Je pensais être un garçon transgenre et bi mais après je pensais être une femme cisgenre et lesbienne... Suis-je non-binaire?

Bonjour, je m’appelle Salomé, j’ai 13 ans. Mon genre assignée à la naissance est femme.

Je suis complètement perdu, je me sens en même temps femme, homme et les deux à la fois. Pendant plus de 6 mois je pensais etre un garçon transgenre et bi mais après je pensais etre une femme cisgenre et lesbienne. Maintenant je ne sais plus trop, j’ai en même temps envie que mes prénoms soit il, lui, eux et avoir un prénom plus masculin (se qui me faisait pensais que j’étais transgenre) mais en même temps je ne me sens pas vraiment garçon je me sens plus entre les deux. Ce qui me fait pensais être non-binaire. On m’a déjà dit d’essayer de m’imaginer plus tard et de voir qu’elle genre j’ai mais je vois qu’une personne entre les deux ou perdu.

Et après il y a mon orientation qui me pose aussi beaucoup problème.

Il y a des moments où juste les filles m’attire, des moments où les garçon m’attire seulement et il y a des moments où les deux m’attire. Ce qui correspondrait à bi, mais quand 1 genre m’attire l’autre me dégoute comme si je le renier.

Enuite, il y a le fait que en ce moment un garçon me plait (On va l’appeler Christian) mais une autre fille le plait aussi (Et elle Lila) je ne comprends pas comment c’est possible, ce n’est pas du polyamour car ca alterne entre les deux.

Je n’y comprends vraiment plus rien, alors est ce que vous partiez m’aider ?

Merci d’avance, très bonne journée.

Salomé

Séré

Bonjour Salomé!

 

Merci de faire confiance à AlterHéros avec ta question 🙂 

Je trouve d’ailleurs qu’elle est très bien articulée et il me fera grand plaisir d’y répondre.

Alors, tu te questionnes sur ton identité de genre, qui semble fluctuer dans le temps. Tu alterne entre te sentir fille, te sentir garçon et te sentir les deux en même temps ou aucun des deux. Tu te demandes donc si tu es un garçon trans, une fille lesbienne ou une personne non-binaire, et tu as de la difficulté à te projeter dans l’avenir. Également, tu te poses des questions sur ton orientation sexuelle et sur le polyamour. 

Je me reconnais beaucoup dans ce que tu décris. Quand j’ai réalisé que mon sexe assigné à la naissance ne correspondait pas à mon identité de genre, j’ai passé beaucoup de temps à essayer de comprendre celle-ci et à essayer de trouver une ou des étiquettes pour la décrire. Cette quête a été assez difficile pour moi et pendant longtemps, la seule chose que je pouvais dire avec certitude était que je n’étais pas une fille. 

Je trouve qu’il y a beaucoup de pression lorsqu’on découvre que l’on est peut-être trans ou non-binaire à déterminer exactement quel mot décrit le mieux notre genre et aussi de déterminer si on est une personne trans “binaire” (homme ou femme trans) ou non-binaire. Le fait est qu’il se peut que nos termes changent, ou que plusieurs nous conviennent. Même les femmes et les hommes cisgenres n’ont pas tou.te.s la même définition de ce qu’est être une femme ou un homme, et cette définition peut changer au cours de leur vie. C’est la même chose pour nous. Il est aussi possible de s’identifier à la fois comme trans et comme non-binaire, et aussi comme homme ou femme non-binaire.  Regardons quelques mots pour voir s’ils pourraient correspondre à ton expérience:

Non-binaire: Une personne non-binaire est une personne dont l’identité de genre n’est pas exclusivement homme ou femme. Il s’agit d’un terme parapluie qui regroupe plusieurs identités de genre. Tu peux trouver ici un lexique définissant plusieurs identités de genre non-binaires

Trans: Une personne trans est une personne dont l’identité de genre ne correspond pas à celle qui lui a été assignée à la naissance. Être trans ne veut pas dire transitionner, c’est plutôt une question d’identité, certaines personnes trans ne veulent pas ou ne peuvent pas transitionner. Théoriquement, les personnes non-binaires sont trans, car peu de gens se font assigner un genre non-binaire à la naissance, mais ce ne sont pas toutes qui s’identifient ainsi.

Fluide dans le genre: Une personne fluide dans le genre a une identité de genre qui fluctue dans le temps. Certaines personnes fluides dans le genre ont une identité de genre qui fluctue d’un jour à l’autre, d’une semaine ou d’un mois à l’autre, sans qu’il y ait de raison particulière qui semble sous-tendre ces changements. D’autres personnes dont le genre est fluide vont remarquer que leur genre change ou s’exprime différemment selon leur humeur, leurs interactions avec le monde extérieur ou même le temps qu’il fait !

Est-ce que tu te reconnais dans certaines de ces définitions? Ça peut être chouette de trouver des mots qui nous correspondent exactement, mais je crois aussi que ce n’est pas quelque chose qui est nécessaire ou même possible pour certaines personnes. Il faut aussi comprendre que d’adopter une étiquette ou une autre ne coule rien dans le béton. C’est 100% normal de réaliser qu’un mot qu’on a déjà utilisé pour se décrire ne fonctionne plus pour nous. 

Tout juste après avoir réalisé que je n’étais pas trans, je trouvais que l’étiquette demigirl m’allait bien, puis ensuite j’ai résolument adopté les termes genderqueer et genderfluid, puis j’ai été attiré par le mot demiboy. Aujourd’hui, je me décris généralement simplement comme non-binaire, et parfois plus précisément comme personne bigenre dont les deux genres sont homme et genderqueer.

Je ne crois pas qu’à aucun de ces moment j’étais dans le tort. C’est simplement que ma perception de mon genre changeait et que j’avais donc besoin d’utiliser de nouveaux mots pour le décrire. Mais je comprends bien la détresse de ne pas pouvoir mettre le doigt sur un mot qui nous sied parfaitement. C’est désemparant de voir qu’autour de nous la plupart des personnes semblent bien certaines et bien fières d’être un homme ou une femme, et qu’on ne peut pas affirmer notre genre avec autant de certitude. 

D’ailleurs, c’est normal d’avoir de la difficulté à se projeter dans l’avenir en tant que personne non-binaire, car on n’a presque aucun modèle pour nous aider. Alors qu’on grandit en voyant des hommes et des femmes dans les médias, à l’école et dans notre famille, il demeure très rare qu’on soit exposé.e.s à des personnes non-binaires adultes et heureuses. Il y a aussi beaucoup de préjugé sur le fait d’être trans ou non-binaire (et j’en détruis quelques uns ici!)

Une chose qui peut aider est de s’entourer de modèles de personnes trans et non-binaires. Ce n’est pas toujours possible dans la vie de tous les jours, mais heureusement, il y a le monde virtuel qui peut compenser. Voici une liste de médias sociaux de personnes trans et non-binaires inspirantes:

Instagram

(en français)

 

(en anglais)

Facebook

(en français)

(en anglais)

YouTube

(en français)

(en anglais)

 

Pour ce qui est des pronoms, je peux te rassurer en te disant qu’il y a bien des personnes non-binaires qui utilisent les pronoms il et lui ainsi que des accords masculins. Ce n’est donc pas du tout un problème de vouloir les utiliser même si on n’est pas un garçon ou qu’on en est pas certain. 

Les pronoms font partie de l’expression de genre. L’identité de genre, c’est ce qu’on ressent à l’intérieur comme étant notre identité, alors que l’expression de genre est ce qui est visible, comme notre façon de s’habiller, de se coiffer, de parler et de bouger. L’identité et l’expression de genre n’ont pas besoin de coïncider! Donc, tout comme les filles ont le droit d’avoir une expression de genre dite masculine, comme d’avoir les cheveux courts, et les garçons, d’avoir une expression de genre dite féminine, comme de porter des robes, les personnes non-binaires peuvent avoir toutes sortes d’expression de genre. Cela inclut les pronoms, donc ce n’est pas parce qu’on est non-binaire qu’on doit utiliser des néo-pronoms (iel, yal, ille, ol, etc.). L’expression de genre, comme l’identité de genre, peut aussi être fluide. Il est donc bien correct de changer de pronoms en cours de route ou d’utiliser des pronoms différents avec des personnes différentes!  

 

Ensuite, tu nous dis que tu as du mal à définir ton orientation sexuelle. On définit généralement les orientations sexuelles par la capacité d’être attiré.e sexuellement par une certaine catégorie de personnes. Il est donc possible de se définir comme bisexuel.le même si on n’est pas toujours attiré par plusieurs genres en même temps, par exemple si tu as la capacité d’éprouver de l’attirance envers les hommes et les femmes, même si tu ne ressens pas ces attirances en même temps. Un mythe concernant la bisexualité est qu’il faut avoir une attirance égale et constante envers les hommes et les femmes pour se définir ainsi. Dans les faits, plusieurs personnes bisexuelles sont majoritairement attirées par un genre en particulier et éprouvent à l’occasion une attirance pour des personnes d’un autre genre. 

Il est aussi possible de définir son orientation sexuelle comme fluide, si elle varie dans le temps. Il arrive d’ailleurs à plusieurs personnes genderfluid d’avoir une orientation sexuelle fluide, en particulier si elles observent un lien entre l’expression de leur propre genre et leurs attirances envers les autres. Moi par exemple je ressens plus facilement une attirance envers les personnes de tous genres quand je me sens plus féminin, alors que la majorité du temps je suis principalement attiré par les hommes. Voici une réponse que j’ai écrite à ce sujet si tu veux cogiter un peu plus là-dessus.

Ça peut aussi être assez difficile de définir son orientation sexuelle quand on est non-binaire, car plusieurs étiquettes, comme hétérosexuel.le et homosexuel.le, font référence à notre propre genre. J’aime beaucoup la réponse de maon collègue Anaïs à ce sujet, dont voici un extrait:

L’orientation sexuelle réfère aussi au sentiment d’identité personnelle et sociale basée sur ces attirances, les comportements pour les exprimer, et possiblement l’appartenance à une communauté de personnes qui les partagent.

Les personnes non-binaires ont toujours fait partie des différentes communautés LGBTQ+. Par exemple, certaines personnes non-binaires s’identifient en tant que lesbiennes puisqu’elles sont attirées par les femmes et ressentent une affinité avec cette « étiquette » et la communauté lesbienne. Certaines personnes vont quant à elles favoriser des identités comme queer qui peut faire référence à toute idée, pratique, personne ou identité allant à l’encontre des normes structurant le modèle social cisgenre et hétérosexuel. D’autres personnes non-binaires vont se dire bisexuelles, pansexuelles, homosexuelles, etc. dépendamment de leur affinité et de leur sentiment d’appartenance à cette communauté. Au final, les personnes non-binaires peuvent s’identifier comme elles le veulent !

Si tu veux, je t’encourage à expérimenter avec certains termes pour voir avec quelle identité tu te sens plus à l’aise. L’orientation sexuelle est fluide dans le temps et peut changer au travers de nos expériences. Prendre le temps de s’écouter et de se faire confiance est essentiel dans ce processus.

Il est aussi important de préciser que tu es la seule personne qui puisse définir ton orientation sexuelle/romantique et le choix d’une “étiquette” te revient. Ce processus est intime, personnel et unique à chacun.e. Par contre, se catégoriser est aussi un choix personnel et tu n’as aucune obligation de le faire. Le plus important est que tu sois heureux.se dans tes relations et avec toi-même !

Comme je le dis souvent, il arrive que les réalités que l’on vit soient plus complexes que les mots qu’on utilise pour les décrire. Ces mots sont en grande partie là pour nous aider à identifier nos réalités et ainsi mieux les partager avec les autres, rien ne nous oblige à correspondre à 100% aux termes que l’on choisit pour se décrire. Par exemple, je dis généralement que je suis gai, car je suis en général attiré par les hommes et que je m’identifie à cette communauté, même s’il m’arrive d’être aussi attiré par les femmes et les personnes non-binaires.

 

Finalement, tu te poses des questions sur le polyamour. Tu dis qu’un garçon te plaît, mais aussi une fille, et que ton attirance alterne entre les deux. Tu ne sais pas où te positionner par rapport à ces attirances, puisque tu n’es pas attiré.e par ces deux personnes en même temps et tu as donc de la difficulté à imaginer une dynamique relationnelle qui fonctionnerait pour toi. 

D’abord, le polyamour réfère à une façon de vivre ses relations amoureuses, et non pas aux attirances que l’on ressent. En effet, il est possible d’être monogame tout en ayant des sentiments amoureux pour plusieurs personnes, mais en entretenant une relation romantique ou sexuelle avec une seule d’entre elles. Par exemple, je suis présentement en relation monogame avec mon copain, mais ça ne m’empêche pas d’avoir parfois des crush ou des squish envers d’autres personnes, incluant des femmes et des personnes non-binaires.

Le polyamour, ce n’est pas nécessairement être en couple avec deux personnes en même temps. Il se peut donc que ça soit quelque chose qui te convienne même si tes attirances fluctuent dans le temps. Tout comme d’autres facettes de ton identité, tes préférences à ce sujet peuvent aussi évoluer dans le temps et il est bénéfique d’explorer plusieurs options pour trouver celle(s) qui te convien(ne)t le mieux. Voici un extrait d’une réponse de ma collègue Cat à ce sujet qui explique bien différentes formes que peut prendre le polyamour:

Il existe différentes formes de multipartenariat, soit le polyamour, ou le fait d’être impliqué dans plusieurs relations amoureuses de manière simultanée et transparente aux yeux de tous les partenaires. Ce type de relation peut diverger selon le contexte. Par exemple, il peut y avoir un arrangement avec un.e partenaire principal.e et d’autres secondaires et le statut de chaque relation peut changer et évoluer avec le temps. Aussi, tous les partenaires impliqué.es ne sont pas obligé.es d’avoir d’autres partenaires. En effet, si toi tu ressens le besoin d’avoir d’autres partenaires mais que ton conjoint ne souhaite pas rencontrer d’autres personnes, c’est tout à fait possible dans la mesure où celui-ci est confortable dans la situation. Toutes ces choses se discutent et se clarifient selon les contextes. J’aime souvent dire qu’il y a autant de personnes polyamoureuses que de manière de vivre le polyamour, l’important c’est d’explorer dans la mesure du confort et des besoins de tout le monde. Le bien-être de chaque personne doit demeurer au centre des préoccupations de chaque personne impliquée dans le polyamour, même si parfois cela implique de faire des compromis et de limiter certaines envies.  

Il existe aussi le couple ouvert, soit le fait d’avoir une relation de couple avec un.e partenaire principal.e émotionnellement exclusive tout en se permettant d’avoir d’autres partenaires sexuels. Encore une fois, les couples ouverts peuvent être délimités et vécus de manières différentes. Voici quelques éléments sur lesquels se questionner lorsqu’on ouvre notre couple: est-ce qu’on doit avoir l’accord de l’autre personne pour avoir des relations sexuelles? Est-ce qu’on doit se dire absolument lorsqu’on a des relations sexuelles avec d’autres personnes? Peut-on avoir plusieurs partenaires sexuels en même temps ou un.e seul.e? À quel fréquence? Peut-on avoir des relations sexuelles avec des ami.es? Que faire si une des deux personnes ne se sent plus bien dans la configuration ouverte du couple? Tant de questions qui ne peuvent qu’être répondues par des ententes/arrangements/règles entre les personnes impliquées.

Ensuite, il existe le trouple, soit une configuration amoureuse entre trois personnes (ce modèle pourrait être étendu à davantage de personnes selon le contexte). Dans ce type de relation, tous les partenaires sont en relation avec les autres, à l’inverse de certaines configurations qui peuvent impliquer différents partenaires qui ne sont pas nécessairement en relation avec les autres.  

Finalement, certaines personnes choisiront de pratiquer l’anarchie relationnelle, soit le fait de refuser toute hiérarchie entre les différents partenaires. Dans ce cas, les règles ou les limites ne seront pas nécessairement définies d’un commun accord, la personne pourra naviguer entre différent.es partenaires en accordant une importance équivalente entre ses relations (qu’elles soient platoniques, romantiques, sexuelles ou amicales). Souvent, les personnes qui vivent en anarchie relationnelle refusent les normes associées au couple et tout ce que cela implique.

 

Il y a plusieurs ressources qui peuvent t’aider à t’informer sur le sujet si tu veux creuser davantage cette question. Je te suggère ce vidéo ainsi que les articles de La vie en queer à ce sujet

J’espère que cela t’aide à normaliser ce que tu vis. Tes sentiments par rapport à ton identité de genre, ton orientation sexuelle et les attirances que tu éprouves envers plusieurs personnes sont tout à fait normaux et sains. L’équipe d’AlterHéros sera toujours là pour répondre à tes questions si tu éprouves le besoin de nous réécrire.

Je t’envoie tout plein de courage et je te souhaite bonne chance dans tes explorations.

 

Séré, intervenant pour AlterHéros 

 

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