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11 juillet 2018

Je m'inquiète à l'idée que mon enfant soit possiblement trans...

samalexis

Bonjour,
Mon fils de 15 ans m’a avoué qu’il pense être transgenre; cela lui trotte dans la tête depuis environ 1 an, depuis que son corps a commencé à vraiment changer. Il dit cependant ne pas être certain à 100%. Il a profité de mes absences pour s’habiller en fille et dit s’être senti confortable ainsi, sauf qu’il n’a pas aimé se voir dans un miroir parce qu’il a trouvé son visage trop masculin.
Je lui ai demandé s’il se sentait fille quand il était enfant (8-9 ans) et il m’a répondu que non. De fait, il a toujours été très masculin dans ses intérêts, ses actions, ses goûts vestimentaires, etc. Et même aujourd’hui, il a des agissements, des réactions et une façon de penser masculines.
Le problème, c’est que depuis qu’il m’a dit ça, j’ai une réaction très négative. Pas avec lui, au contraire; je l’ai immédiatement et très sincèrement assuré de notre soutien et de notre accompagnement dans ses démarches (il souhaite attendre la rentrée pour consulter la sexologue de son école). Non, ma réaction est extrêmement émotive : je pleure beaucoup, j’ai l’impression que je vais perdre mon fils, que la vie ne sera plus jamais la même. J’ai aussi peur de ne pas arriver à m’habituer s’il s’avère qu’il est vraiment trans. Je m’inquiète à l’idée que le cheminement ne sera pas facile pour lui, qu’il risque de devoir faire face à des gens bornés qui pourraient le blesser.
Mon mari trouve mon chagrin disproportionné et ne comprend pas ma souffrance. Il dit que je vois trop loin, que je dramatise et qu’il est fort possible que notre fils soit simplement dans une période où il cherche qui il est.
Je ne veux que le bonheur pour mon fils, aussi suis-je disposée à accepter de le voir devenir fille, si c’est ce dont il a besoin. Mais pourquoi ai-je tellement l’impression de vivre le pire choc de ma vie? (Je tiens à préciser que je fais très attention à ne pas trahir mes émotions devant mon fils; sensible comme il est, je sais que ça le ferait culpabiliser et ça, je ne le veux absolument pas!)
Pour le moment, il nous a demandé de continuer à le traiter en garçon et a dit qu’il nous tiendra au courant s’il désire que ça change. Il semble libéré de nous avoir parlé et est d’excellence humeur depuis. Je devrais être heureuse de le voir soulagé, mais je n’y arrive pas… Et je continue à entretenir l’espoir qu’il se trompe, tout en ayant peur de mal réagir intérieurement s’il ne se trompe pas…
Comment puis-je surmonter cette sensation d’être complètement démolie?
Hermine 
 
Bonjour Hermine,
Merci de partager votre histoire! Je comprends que votre enfant est en période de questionnements face à son identité de genre et ceci peut avoir un impact aussi sur son entourage et c’est pourquoi c’est important de vous outiller et, surtout, de ne pas vous oublier dans tout ça.
 
Tout d’abord, je tiens à souligner votre ouverture face à cette situation. C’est très important pour votre enfant d’avoir un encadrement positif, soutenant et rempli d’amour pendant cette période de questionnements et également pour le futur. Cet encadrement peut prendre plusieurs formes; un entourage acceptant et compréhensif; des ami.e.s et une famille auxquels il peut se confier et sentir de l’amour; un réseau de connaissances et d’aide de cette belle grande communauté LGBTQ+; peut-être même des spécialistes qui pourraient vous guider (autant lui que vous) dans la suite des choses et les options à venir. Je vous suggère aussi de consulter des organismes, forums, groupes Facebook. Ceci vous aidera autant vous, que lui, à tisser des liens d’appartenance avec des gens vivant des situations similaires. Il y a notamment l’organisme Enfants transgenres Canada qui regroupe les parents d’enfants trans partout au Canada, dont de nombreux membres sont en provenance du Québec ! Il vous serait donc possible de communiquer avec d’autres parents qui vivent ou on vécu une situation similaire. Cela étant dit, votre enfant peut se considérer extrêmement chanceux d’avoir une mère qui accueille de façon aussi bienveillante ses questionnements. En offrant la possibilité à votre enfant d’explorer et de découvrir son genre à la maison, vous lui offrez un environnement sécuritaire dans lequel il peut s’émanciper. Explorer son genre peut être un long processus pour certaines personnes, mais vous semblez bénéficier d’une belle communication et d’une belle confiance avec votre enfant, ce qui vous permettra d’être disponible pour le soutenir dans ses prochaines étapes, s’il y a lieu.
 

Vous parlez aussi dans votre message de cette peur qui vous habite. Votre peur est totalement normale, je tiens à vous rassurer. Dans un sens, pour certaines familles, avoir un enfant transgenre peut parfois se comparer à vivre un deuil. Le deuil d’un fils, pour laisser place à une fille. Comme n’importe quel autre deuil, ça prend du temps, un ajustement. Les souvenirs vont toujours rester et votre enfant restera le même, mais plus heureux et davantage lui-même. Sachez qu’au-delà du deuil, vous allez apprendre à redécouvrir votre enfant. Et du même coup, lui aussi va apprendre à mieux se connaître. Votre relation pourra évoluer vers quelque chose d’encore plus vrai et fort. Votre enfant va prendre confiance en lui et en son identité. Cela va lui permettre de s’exprimer autrement et à s’épanouir. Physiquement, il changera. Ses goûts vont peut-être changer, évoluer, mais son coeur et ses valeurs, vont rester les mêmes.
Il ne faut pas vous sentir coupable d’avoir des sentiments négatifs, c’est important de vous occuper de vous et de vos pensées, pour pouvoir encore mieux être présente pour lui dans les moments où il en aura de besoin. Je vous invite à voir la série québécoise Hubert et Fanny (disponible ici: https://ici.tou.tv/hubert-et-fanny). L’histoire principale n’a pas de lien avec le sujet de votre question, mais dans cette sériel, un fils et sa mère vivent quelque chose de super touchant au fil des épisodes. Dans la série, Justin âgé de 16 ans, modifie son prénom pour Jade. La mère de Justin vit des  émotions, difficultés et craintes qui peuvent possiblement être similaires aux vôtres. Je vous laisse découvrir l’histoire, je crois que son parcours vous ressemble et vous aidera, sans doute, dans la situation que vous vivez actuellement.
Avant de conclure, j’aimerais vous inviter à visionner ce court vidéo expliquant le contexte de création de l’organisme Enfants transgenres Canada : Mon enfant est transgenre, je fais quoi ? . Il faut toutefois spécifier que ce vidéo a été créé avant l’adoption de la loi 103 visant à protéger les droits des enfants transgenres au Québec, il y a donc certains éléments juridiques à corriger. Voici également un guide à l’attention des proches de personnes trans qui donne quelques conseils pour les parents.
À ce que je comprends, votre enfant souhaite attendre le mois de septembre pour rencontrer la sexologue de son établissement scolaire. Cette sexologue pourra lui offrir un soutien professionnel nécessaire à la compréhension de son identité. En attendant la rentrée scolaire, vous pouvez prendre contact avec l’association trans de votre région administrative si vous, ou bien votre enfant, désire discuter de ce sujet avec des personnes ayant vécu cette situation : il s’agit de l’association Trans Mauricie Centre-du-Québec. Par ailleurs, si votre enfant a l’occasion de venir à Montréal de temps en temps, je prends la temps de vous parler du projet l’Astérisk. Il s’agit d’un espace sécuritaire pour les jeunes LGBTQ+ ou en questionnement de 14 à 25 ans. Le projet héberge plusieurs organismes jeunesse LGBTQ+, dont Projet 10, Jeunesse Lambda et nous-mêmes, AlterHéros. Il y a également constamment des intervenantes et intervenants sur place pour accueillir les jeunes, écouter leur situation et les guider dans leurs réflexions. C’est également le moment pour ces jeunes de prendre contact avec d’autres jeunes vivant une situation similaire !
Bref, n’oubliez pas que le temps arrange beaucoup de choses. Prenez le temps de discuter, de vous ouvrir. Prenez le temps de vous informer et de bâtir un réseau d’aide. Votre enfant, lui, prendra aussi le temps de son côté, pour mieux se connaître et se découvrir.
 
Si vous avez d’autres doutes, des questions, ou si votre enfant veut, à son tour, nous écrire, n’hésitez surtout pas!

Au plaisir,
Samuel, pour AlterHéros

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