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13 octobre 2021

J'aimerais comprendre comment se forme l'identité de genre d'une personne? Est-ce lié au cerveau et aux hormones?

Bonjour,

J’étais déjà venu ici pour poser une question il y’ a bien longtemps. Je suis assez curieux et j’aime comprendre avant de donner mon point de vue.

Ma question sera liée à l’identité de genre et à son fondement.

Je ne reviendrais pas sur mon positionnement, mais pour faire court, pour moi le monde est neutre et sans cases créer par l’homme, alors soyons libre de ce que l’on est et soyons heureux qu’importe notre identité de genre, notre expression de genre, nos choix, nos désirs, etc. Je connais un peu le sujet et j’ai mon point de vue. Je sais pas pourquoi je précise ça, mais c’est pour dire que je ne suis pas insouciant face à ce sujet, mais pas non plus «clair-voyant». Et que je ne suis pas là pour vexer ou autres, mais pour en apprendre d’avantages. Merci donc pour votre aide.

Avant de poser ma question, je vais tenter d’introduire le sujet.

Si je me trompe pas, les hormones ont un impact sur le développement du corps humain (pilosité, masse musculaire, voix, sexe, etc) et sur le cerveau aussi pour les fonctions motrices (je ne sais pas si j’utilise les bons termes). Donc en théorie, le cerveau est sexué. Dans le sens, deux cerveaux qui se développent différemment bien que similaires avec des prédispositions différentes (plus apte à remplir telles fonctions pour l’un et pas pour l’autre et inversement).

Ma question maintenant est: le cerveau sexué a t-il un impact sur le développement de l’identité de genre, est-ce un facteur, une réalité sur le développement de l’identité ? Ou ce n’est en aucun cas une composante ? (sur le blog de lavieenqueer, il était précisé que la non-binarité n’avait rien à avoir avec son sexe, son expression de genre, ses chromosomes, etc et peut-être que ça n’a rien à avoir avec notre taux d’hormones non plus ?).

Donc, je me demandais comment se formait l’identité personnelle d’une personne. Étant cisgenre, je ne ne suis pas impacté par la transidentité (je ne sais pas si j’utilise le bon terme, mais en gros je suis pas non-binaire ou transgenre), mais je défends fermement la différence d’autrui. Donc, je suis venu chercher des réponses en paix.

Je sais pas si j’ai été clair, j’ai tenté de dire le plus de choses possibles.

Libre à vous de me répondre et merci d’avance.

Matcsl_hxc

Maxim-e

Hello Matcsl_hxc!

 

Je partage ton sens de la curiosité et il me ferait plaisir de partager quelques informations de perspective scientifique concernant le développement de l’identité de genre. Je précise que j’ai une formation en sexologie avec de solides bases biomédicales mais que je ne suis pas neurochirurgien·ne, ni même endocrinologue, et que ma compréhension de certains termes et concepts biologiques plus poussés est relativement simpliste. Mais je crois quand même pouvoir éclairer certaines lanternes.

 

Premièrement, avant de rentrer dans le plus complexe, il serait important de clarifier certaines notions. Les personnes trans sont des gens qui ne s’identifient pas au sexe qui leur a été assigné à la naissance sur la base de l’observation de leurs organes génitaux par le médecin. Les personnes cis ne sont pas trans, iels continuent donc de s’identifier à leur genre assigné tout au long de leur vie. L’identité de genre est le sentiment intime et profond d’être une femme, un homme, une personne non-binaire ou tout autre option, combinaison ou alternance. L’expression de genre est la façon dont on montre son genre par le biais de son apparence, de ses comportements ou de certains codes sociaux typiquement masculins, féminins ou neutres. L’identité et l’expression peuvent interagir d’une multitude de façons, en étant une femme plutôt masculine, une personne non-binaire avec une apparence traditionellement féminine, etc. 

 

Lorsqu’on parle du “sexe biologique” cela fait référence à plusieurs caractéristiques comme les organes génitaux externes et internes, les cellules reproductrices, les hormones, les chromosomes, les gènes (caractéristiques sexuelles primaires), de même que des attributs physiques comme les poils, les seins, la barbe, la forme du corps, la voix (caractéristiques sexuelless secondaires). Tous ces éléments ne viennent pas qu’en deux modèles, il y a tout un continuum de possibilités. Les personnes trans ayant recours à l’hormonothérapie et aux chirurgies peuvent aussi modifier ces différents attributs.

 

Comme tu peux voir c’est plutôt complexe, et il y a beaucoup d’aspects à prendre en compte. Parlant de continuum de possibilités, pour te donner une idée, on estime qu’il y a environ 2% de la population qui est intersexe, c’est-à-dire qu’à la naissance iels ne correspondent pas clairement à la case féminin ou masculin sur la base de leurs organes génitaux. Ça peut sembler minime, mais il faut savoir que dans le monde il y a aussi environ 2% de gens avec des cheveux roux, et 2% de gens avec des yeux verts, et cela n’est pas vu comme une exception ou une rareté.

 

Maintenant, on pourrait se pencher sur les cerveaux. Dit simplement, il existe certaines similarités entre les cerveaux de femmes cis et trans, et vice versa pour les hommes, mais il n’y a pas exactement un modèle de cerveau d’homme et un de femme. Les deux se ressemblent beaucoup plus qu’ils ne diffèrent, et il y a autant de différences entre chaque individu qu’il peut en exister entre les genres. Pour expliquer ces deux points, voici un extrait (traduit) d’un texte très utile de Simon(e) D Sun, candidat·e au doctorat en neuroscience :

 

Lorsque la biologie devient trop compliquée, certains pointent du doigt les différences entre les cerveaux des hommes et des femmes comme preuve d’un binarisme sexuel. Mais un demi-siècle de recherches empiriques a remis en question à plusieurs reprises l’idée que la biologie du cerveau est simplement XY = cerveau masculin ou XX = cerveau féminin. En d’autres termes, il n’existe pas de «cerveau masculin» ou de «cerveau féminin». Cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas de différences observables. Certaines caractéristiques du cerveau peuvent être sexuellement dimorphiques : des différences moyennes observables entre les hommes et les femmes. Mais, comme pour le sexe biologique, le fait de pointer du doigt le «sexe du cerveau» pour expliquer ces différences est erroné et entrave la recherche scientifique.

 

Il est facile de voir les dimorphismes sexuels et de conclure que le cerveau est binaire ; facile, mais faux. Grâce à la participation des personnes trans en recherche, nous avons élargi notre compréhension de l’interaction entre la structure du cerveau, le sexe et le genre. Pour certaines propriétés comme le volume et la connectivité du cerveau, les personnes transgenres possédaient des valeurs se situant entre celles typiques des hommes et des femmes cisgenres, avant et après la transition. Une autre étude a révélé que pour certaines régions du cerveau, les personnes transgenres semblaient similaires aux personnes cisgenres ayant la même identité sexuelle. Dans cette même étude, les chercheurs ont trouvé des zones spécifiques du cerveau où les personnes transgenres semblaient plus proches des personnes ayant le même sexe assigné à la naissance. D’autres chercheurs ont découvert que les personnes transgenres présentent des différences structurelles uniques par rapport aux personnes cisgenres.

 

Concernant le développement de l’identité et des rôles de genre, il y a plusieurs écoles de pensées mais la plupart des chercheur·e·s s’entendent que l’environnement social, l’éducation et la culture y sont pour beaucoup. Ce processus commence à un très jeune âge, par l’observation et l’imitation de comportements, que ce soit avec les pairs, la famille ou l’école. Mais tout n’est pas appris et copié à 100% non plus, il y également une partie qui ressort de l’autonomie et de l’autodétermination. Les gens trans découvrent et expriment leur genre, iels n’ont pas été influencé·e·s ou éduqué·e·s à adopter celui-ci. Il est important de dire que généralement, les jeunes trans ont une identité de genre aussi forte et solide que les jeunes cis de leur groupe d’âge. Tu sais, tu as toi aussi construit ton identité (homme cis dans ton cas) et ton expression de genre (masculine) à partir des modèles et des stéréotypes disponibles dans la société actuelle et de ce que tu as pu observer en grandissant.

 

En conclusion, pour citer l’American Psychological Association :

De nombreux experts pensent que des facteurs biologiques tels que les influences génétiques et les niveaux d’hormones prénatales, les expériences précoces et les expériences plus tardives à l’adolescence ou à l’âge adulte peuvent tous contribuer au développement d’identités trans. Il n’existe toutefois pas d’explication unique des raisons pour lesquelles certaines personnes sont trans. La diversité des expressions et des expériences trans plaide contre toute explication simple ou unilatérale. 

 

Si tu aimerais continuer de t’informer sur les sujets que j’ai touché, voici quelques ressources supplémentaires :

 

N’hésites pas à revenir pour toute autre question ou si quelque chose n’est pas complètement clair!

 

Au plaisir,

 

Maxime, intervenant·e pour AlterHéros

Iel/they/them, accords neutres

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