Je me demande si je ne serais pas bisexuelle. Le problème, c'est que je suis toujours en train de me tester à ce sujet...
Bonjour, ça fait plusieurs mois que je me demande si je suis bi. Je crois que toute ma vie j’ai eu ce questionnement en tête « est-ce que je suis attirée par les femmes ? » mais je me rassurais par le fait que je suis attirée par les hommes et que ça me suffit. J’avais peur de me poser la question de mon attirance envers les femmes parce que j’ai grandi dans une famille pas très ouverte sur ça qui considère que c’est bizarre. Du coup j’étais très crispée dans beaucoup de situations parce que parfois je ressentais un sentiment étrange pour certaines filles qui me faisait un peu peur mais je me suis toujours dit que c’était une sorte d’admiration ou de fascination mais je ne sais pas trop en fait.
En regardant des séries ou des films, quand il y avait une histoire d’amour, j’ai toujours essayé de me concentrer plus sur le garçon parce que « c’est lui qui doit m’attirer comme je suis hetero », et quand il y avait un couple de 2 femmes qui s’embrassaient par exemple, je me crispais en mode « tu ne dois surtout rien ressentir, t’es hetero ».
Ça a duré toute ma vie jusqu’au ce que je commence à voir plus de personnes parler de leurs questionnements au sujet de leur orientation sexuelle sur tiktok ou dans des séries ou même dans la vraie vie.
A ce moment là je me suis autorisée à réfléchir à ce que je ressens pour les femmes, et j’ai constaté que ça m’attirait d’embrasser une femme, que je pouvais être attirée sexuellement par elles.
Le problème c’est que je suis tout le temps en train de me demander si je ne me trompe pas, je « teste » cette attirance tout le temps parce que j’ai l’impression que c’est différent de ce que je ressens pour les hommes. Par exemple, j’ai plus l’habitude de regarder les hommes, de ressentir qu’ils m’attirent alors que les femmes je suis un peu perdue entre l’admiration et l’attirance, parfois c’est clair dans ma tête et parfois c’est flou.
Et puis ça varie selon les jours et j’ai beaucoup de mal à m’imaginer en couple avec une fille parce que j’ai grandi avec des modèles de couples hétérosexuels donc c’est dur pour moi de faire la différence entre ce qui m’attire et ce qu’on m’a appris à désirer.
Bref je suis un peu perdue, est-ce qu’en fait je suis bisexuelle ou est-ce que je me fais des idées ?
Bonjour!
Merci pour ta question, à travers ton texte tu sembles avoir une assez bonne compréhension des questionnements qui te préoccupent et des éléments pouvant avoir un impact sur ceux-ci. Si ça te va, je vais revenir sur certains éléments et te donner quelques informations et explications en lien avec ces derniers.
Alors premièrement, être bi ne signifie pas d’avoir une attirance complètement identique pour les hommes et les femmes, séparée à 50/50 pour l’un et l’autre. En réalité, la plupart des personnes bisexuelles ont une attirance différente pour différents genres, ça peut être au niveau de la fréquence et l’intensité des attirances (préférer les hommes, avoir des relations plus profondes avec des femmes, etc.) mais pas uniquement. C’est possible de préférer certaines caractéristiques chez un genre et d’autres totalement différentes associées à un autre genre.
Tu expliques que tu as longtemps tenté de te “programmer” une attirance pour les hommes, d’ignorer ton attirance pour les filles, ou de te convaincre d’une façon ou d’une autre de ton hétérosexualité. En grandissant, beaucoup de gens LGBTQ+ tentent de correspondre à ce qui est attendu de nous, en faisant semblant de se fondre dans le décor de ce que nos proches considèrent comme normal. Une fois devenu adulte, il nous est plus difficile de reconnaître et d’apprécier réellement nos émotions, nos attirances et nos compréhensions de nous-mêmes.
Je comprends donc tes difficultés à mettre des mots sur tes attirances. Par ailleurs, il n’est pas toujours simple de tracer la ligne entre de l’admiration, trouver une personne belle et/ou aimer passer du temps avec elle, et quelque chose de plus profond, de plus intime. Ce type de sentiments peuvent être fluides, changer et évoluer avec le temps et ne pas être parfaitement clairs et évidents à séparer.
Donc, ne pas avoir eu de modèle positif de couple féminin, avoir moins d’expérience et même faire certains efforts pour réprimer ses attirances : après tout cela il est plutôt
normal d’avoir maintenant, consciemment ou non, une certaine résistance ou inconfort à l’idée d’une relation avec une autre femme. Mais nous ne sommes pas uniquement le produit de nos apprentissages et de notre éducation, avec un peu de pratique il est possible de « désapprendre » les valeurs et visions du monde qui nous font plus de mal que de bien.
À ce sujet, tu donnes l’impression d’avoir déjà fait certains progrès encourageants! Par les réseaux sociaux, les médias et par le biais ton entourage, tu as pu être exposée à différents modèles de relations, de préférences, de points de vue et d’expériences en lien avec la sexualité et la romance. Tu t’autorises aujourd’hui à réfléchir sur ton orientation et je crois que tu fais bien. Explorer ce qui nous intéresse dans une relation intime avec une autre personne peut être une belle aventure de découverte de soi.
Je tiens à dire que tu n’as pas à te questionner et te tester indéfiniment dans le but d’obtenir une réponse définitive. Tu n’as pas nécessairement besoin de savoir si tu es bi ou non, mais il peut t’être utile et enrichissant de te laisser la chance d’explorer librement cette partie de toi-même. Se poser des questions et vouloir bien se comprendre ne signifie pas que tu te fais des idées ou que tu n’es pas suffisamment bi. Alors je t’invite à faire preuve de bienveillance, de patience et de compassion envers toi-même à travers ce processus. Ultimement, si tu arrives à une réponse quant à ta bisexualité, tant mieux, mais si pendant un certain temps tu ne sais pas, tu hésites ou tu changes d’idée c’est tout aussi correct et légitime.
Je ne peux pas déterminer ton orientation à ta place, mais j’espère que mes quelques paragraphes parviendront à te rassurer dans ces moments de questionnements. Sache que tu peux toujours nous écrire si tu en a besoin!
Bonne continuation,
Maxime, intervenant·e pour AlterHéros
Iel/they/them, accords neutres