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15 juillet 2011

Désespoir et espoir: mon processus de coming out

Il vient un temps où les grandes interrogations s’amènent et que la fuite ne suffit plus. C’est un peu ce par quoi j’ai été confrontée.

titanne17

Il vient un temps où les grandes interrogations s’amènent et que la fuite ne suffit plus. C’est un peu ce par quoi j’ai été confrontée. Élevée dans une famille typiquement conservatrice et traditionnelle, avec une mère au foyer et un père pourvoyeur, le chemin sur lequel je m’engageais allait sans doute être parsemé d’embûches et d’aventures plus ou moins heureuses.
Vers l’âge de 12 ans, LA grande question m’ait parvenu à l’esprit. Toutefois, étant trop consciente du milieu familial dans lequel je vivais, j’ai immédiatement refoulé ce soupçon au fond de moi. Je me suis retournée vers les hommes pour dissimuler en quelque sorte qui j’étais. Je ne voulais surtout pas attirer les regards et les interrogations des gens autour de moi. Qui ne c’est jamais fait dire par un oncle ou une tante au Jour de l’An : «Et puis, t’es-tu fait un p’tit chum (une p’tite blonde pour les gars)?». Aussi cliché que ça puisse être, c’est la réalité. La pression sociale est omniprésente autour de nous.
J’ai grandi dans un milieu où la performance, la productivité et l’efficacité étaient de mises. Mes parents ne s’attardaient pas trop sur les réussites et focalisaient davantage sur les erreurs : Sur la marge de perfection qu’il restait à atteindre. Vous comprenez que pour moi, il était impensable d’affirmer mon homosexualité. Dans mon esprit, le dévoilement de mon orientation sexuelle engendrait la recherche d’une nouvelle demeure. Je serais l’erreur de la famille, hors normalité. Ce n’était donc pas envisageable.
Vers l’âge de 17 ans, j’ai entrepris mes études collégiales à l’extérieur de ma ville natale. J’ai été séparée de ma famille. À mon arrivée dans ma nouvelle ville, j’ai décidé d’assumer pleinement qui j’étais. De toute manière, je n’avais rien à perdre, étant donné que je devais refaire intégralement mon réseau social. L’annonce de mon homosexualité s’est bien déroulée. Ça ne changeait rien pour mes nouveaux amis. Plusieurs mois se sont écoulés sans accros et j’étais bien avec mes choix. J’ai fini par rencontrer une fille avec laquelle une relation s’est développée avec le temps. Tout le réseau social de ma ville natale ignorait mon orientation sexuelle.
Tout a dérapé le soir de la St-Valentin. La fille que je fréquentais, à l’époque, avait décidé de m’envoyer des fleurs à mon emploi et de passer me voir en fin de soirée. Le hic, c’est que la meilleure amie de ma mère travaillait avec moi et que je faisais même du covoiturage avec cette dernière. Sur le chemin du retour à la maison, j’ai eu une confrontation avec son amie et c’est là que je lui ai tout dit. Le lendemain matin, en présence de mon père, ma mère m’a mis au pied du mur, voulant que je réponde à ses questions. J’en avais marre de vivre avec ce poids sur mes épaules, alors j’ai dévoilé mon secret. À mon grand étonnement, mes parents n’ont eu aucune réaction, mais ce n’était que le choc de la nouvelle. Une semaine plus tard, je subissais les reproches et les grands serments de ma mère qui remettait en question ma normalité et même où elle avait failli dans mon éducation. On m’accusait de vivre un trip de jeunesse, alors que je ne dévoilais que la vraie personne que j’étais. J’ai même entendu des phrases assommantes comme : «T’as été tout ce qu’on a jamais réussi, mais aujourd’hui tu t’avères à être la plus grande déception de notre vie».
Cette phrase résonne toujours dans mon esprit et c’est principalement pour cette raison que je ne tiens pas à entretenir de relation de proximité avec mes parents. Les confrontations et les conflits ont duré un an. Un an où j’aurais préféré être invisible pour ne pas voir mes parents.
Pour autant, toute la haine, la colère et la frustration que j’ai pu vivre à l’intérieur de moi. Je me dis que si j’ai pris 5 ans pour accepter qui j’étais, mes parents doivent sensiblement passer par le même processus. On ne peut pas forcer les gens à nous accepter, mais on doit respecter les gens dans leur cheminement. J’en suis rendue là dans ma réflexion.
Aujourd’hui, mes parents disent accepter mon orientation sexuelle, mais je me suis beaucoup éloignée d’eux. Il y a toujours une marque au fond de moi. Disons, qu’il y a certaines blessures qui se cicatrisent, sans pour autant s’effacer à tout jamais.
Je crois que durant tout ce processus d’acceptation, le seul choix qui nous revient est d’accepter et d’affirmer qui nous sommes. Ce choix, je l’ai eu que partiellement. Je ne crois pas que j’étais prête à m’affirmer ouvertement devant mes parents. Le cours de la vie s’est passé ainsi et je ne regrette pas le parcours par lequel je suis passée. Depuis ces évènements, je crois que je suis une personne plus forte et qui a davantage de confiance en elle, et ça, ça n’a pas de prix.
On dit que le changement doit s’effectuer à même ses racines. Alors, si le dévoilement de mon orientation sexuelle a été utile, tout simplement, pour susciter des changements dans les valeurs bien ancrées de ma famille, c’est déjà un gain important pour moi.
La raison qui m’a poussé à faire ce témoignage est d’abord, que j’ai la conviction que chaque chose à sa raison d’être et qu’aujourd’hui, je ne serais sans doute pas la même personne que je suis sans tous ces accros. J’ai eu la chance de rencontrer certaines personnes significatives durant mon processus d’acceptation. Je désire donc donner ce même espoir que l’on m’a transmis autrefois.
«Toutes les épreuves ont leur raison d’être et si on sait les accepter comme il faut, elles peuvent être salutaires» disait Yvette Naubert. En effet, le plus beau cadeau que la vie a pu me donner est d’être bien avec qui je suis.

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