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2 octobre 2017

Comment savoir si ce garçon se moque de moi ou veut apprendre à me connaître?

Marie-Édith Vigneau

Question :

Bonjour,
Je vous contacte à propos de mes interrogations sur mon orientation sexuelle mais aussi et surtout à cause d’un émoi envers un garçon que je viens d’avoir récemment. Tout d’abord, sachez que je vous ai déjà contacté par le passé car j’étais en questionnement.
Aujourd’hui, j’y suis toujours. J’ai depuis toujours été attiré par les filles, tombé amoureux d’elles et d’une dans mes années lycée dont je m’imaginais sans cesse être dans ses bras, l’embrasser, lui faire des bisous dans le cou, lui faire l’amour, avoir ses seins sur mon torse, lui tenir la main… et ça me rendait tellement heureux; j’étais (et peut-être encore maintenant) accro à elle mais rien ne s’est produit; elle m’a dit ne rien ressentir pour 2 ans après m’accepter sur Facebook et on devait se voir, apprendre à se connaitre d’avantage puis m’a bloqué et m’a dit quand je l’ai relancé à plusieurs reprises «pourquoi t’a pas compris ?» alors que c’est elle qui m’avait relancé pour qu’on se voit et me disait des trucs genre «salut toi» et plein d’autres signes depuis le lycée qui m’ont fait pensé à un intérêt de sa part.
J’en ai beaucoup souffert, depuis juin 2016, je n’ai plus de nouvelles et on dirait que mes sentiments se sont déplacées sur ce garçon dont je vous parle juste après… Je suis donc toujours en questionnement car j’ai des fantasmes aussi homosexuels et je me masturbe sur du porno gay en ce moment car l’hétéro me lasse beaucoup.
J’ai l’impression d’avoir des alternances d’attirance mais que ma curiosité envers le sexe gay a pris une grande ampleur et a dépassé mon intérêt envers les femmes puis parfois il revient plus fort. Je suis autant excité par le porno lesbien avec de belles jeunes femmes de mon âge qui se frottent l’une sur l’autre et se font l’amour (je m’y masturbe dessus aussi) que par le sexe gay.
La seule différence avec avant, c’est que finalement j’ai l’impression d’avoir cheminé et d’accepter ce côté de moi.
Je pense que ma cousine y a été pour quelque chose car il y a un an j’ai appris qu’elle était bisexuelle à tendance lesbienne par ma soeur car ma cousine s’était confié à elle mais elle sait pas que je sais.
J’aimerais lancer le sujet avec elle (seulement j’ai peur de trahir ma soeur) pour lui faire part de ce que je ressens et partager son expérience et être rassuré aussi car même si j’accepte cette forme de «bisexualité», je crois que je devrai vivre cacher pour être heureux. Je ne crois pas avoir la force et le courage d’en parler à mes parents et au reste de ma famille.
Un autre point qui me dérange, c’est mon homophobie intériorisé qui m’a empêché je pense jusqu’à maintenant de cheminer.
Moi, j’accepte, ça ne me choque plus et je me suis rendu compte que c’était de l’amour après tout comme l’hétérosexualité mais ce qui me dérange c’est de peut-être de devoir donner raison à tous ceux qui ont toujours insinué que j’étais gay durant mon adolescence à cause de mon côté efféminé (merci les préjugés) à l’école et leur donner raison avec cette bisexualité me fend le coeur quelque part comme si c’était honteux car aux yeux des autres ça l’est et c’est dur de devoir affronter ça en sachant que c’est certainement une part de sa personnalité et qu’on a pas choisi.
C’est cette homophobie intériorisée qui est dure, par rapport à ce qu’on entend, aux préjugés, tout ça embrouille et empêche beaucoup comme par exemple dernièrement avec la rencontre d’un garçon de 5 ans plus jeune que moi mais finalement il ressemblait physiquement à cette fille dont je vous parlais plus haut. Par peur du «quand dira-t-on», je n’ai pas osé faire quoique ce soit bien que l’envie ne m’ait pas manqué. J’ai été «troublé» d’être troublé par lui dans un premier temps mais après j’ai ressenti les mêmes sentiments et émotions en m’imaginant en couple avec lui qu’avec la fille dont j’étais/suis fou.
Je l’ai rencontré dans le cadre d’un travail d’équipes et il y avait plein de jeunes de mon âge et de son âge.
Dès la première rencontre, il m’a tapé dans l’oeil. On a parlé un peu au début et je sais pas il avait un comportement différent avec moi. J’ai du passer un coup de téléphone pendant le travail et il m’a dit «t’étais avec ta copine?»; je lui ai dit «non, non».
Il me lançait des raisins, disait que si on changeait d’équipe il me préférait plutôt que la fille avec qui je coupais, il me taquinait souvent comme par exemple : «bon comme le jambon», «valou ma copine» (il me surnommait valoo et/ou valivaloo), «comment va ce matin ?», «t’aurais pas un petit côté féminin par hasard; non je te demande ça car tu vas souvent dans les vestiaires des filles ? Et là, je lui ai dit : «mais toi aussi ?» «Oui moi aussi, je le sais mais je te demande» (je m’en veux car j’ai été un peu sur la défensive car je ne sais pas ce qu’il est et si c’était pour se foutre de ma gueule ou pour insinuer quoique ce soit sur moi).
Puis une autre fois il m’a dit : «je te préviens, si tu reviens encore une fois dans les vestiaires des filles, je te chope et ça va mal aller pour toi» (sur un ton un peu efféminé volontaire je pense sur la plaisanterie je sais pas trop en fait si il voulait me faire comprendre quelque chose). Un autre jour il disait : «c’est l’histoire d’un mec qui fait son coming-out…» et je sais plus il parlait tout seul un peu fort peut-être pour attirer mon attention ou pour se moquer de moi et d’une apparence qui lui a fait penser que… ?
Une autre fois, c’était quand on se lavait les mains, après s’être essuyé sur une serviette commune en même temps avec un autre gars plus âge 40-50 ans, il s’est mis à me caresser la joue avec sa main du haut vers le bas en me lançant un de ces sourires… Était-ce pour me draguer ou pour se foutre de ma gueule et de son interrogation sur ma sexualité ? Il m’avait lancé un sourire en coin quand j’avais rigolé aux éclats et puis pareil une fois ou plusieurs rigolaient et parlaient de moi je l’ai regardé et il avait un regard subjugué avec un chouette sourire.
Une autre fois il m’a pincé délicatement la nuque avec sa main puis un autre jour, pendant la pause du midi il m’a taquiné en me touchant les tétons et en appuyant dessus et m’a attrapé comme pour une prise de judo par les bras et il s’est collé à moi et j’ai senti comme une sorte de semi-érection on aurait dit.
Je ne sais que penser, je ne cesse de penser à lui je suis triste mais tellement; si j’avais été seul avec lui j’aurais tenté de le toucher plus mais aussi de faire quelque chose mais la je ne pouvais rien faire et c’est quelqu’un de très tactile j’ai l’impression car un autre mec avec qui il coupait le raisin lui reprochait de l’être.
Un autre soucis c’est qu’il est témoin de Jéhovah et donc l’homosexualité est interdite alors je sais pas trop si ça a un rapport avec son attitude virtuelle que j’expose ci-dessous. Il est très gentil et pas sectaire du tout d’ailleurs comme les autres personnes qui sont venu travailler.
Je l’ai ajouté sur instagram il a accepté quelques jours après son retour chez lui au moment de ma demande et a demandé à me suivre en retour aussitôt. Il est l’un parmi toutes les rencontres a m’avoir accepté très vite instantanément même. Seulement, quelques jours plus tard, il me suivait plus; peut-être parce que j’ai aimé une photo quelques jours après qu’il l’ait posté…?
J’ai du mal à comprendre, est-ce une façon d’attirer mon attention pour m’obliger à aller lui parler ? Pourquoi si il a tant confiance en lui en drague et qu’il est avenant, et si c’était de la drague, pourquoi ne viens-t-il pas me parler ? J’ai peur qu’il me bloque de sa story si je vais lui demander des nouvelles en tout bien tout honneur… ? Que faire, j’en meurs d’envie mais j’ai peur des retombées.
Qu’en pensez-vous de son comportement quand il était en face de moi et de maintenant ? Était-ce de la séduction ? Est-il gay ou bi ? Quels sont les moyens de reconnaitre la drague chez un mec gay intéressé ? Sur Instagram, il aime des choses comme «interestsgirls» avec des photos de maquillage et autre étonnant car il fait assez viril puis il a aimé une photo avec un message «come along pond… please»… que cela signifie-t-il ? Est-ce un signal qu’il m’envoi même si ce ne sont la que des préjugés (encore et toujours qui ne se vérifient pas à chaque fois par rapport à l’orientation sexuelle) ?
En même temps, il aime aussi des photos qui disent «plus tard si je me mari…» j’y comprend rien.
Se sent-il coincé par peur du jugement des autres sur sa story si il aimait mes photos et commentait ? À cause de sa religion ? Aurait-il pris peur avant de faire quoique ce soit d’ou son désabonnement ? Que faut-il faire à votre avis ?
Je ressens la même chose que pour cette fille (envie d’être avec, d’embrasser…). C’est perturbant mais je l’accepte.
Un dernier point, c’est que j’aimerai tellement être en couple et de partager de l’amour, j’en suis triste et me sent seul; j’attends d’être en couple depuis tellement longtemps après quelques expériences naïves au collège, depuis rien du tout.
J’ai l’impression de tomber tout le temps sur des personnes qui ont peur d’aimer, qui soufflent le chaud et le froid (est-ce le cas de ce garçon ?) et je me dis que je trouverai jamais quelqu’un fille ou garçon qui m’aime et qui veuille de moi.
J’ai besoin d’aimer et d’être aimé autrement que par ma famille et mes parents.
J’ai si peur d’être malheureux en amour et d’être seul toute ma vie et d’être en manque que je sois avec une fille ou un garçon s’il s’avère qu’au terme des expériences je sois réellement bisexuel. Comment ferai-je pour ne pas être frustré sentimentalement et sexuellement sans blessé qui que ce soit ? Je ne veux pas une vie d’amour faite de débauche et de frustrations car je suis quelqu’un de fidèle, en tout cas je l’espère malgré mes fantasmes.
Je vous remercie,
Cordialement,
V.

Réponse:

Rebonjour V. ! Merci de nous faire confiance à nouveau!
Je suis contente de voir qu’AlterHéros a fait une différence dans ton parcours.
Ton message contient beaucoup d’informations et de questions. Allons-y point par point!
D’abord, revenons sur ce moment où tu étais accro à une fille au lycée. Il est vrai qu’il est parfois difficile de savoir si une personne a de l’intérêt envers nous ou pas. Toutefois, tu peux apprendre de cette expérience. Je ne sais pas comment tu t’y prends pour flirter ou encore pour approcher les gens afin de les connaître davantage. Peut-être que quelques faux pas sont en cause, mais peut-être qu’elle n’était simplement pas intéressée par une relation romantique avec toi. Quand tu expliques l’avoir relancée à plusieurs reprises, est-ce que c’était exagéré, selon toi? Y a-t-il possibilité qu’elle ait trouvé que tu étais trop insistant? Aussi, je comprends qu’elle t’envoyait d’autres messages, mais «salut toi» n’est pas nécessairement un signe d’intérêt amoureux. 🙂 Cela dit, je suis désolée que cette situation t’aie fait du mal.
Concernant ta cousine, est-ce qu’elle est out (a révélé sa bisexualité) auprès de ta soeur seulement ou à d’autres membres de la famille? Si seule ta soeur est au courant, il serait délicat d’aborder le sujet avec elle. Est-ce que tu crois qu’elle serait ouverte à une discussion si tu te confiais à elle? Ta soeur, de son côté, a-t-elle bien réagi à cette annonce? Crois-tu qu’elle fera une bonne confidente pour toi?
Je comprends ce que tu veux dire avec l’expression «bisexuelle à tendance lesbienne», particulièrement puisque tu en parles dans le contexte de ta propre (possible) bisexualité. Cependant, je me dois de faire une petite précision: certaines personnes bisexuelles sont attirées davantage par les hommes ou par les femmes, mais elles restent des personnes bisexuelles à part entière, c’est-à-dire ayant la capacité d’éprouver une attirance sexuelle et romantique envers les hommes et les femmes. Voilà !
Tu sais, tu n’es pas obligé de vivre ouvertement ta bisexualité avec ta famille, particulièrement si tu crois que c’est trop dangereux pour ta propos sécurité ou si tu as envie de garder ton jardin secret à ce sujet. Tu peux réfléchir aux avantages et aux inconvénients du coming-out auprès de tes proches. 
C’est super que tu aies reconnu l’homophobie intériorisée et que tu aies le courage d’en parler. Les préjugés existent encore, nous les entretenons parfois nous-mêmes en tant que personnes homosexuelles / bisexuelles et c’est difficile de s’en défaire. Tu dis dans ton message, en parlant de bisexualité: «comme si c’était honteux car aux yeux des autres ça l’est». Est-ce que ces autres dont tu parles ont une importance dans ta vie? Est-ce qu’ils en font encore partie, ailleurs que dans tes souvenirs d’adolescence? Quelle est la part d’inconvénients et d’avantages à t’exprimer comme tu le désires et à vivre ta sexualité comme tu l’entends malgré ton souvenir de tes anciens camarades de classe? 
Autres questions au sujet des stéréotypes et préjugés: y a-t-il vraiment une façon rigide d’être un homme ou une femme? Est-ce que le stéréotypes de l’homme et de la femme rendent justice à ce qu’est vraiment l’être humain dans toute sa complexité? Aussi, prenons un moment pour remarquer que les stéréotypes associés aux femmes provoquent les moqueries, alors que ceux qui sont liés aux hommes sont valorisés. Mmmm, ça sent le sexisme! Sommes-nous gagnant.e.s à entretenir ces stéréotypes? Si on acceptait de les dépasser chacun.e de notre côté, même si ça prend du courage pour s’affirmer, notre société s’en porterait-elle mieux? Possiblement !
Concernant celui qui fait battre ton coeur actuellement, effectivement, c’est difficile de déterminer s’il tente de flirter (très maladroitement!) avec toi ou s’il se moque de toi. Et il n’y a aucun moyen pour moi de connaître son orientation sexuelle! Est-ce que tu aurais un peu de courage pour lui demander quels sont ses objectifs? Dans tous les cas, tout cela semble te rendre malheureux et te troubler. Si tu en as envie et la possibilité, tu pourrais aborder la situation avec lui. Sinon, lorsque tu auras trouvé une personne en qui tu as confiance pour parler de ton orientation sexuelle (ta cousine, ta soeur ou autres), que dirais-tu de leur glisser un mot à propos de cette situation? 
La religion qu’il pratique met peut-être un frein à l’expression de ses sentiments, en effet. Il se peut aussi qu’il explore le flirt. Avec du recul, qu’en penses-tu? Cette histoire d’Instagram semble t’apporter beaucoup d’anxiété. Tu te poses tant de questions! Tu as tout de même envie de te rapprocher de lui, si je comprends bien. Que dirais-tu de l’aborder, sur Instagram ou autres? En ce moment, vous ne semblez pas être proches, quelles seraient les retombées dont tu parles?
Les moyens de draguer sont aussi variés qu’il y a d’humains sur la planète ! Chacun.e a sa manière d’aborder l’autre. Certaines sont plus efficaces que d’autres, aussi, et il n’y a aucune formule universellement gagnante! L’orientation sexuelle n’est pas un super indicateur de la façon de draguer… et vice-versa. Certains codes sociaux sont acquis dans certains milieux, bien sûr, mais le meilleur moyen de savoir si une personne est intéressée, c’est de lui poser la question. Cela ne change pas, peu importe l’endroit où on se trouve, notre âge, notre orientation sexuelle, notre identité et notre expression de genre… la communication claire, il n’y a rien de mieux.

Tu expliques, à la fin de ton message, avoir peur d’être en manque, que tu sois avec une fille ou un garçon, si tu étais bisexuel. Tu vis les mêmes émotions et sentiments que tu as éprouvés envers la fille de laquelle tu étais amoureux au lycée, n’est-ce pas? Est-ce que, depuis le moment où tu as été amoureux de cette fille et le moment actuel où tu es attiré par un garçon, tu t’es senti frustré sexuellement ou sentimentalement? As-tu eu le sentiment de manque dont tu parles? La bisexualité n’est pas un état permanent de manque, tu sais. Une personne hétérosexuelle vivra peut-être un sentiment de manque dans sa vie, comme c’est le cas pour une personne homosexuelle ou bisexuelle. Mais ce manque vient-il vraiment du fait que l’on fréquente une personne d’un genre ou d’un autre? 
Comme tu l’expliquais, il est difficile de vivre avec les stéréotypes entourant l’homosexualité, la masculinité et la féminité. C’est la même chose avec la bisexualité. Nous intériorisons aussi des éléments en lien avec celle-ci. Par exemple, il est faux de croire que la vie d’une personne bisexuelle est nécessairement faite de débauches et de frustrations. Certaines personnes bisexuelles vivent plus intensément que d’autres, mais ce n’est pas le propre de la bisexualité. Il y a certainement des gens hétéro ou homo dans ton entourage qui vivent avec excès, cumulant les abus et les frustrations, n’est-ce pas?
En terminant, tu dis aussi vouloir être fidèle malgré tes fantasmes. Ce qui est génial avec les fantasmes, c’est qu’ils se passent dans notre tête et personne n’y a accès tant qu’on ne décide pas d’en parler. Nul besoin de les réaliser non plus, à toi de voir s’ils correspondent à tes réelles envies et à tes valeurs. En passant, certaines personnes hétéro ont des fantasmes «homo» et vice-versa, et c’est très bien ainsi !
Aussi, la fidélité dépend de ta propre définition de celle-ci (et il vaut mieux la partager avec son/sa/ses partenaire.s!). Est-ce que tu veux une relation monogame? Est-ce que tu serais à l’aise avec le fait que ton/ta partenaire ait des relations sexuelles avec quelqu’un d’autre? Sens-tu que tu peux être amoureux de plus d’une personne à la fois et que tu peux entretenir plusieurs relations amoureuses? Bref, la fidélité, c’est un mot plus complexe qu’on ne le pense. Je te laisse y réfléchir également. 

Voilà!
En espérant que tu te porteras mieux, n’hésite pas à nous réécrire si tu en ressens le besoin.

Tu peux aussi nous donner des nouvelles si tu en as envie!
Au plaisir, 
Marie-Édith Vigneau
B.A. sexologie, pour AlterHéros

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