27 avril 2020

En découvrant mon identité non-binaire, je découvre que je ne suis pas attiré.e envers des personnes cisgenres. Est-ce que je suis un.e Trans Chaser?

Bonjour !
Je découvre mon identité non-binaire et je pose beaucoup de question par rapport à mes attirances. En fait je crois que je n’ai pas d’attirance émotionel ou sexuelle pour les personnes Cisgenre. ( Il est un peu tard pour s’en rendre compte à 28 ans mais bon !! life is life ! )
Je suis donc attiré par les homme trans , les femmes trans et les personnes non-binaire. Je suis en période de découverte alors l’acceptation de ma propre identité est nouvelle pour moi ! Je lis un peu sur la communauté Trans et j’ai entendu parlé des Trans Chaser , est-ce que je suis un.e trans chaser parce que je ne suis pas attiré et ne veux pas de personne cis dans ma vie ? Comment être adéquat.e dans ma recherche de partenaire ?
Je ne sais pas si ma question faut du sens mais bon je ne veux vraiment pas être inadéquat.e !
Merci pour votre aide
Zi

Séré

Bonjour Zi!
Merci de faire confiance à AlterHéros avec tes questionnements! Je dois t’avouer que je suis bien content de répondre à cette question, car c’est un sujet qui m’intéresse beaucoup. 
D’abord, tu te demandes si le fait d’être uniquement attiré.e par les personnes trans et non-binaires fait de toi un.e trans chaser.
Commençons par voir ce qu’est un.e trans chaser. On peut considérer qu’un.e trans chaser est une personne qui fétichise et objectifie les personnes trans. Plusieurs pièges qui mènent à l’objectification des personnes trans sont nommés dans cette réponse de mon collègue Guillaume au sujet de la représentation des personnes trans dans la pornographie : 
Lorsque nous nous interrogeons sur quelles sont les représentations positives des personnes trans dans la sphère publique ou dans les médias, on s’aperçoit qu’elles sont malheureusement souvent représentées uniquement sous une forme de fétichisation sexuelle via la pornographie. La fétichisation, c’est le fait de réduire les corps de personnes trans uniquement à un objet d’excitation. La pornographie met souvent en scène des femmes trans ou des hommes trans n’ayant pas eu d’opération au niveau des organes génitaux. Toutefois, il existe une multiplicité d’expériences et de trajectoires vécues par les personnes trans. Chaque personne trans, qu’elle s’identifie comme homme, comme femme ou comme non-binaire est ainsi unique et il est extrêmement problématique de les définir uniquement par rapport à leurs caractéristiques génitales. Une prudence que l’industrie de la pornographie n’applique pas en représentant les personnes trans de façon uniforme avec exactement les mêmes caractéristiques corporelles.
Par ailleurs, il est possible de se questionner sur les raisons pour lesquelles les images sexuelles d’une femme avec un pénis ou un homme avec une vulve puissent être une source d’excitation. Il arrive que nous soyons sexuellement excités par certaines formes de tabous ou d’interdits que notre société véhicule. Le fait d’être sexuellement excité par de la pornographie trans peut donc directement être lié à cette sphère du tabou ou de l’interdit. 
Donc, de quoi doit être consciente une personne qui veut avoir des relations respectueuses avec les personnes trans?

  • Que chaque personne trans ou non-binaire a un parcours qui est unique et qui lui appartient
  • Que chaque personne trans ou non-binaire a une personnalité et des intérêts qui dépassent son parcours trans
  • Qu’aucune personne trans ou non-binaire ne doit des détails ou des explications sur son parcours et son corps

Je trouve que la façon dont tu as formulé le message que tu nous as envoyé est digne d’intérêt. En effet, tu nommes surtout dans ta question le fait que tu n’es pas attiré.e par les personnes cisgenres, alors qu’un.e trans chaser, je crois, aurait plutôt tendance à parler de son attirance spécifique envers les personnes trans. 
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles une personne trans ou non-binaire peut ne pas éprouver d’attirance pour les personnes cisgenres.
Avoir des relations amoureuses et romantiques avec des personnes cis quand on est trans peut apporter plusieurs sources de stress, comme de choisir le moment où on révèle qu’on est trans et devoir anticiper la réaction qui suivra. C’est souvent aussi devoir se mettre dans le rôle d’un.e enseignant.e et d’avoir à expliquer ce qu’est la dysphorie, comment on a réalisé qu’on était trans, pourquoi on a choisi de transitionner d’une façon ou d’une autre et d’autres choses qui font partie de notre identité et qu’on peut ne pas vouloir ou savoir expliquer. Devoir inculquer toutes ces notions à un.e partenaire tout en sachant qu’iel pourrait possiblement ne jamais comprendre tout à fait ce que l’on vit, ça peut être drainant.
Par ailleurs, si une personne trans ou non-binaire a beaucoup de dysphorie par rapport à ses organes génitaux, elle peut éprouver de la jalousie par rapport aux partie génitales d’un partenaire cis, ce qui peut rendre difficile de maintenir une relation saine. Par exemple un homme trans gai qui a de la dysphorie par rapport au fait de ne pas avoir de pénis peut trouver trop difficile de naviguer des relations sexuelles avec des hommes cisgenres. 
Au contraire, avoir un.e partenaire trans quand on est trans peut être une expérience très validante et euphorisante. Être une personne qui fait partie d’une (très petite!) minorité n’est pas toujours facile, et avoir un.e partenaire qui fait partie de la même minorité nous permet de nous sentir moins seul.e et d’avoir une connexion plus forte. Aimer une personne qui sort comme nous des normes cisnormatives, c’est puissant et libérateur.
Historiquement, ça a toujours été plus facile pour les personnes trans hétérosexuelles d’avoir accès à des soins de transition, car le « but » d’une transition pour les médecins et psychiatres « experts » de la question était de réussir à avoir un partenaire cisgenre et une relation hétérosexuelle typique. Les personnes trans gaies, bisexuelles, pansexuelles ou ayant un.e partenaire trans étaient, et sont encore parfois, exclues des possibilités de transition médicale. Aimer et désirer une autre personne trans, c’est faire un pied de nez à l’hétéronormativité et à la cisnormativité.
Bien sûr, il n’y a aussi des difficultés qui peuvent émerger du fait d’être une personne trans en relation avec une autre personne trans. Par exemple, personnellement, j’ai trouvé que, j’ai trouvé que, lorsque j’étais en relation avec une personne trans, c’était parfois difficile de devoir gérer deux « sources » de dysphorie dans une relation sexuelle, deux transitions en même temps, deux familles pas toujours ouvertes d’esprit. Mais le fait de vivre ces défis peut créer un lien plus fort, tout dépend de chaque personne et de chaque relation! 
Tu es loin d’être la seule personne non-binaire à te sentir attiré.e principalement par les personnes trans et non-binaires. Lorsque le site de petites annonces Craigslist acceptait les annonces personnelles, le mot-clé t4t (trans for trans) était largement utilisé par les personnes trans cherchant des dates ainsi des partenaires romantiques et sexuel.le.s trans. De nos jours, c’est utilisé comme hashtag et c’est aussi un subreddit.
Personnellement, je n’ai pas vraiment de préférence entre un.e partenaire trans ou un.e partenaire cis, mais je constate que cette facette de leur identité joue un grand rôle sur plusieurs aspects de notre relation. Par ailleurs, je tends à m’entourer majoritairement de personnes trans, car je me sens plus en sécurité et compris quand je suis dans un groupe d’ami.e.s qui sont tou.te.s trans ou non-binaires. 

J’espère que ma réponse t’éclaire par rapport à tes questionnements! Si tu veux parler de ce sujet davantage ou nous poser une autre question, n’hésite surtout pas à nous recontacter.

Séré, intervenant pour AlterHéros

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