il existe beaucoup de raisons pour laquelle une personne peut aussi décider de ne pas le faire et c’est vraiment un choix individuel. Certaines personnes trouvent qu’il pourrait aider d’aller voir un.e thérapeute spécialisé.e dans le traumatisme sexuel (ou un.e sexologue) mais ceci est aussi vraiment un choix individuel et la thérapie n’est pas accessible à tout le monde (soit pour des raisons financières, soit pour d’autres raisons). Je veux souligner ici le fait que même si l’anorgasmie est liée aux expériences de viol, il n’est pas automatique qu’on soit ensuite «brisé.e» ou quelque chose de similaire.

Concernant les liens anorgasmie-autisme, il en existe plusieurs. Beaucoup de personnes autistes rencontrent certaines difficultés au niveau sensoriel par rapport aux relations sexuelles et la masturbation. Des fois, les aspects sensoriels peuvent avoir des effets sur la possibilité d’atteindre l’orgasme. Par exemple, beaucoup de personnes autistes trouvent qu’illes sont soi hypersensibles (plus sensibles que la majorité des personnes) soit hyposensibles (moins sensibles que la majorité des personnes) et la sensibilité atypique peut avoir des effets sur la sexualité. Si tu trouves que tu te sens vraiment sensible lors de la stimulation d’une certaine zone, des fois ceci peut rendre difficile l’orgasme parce que le plaisir va changer pour l’inconfort avant que l’orgasme soit possible. Si ceci est la cas, tu peux peut-être essayer avec de la stimulation moins intense – et peut-être pour une durée plus longue. Il peut être également possible qu’il n’est pas juste une question de la stimulation sexuelle – il y a beaucoup de choses qui se passent au niveau sensoriel lors des relations sexuelles et des fois ça pourrait aider de réduire l’influx sensoriel plus généralement (par exemple avec de la lumière moins intense, des draps doux et même avec des bouchons d’oreille). Si tu trouves que tu te sens trop stimulée – ou pas assez stimulée – plus généralement lors des relations sexuelles et/ou de la masturbation, il peut être une idée intéressante d’examiner ton environnement sensoriel dans ces situations et voir s’il y a la possibilité d’ajuster certains éléments. Il y a aussi une certaine tendance chez les autistes de se trouver «pris.e» sur certaines pensées (surtout en ce qui concerne les expériences intenses ou traumatiques) dans des différentes manières que les personnes neurotypiques, et il est certain que ceci peut se produire lors des relations sexuelles ou de la masturbation – ceci peut poser une distraction (si les pensées ne sont pas bienvenues) qui peut ajouter aux éléments qui ont des effets sur la possibilité d’atteindre l’orgasme. Si tu trouves que c’est le cas pour toi, c’est-à-dire que tu as des pensées «en boucle» comme ça, il peut être intéressant de voir si tu peux les «interrompre» si tu penses que ce serait possible de le faire d’une façon sécuritaire. Des fois, les personnes autistes peuvent ressentir de la pression sociale/sexuelle parce qu’on est habitué.e aux messages qu’on ne fait pas des telles choses «correctement», et ça aussi peut rendre difficile des choses comme l’orgasme parce qu’il est vraiment difficile de se sentir assez à l’aise pour atteindre l’orgasme si on est concerné.e avec le fait de faire des choses davantage comme les neurotypiques. Alors, il peut aider aussi de te laisser être toi-même, c’est-à-dire autant autiste que tu es et voir si ça aide avec la possibilité d’atteindre l’orgasme si cela est quelque chose que tu veux bel et bien.

Merci beaucoup de ta confiance et n’hésite pas à nous réécrire si tu as d’autres questions. Tu peux également écrire directement à neurodiversites@alterheros.com si tu veux parler davantage de l’autisme et de la sexualité.
Nous serons toujours disponibles pour t’accompagner!

Noah, personne coordonnatrice du volet Neuro/Diversités pour AlterHéros

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