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28 mars 2024

J'ai le syndrome de la Tourette. Je n'arrive plus à différencier un questionnement légitime sur mon orientation sexuelle d'une obsession due à mon syndrome.

Bonjour,
Je m’adresse à ce site, puisque cela fait maintenant la moitié de ma vie que l’obsession au sujet de mon orientation sexuelle me suit (j’ai 24 ans).
Accrochez-vous, ça va être long. Je suis un littéraire dans le sens le plus strict. Prenez un thé et c’est parti…
Tout d’abord, un peu de contexte… je ne voudrais pas biaiser votre constat en affirmant une chose de prime abord…
Ayant une très, très, très forte libido de nature et une tendance à la soumission, mes premiers fantasmes remontent à la maternelle, et étaient globalement bisexuels (sans distinction, disons). Qu’importait qui était acteur(e) tant que je subissais quelque chose d’humiliant.
Je suis tombé amoureux, pour la première fois, à 5 ans, d’une fille. Je l’ai aimé pendant quelques années, à quelques passages à vide près.
Mais j’ai toujours été assez timide avec les filles. Elles déclenchaient rougeurs et crispations chez moi.
Au début de l’école primaire, je fréquentais très peu de filles. Mes fantasmes de soumission allaient volontiers vers des garçons, en particulier quand ils m’étaient hostiles. Il faut dire que j’avais le contact plus facile, plus naturel avec les garçons, qui me ressemblaient, qu’avec les filles, inconnues et différentes.
J’ai toutefois commencé à éprouver du désir, peu à peu, envers les filles durant cette période. Pas forcément de l’excitation, mais un désir de proximité, de contact physique, sensuel.
Fin de l’école primaire, alors que je côtoyais de plus en plus de filles, mes fantasmes sexuels allaient de plus en plus vers elles. Que ce soient des filles de ma classe ou même mes institutrices.
J’ai eu une puberté assez précoce (fin CM2) et ma libido a alors explosé.
Mon attrait pour les femmes a complètement explosé et j’ai vadrouillé sur internet à la recherche de la moindre photo représentant une femme. Il suffisait qu’elles soient à demi-nues pour me faire jouir (désolé des détails techniques).
Mes fantasmes ont alors été très hétérosexuels, mais je conservais toutefois cette régularité du fantasme homosexuel, qui en un sens, peut-être pour le côté « interdit » ou « tabou social », pouvait être plus humiliant pour moi.
J’ai été sensible à un garçon de ma classe, qui était très androgyne, en 6ème. Mais la même année, j’ai aimé successivement trois filles de ma classe (dont surtout deux). Après cela, je n’ai été amoureux que de filles (une en 5ème, une en 4ème, deux en 3ème).
J’ai commencé à sortir avec des filles entre la 4ème et la 3ème. Sensation encore nouvelle, je ne savais pas quoi en penser, mais je savais que cela ne m’était pas désagréable.
Le lycée a été l’occasion de mes premiers baisers stimulants avec des filles, et j’ai rencontré ma femme en terminale, à 17 ans.
Ce fut avec elle que j’ai effectué ma première fois, et j’ai toute de suite adoré le sexe, jusqu’à le pratiquer quotidiennement avec elle, surtout la première année.
Cela fait aujourd’hui plus de sept ans que je suis avec elle. En sept ans, nous sommes devenus libertins. J’ai eu l’occasion de faire un plan à trois avec elle et une autre femme, de fréquenter également deux autres femmes en dehors pour un plan d’un soir. Cela a, mine de rien, exacerbé ma nature anxieuse. Deux rencontres faites en sauna libertin ne m’ont guère rassuré, puisque le stress généré par le contexte m’a causé des pannes et m’a fait m’interroger sur la possibilité que les femmes ne m’attirent plus autant qu’avant.
Pourtant, lorsque je l’ai fait avec une amie, avec qui j’étais déjà en confiance, je n’ai pas eu le moindre problème.
Même chose avec ma femme, avec qui j’apprécie toujours autant explorer la sexualité.
Alors, où est le problème me direz-vous ?
Le voici :
Durant ces années, j’ai continué d’aller sur du porno, régulièrement. Cela n’a pas nui à ma sexualité de couple, mais m’a conduit à avoir de nouveaux fantasmes. Je pense avoir épuisé tout ce qu’il est possible de voir dans les catégories lesbiennes et pornos avec femmes, du plus soft au plus hard (en restant légal). Alors, je me suis mis à regarder du porno shemale, puis, petit à petit, du porno gay.
Depuis quelques mois, ces fantasmes homosexuels se font de plus en plus présents. Ils vont de pair avec cette vieille inquiétude d’adolescence, que j’ai développé en remarquant qu’il m’arrivait d’avoir des rêves homoérotiques, et des fantasmes gays. Jusqu’à il y a quelques mois, les seuls hommes qui pouvaient m’attirer étaient androgynes. Mais depuis que j’ai accepté cette idée, les fantasmes ont évolué. Les corps d’homme, réellement masculins, qui ne m’ont alors jamais fait d’effet (mater ne m’a jamais effleuré l’esprit dans les vestiaires des garçons, à l’adolescence), se sont mis à être sources d’inquiétudes. Cette question « et si j’aimais les corps masculins ? » « et si peu à peu je me mettais à ne plus aimer les femmes ? » « et si j’étais bisexuel à préférence gay sans la savoir parce que je n’ai pas tenté ? ».
Paradoxalement, plus je me pose la question, plus je ressens de l’excitation envers les hommes (puisque je fixe là-dessus, et que j’ai une libido facile). Et plus j’ai peur, plus je cherche à « vérifier » que les femmes m’attirent toujours. Je suis donc stressé à chaque fois que je regarde du porno féminin, ou à chaque fois que je fais l’amour. Ce stress me conduit donc à être moins facilement excité, puisque totalement crispé, et à donc interpréter cela comme un signe que je deviens exclusivement gay, puisque parfois une idée hétéro ne me fait rien car j’angoisse à l’idée de ne pas bander, et une idée homosexuelle provoque une sorte de sensation dans mon pénis par peur de bander.
Et même avec ça, j’arrive toujours à coucher avec ma femme sans panne. Ça devrait pourtant me mettre sur la voie quant au fait que j’aime profondément les femmes.
Cette peur a été renforcée par une certaine addiction à du porno de soumission hard « sissy », dans lesquels on s’imagine à la place de la femme, dominée par l’homme. Cette idée provoque en moi une excitation torride, alors même qu’elle me rebute. Je n’arrive pas à différencier un fantasme d’un vrai désir.
Peur également renforcée par une phase étrange que j’ai traversé, durant laquelle je me suis mis à être comme… un peu rebuté par le vagin. Une phase de sexualité plus réduite avec ma femme, il y a un an et demi, et dans laquelle elle s’est mise à bloquer et être dégoûtée quant à son propre sexe. J’ai l’impression qu’elle m’a transmis ce blocage, que je n’avais ni au début de notre relation, ni même il y a deux ans encore. Aujourd’hui, cette phase tend à se réduire, puisqu’il m’arrive de jouir en lui donnant un cunnilingus, mais cette phase a laissé en moi une ouverture pour ma peur de l’homosexualité. « Puisque je peux fantasmer sur le pénis et que j’ai un blocage sur le vagin, c’est que je deviens gay ».
Et même l’attirance pour les pieds que j’ai développé à l’adolescence, porté quasi-exclusivement sur les femmes, s’est mis à participer à mon angoisse, parce que j’ai lu une fois que cela pouvait être le signe d’une homosexualité latente (je précise qu’il s’agit d’une très haute attirance, non d’une exclusivité, puisque j’aime d’autres pratiques et je peux jouir par la pénétration ou autres préliminaires qui concernant d’autres parties du corps de la femme).
Attirance pour les pieds qui devient parfois un évitement, quand je suis trop angoissé… évitement du coït par peur de l’échec, et donc préférence d’un rapport où ma femme me domine à ses pieds.
J’aime la vie avec les femmes. Elle me rend heureux, épanoui. Je n’ai jamais eu l’impression de « manquer » de quelque chose en étant avec une femme.
J’ai un entourage dans lequel la bisexualité et l’homosexualité sont très largement acceptés. Moi-même, je me bats contre les idées homophobes (ma femme est bisexuelle). Je n’ai aucune crainte à être l’ami d’un homme homosexuel. Alors, pourquoi cette obsession ? Si je suis bisexuel, ne devrais-je pas l’accepter simplement ? Beaucoup de mes proches savent déjà que je me suis posé la question, et que j’ai possiblement une tendance bi, et pourtant, je bloque toujours dessus. Pourquoi dois-je bloquer sur cette idée alors même que mon entourage accepte déjà cette éventualité ?
J’ai le syndrome de la Tourette, ma vie est structurée par les tics et les TOCs en tous genres. Je n’arrive plus à différencier un questionnement légitime d’une obsession due à mon syndrome.
Suis-je un bisexuel qui a du mal à s’assumer pour une raison qu’il ignore encore ?
Suis-je un hétérosexuel anxieux avec une forte libido et un imaginaire propice aux scénarios différents grâce à son éducation ouverte ?
Peut-on devenir homosexuel pour de vrai ?
Peut-on avoir une orientation sexuelle à l’adolescence, très marquée, qui change à l’âge adulte ? (Ce serait quand même gros pour mon cas précis !)
Je suis paumé. Toujours amoureux, aucune panne avec ma femme, mais une angoisse terrible sur ma sexualité, et une obsession sur l’homosexualité, avec des processus de vérifications réguliers.
Et une addiction au porno qui a fait évoluer mes fantasmes.
Je vous ai écrit un pavé, mais en étant aussi précis, j’espère que d’autres jeunes, qui traversent une phase similaire ou qui reconnaissent quelques points, pourront trouver en mon récit un écho salvateur. Et en votre réponse un point de réflexion propice au soulagement de leur conscience.
Bon courage, et merci à ce site d’exister.
Onuhad

Guillaume Perrier

Salut Onuhad!
Merci pour la confiance que tu portes envers AlterHéros. Ton témoignage est extrêmement complet et démontre une connaissance approfondie de ta propre situation. C’est tout à ton honneur! Naviguer les différentes dimensions de la sexualité peut entraîner son lot de stress et de questionnements, je suis heureux de constater que tu as pris l’initiative de nous écrire. Si je comprends bien ta situation, tu ressens une grande angoisse concernant ton orientation sexuelle. Tu ne sais plus comment t’identifier entre tes désirs ou fantasmes envers d’autres hommes et ton amour profond envers ta conjointe. Pourtant, la possibilité d’être bisexuel pose obstacle. Tu affirmes aussi vivre avec le syndrome de la Tourette, ce qui te soulève des questionnements à savoir si tes réflexes réguliers de vérification de ton orientation sexuelle ne seraient pas liés à ce syndrome plutôt qu’à des questionnements légitimes de ta sexualité.

J’aimerais d’abord discuter un peu avec toi des orientations sexuelles. En fait, il est possible de nommer deux différentes dimensions à l’orientation : soit l’orientation sexuelle et l’orientation romantique. L’orientation sexuelle, c’est notre attirance physique pour certains corps ou certaines personnes. Notre attirance romantique, c’est notre attirance émotionnelle pour certaines personnes. Ces dimensions peuvent parfois être similaires, mais elles peuvent aussi varier. Si tu regardes le schéma ici-bas, il est possible de remarquer que nos attirances sexuelles et émotionnelles peuvent s’inscrire à différentes intensités selon le genre des personnes. Il est donc possible de ressentir une attirance romantique exclusivement pour les femmes, mais de ressentir une attirance physique envers des femmes et des hommes. Et vice versa! De plus, les orientations sexuelles et romantiques ne sont pas nécessairement fixes dans le temps, nos attirances peuvent fluctuer avec le temps, au rythme de nouvelles rencontres, de nouveaux besoins, de nouvelles curiosités que la vie nous apportent. Le fait de possiblement ressentir une attirance physique pour des hommes n’efface aucunement l’attirance romantique et sexuelle que tu peux ressentir pour des femmes, dont ta conjointe. En fait, tout n’est pas nécessairement noir ou blanc, et c’est très correct de ressentir des formes d’attirances qui se situent dans des zones de gris! 

De plus, l’orientation sexuelle peut aussi se décliner en trois aspects : les désirs, les comportements et l’identité. Pour citer la réponse de ma collègue Marion, «Les désirs, ce sont nos attirances et envers qui elles se déclarent (est-ce qu’on est plutôt attiré par tel ou tel type de corps, tel ou tel type de personne, qui on aurait envie d’embrasser, etc.). Les comportements, ce sont les actions que l’on pose réellement, à l’inverse des désirs qui renvoient à l’imaginaire (ex : avoir embrassé notre amie, avoir eu une relation sexuelle avec un homme, avoir regardé les fesses d’une personne dans la rue). Finalement, l’identité, c’est l’appropriation et le choix de mots pour se décrire par rapport à notre identité sexuelle (hétéro, lesbienne, pansexuel.le, etc.).» Certains hommes qui auraient principalement des liaisons intimes et amoureuses avec d’autres femmes peuvent donc décider de s’identifier comme hétérosexuels, puisque c’est le terme qui correspond le mieux à leurs comportements. D’autres pourront décider de s’identifier comme bisexuels, puisque c’est le terme qui correspond le mieux à leurs désirs. L’identité, c’est vraiment propre à chaque personne, sa façon de se percevoir et son sentiment d’appartenance à une orientation sexuelle plutôt qu’une autre.

Tu l’auras compris : je ne peux pas répondre directement à ta place à savoir si tu es hétérosexuel ou bisexuel. Tu es le seul qui a la possibilité de définir tes attirances et de déterminer quel terme te convient le mieux. Mais pour ce faire, j’ai bien évidemment beaucoup d’autres choses à te partager! 🙂

En ce qui concerne ton fétichisme des pieds, celui-ci n’a absolument aucune corrélation avec l’orientation sexuelle. Tu affirmes avoir lu qu’un fétichisme de pieds pouvait être un signe d’une homosexualité latente. Dis-moi, où as-tu trouvé cette information? Il y a certes une théorie freudienne selon laquelle le pied serait un substitut du pénis et que l’attraction que l’on ressent serait le signe d’une homosexualité latente… Toutefois, les théories de Freud sont énormément contestées dans le milieu scientifique, particulièrement en sexologie et en psychologie. En effet, Freud a inventé la majorité de ses dits patients et se décrit d’abord et avant tout comme un homme de lettres, non pas comme un scientifique. Certain.e.s scientifiques décrivent même Freud comme étant parmi les plus grandes fraudes scientifiques de l’histoire. Tu peux lire ce court article sur le sujet de la psychanalyse si cela t’intéresse. Bref, l’attirance pour les pieds n’est aucunement un signe d’une orientation sexuelle en particulier. Après tout, on sait à quel point les parties cachées du corps ont parfois la capacité d’être plus désirables ou excitantes qu’un corps entièrement dénudé. Le fétichisme des pieds est donc très commun, et ce, peu importe le genre et peu importe l’orientation sexuelle. 

Puis, discutons un peu de fantasmes et de pornographie si tu me l’autorises. Pour citer une réponse précédemment écrite sur ce sujet, «D’abord, la pornographie est une grande industrie dont l’objectif premier est de faire de l’argent. On s’entend là-dessus, n’est-ce pas? Pour ce faire, la porno nous vend des images et des scénarios dont l’objectif est d’allumer notre imagination et, conséquemment, nous exciter. Puisque notre cerveau est notre principal organe sexuel, il est normal d’être excité par certaines images dont nous n’avons pas l’habitude de voir au quotidien.
En ce sens, il est nécessaire de distinguer que ce qui nous excite sur la pornographie ne constitue pas nécessairement ce qui nous excite dans la vraie vie. Certaines personnes hétérosexuelles vont préférer regarder de la pornographie homosexuelle par exemple, sans pour autant que ces personnes veulent avoir une expérience intime avec une personne du même genre qu’elles. Il est donc complètement normal d’être excité par des scènes ou des acteurs/actrices pornographiques sans pour autant que cela constitue des activités sexuelles que nous désirons expérimenter. Or, ces préférences pornographies ne sont pas forcément liées à nos attirances de la vie de tous les jours. »
À la lumière de ces informations, je vais tenter de faire du pouce sur tes différentes questions.

  1. Suis-je un bisexuel qui a du mal à s’assumer pour une raison qu’il ignore encore ? Je ne peux pas répondre pour toi à savoir si tu es bisexuel ou non. Je peux toutefois te poser certaines questions. Dans une société hétéronormative comme la nôtre, il est fréquent que nous ayions grandi avec une certaine perception de la sexualité, des relations amoureuses et des stéréotypes de genre qui influencent parfois nos réactions et nos comportements. Par exemple, lorsque ta conjointe et toi avez pour la première fois ouvert votre couple, cela a peut-être nécessité des discussions et entraîné une certaine déconstruction des valeurs familiales avec lesquelles nous avons grandi : pour la simple et unique raison qu’il existe peu ou pas de représentation positive de ce type de relations amoureuses lorsque nous étions petits. – Et je tiens à préciser, c’est tout à votre honneur que votre couple ait navigué dans ces réflexions et reconfigurations relationnelles! 🙂 – Cette même analyse est possible en ce qui concerne des questionnements concernant notre orientation sexuelle. Il existe une pression sociale nous dictant qu’un homme doit agir de telle façon, et lorsque nos désirs et comportements ne s’inscrivent pas dans ce moule, cela peut parfois être déstabilisant. Alors voici mes questions : quelle est ta perception des différentes orientations sexuelles? Est-ce que tu ressens une crainte concernant la possibilité de développer des désirs pour d’autres personnes que des femmes? As-tu une perception particulière des hommes bisexuels? Est-ce que tu aimerais avoir une expérience intime avec un autre homme (en compagnie ou non de ta conjointe)? Dans tous les cas, et pour reprendre tes mots, tu as le privilège d’être entouré de personnes très ouvertes à la diversité sexuelle avec qui tu peux partager ces divers questionnements. Et peu importe le fruit de tes réflexions, tu demeures maître de tes propres choix de mots pour définir ton orientation. Être hétérosexuel, hétérosexuel avec certaines curiosités pour des personnes du même genre, bisexuel dans une relation amoureuse hétérosexuelle… ce sont toutes des possibilités tout autant valides les unes que les autres.
  2. Suis-je un hétérosexuel anxieux avec une forte libido et un imaginaire propice aux scénarios différents grâce à son éducation ouverte ? Encore une fois, tu es le seul qui peut déterminer si tu es hétérosexuel ou non. Il est toutefois normal de ressentir une forme d’anxiété concernant la sexualité, surtout lorsque cela concerne une possible identité sexuelle minoritaire. Si ce sujet t’interpelle, je t’encourage à lire cette réponse que j’ai composée récemment qui vise à différencier le processus d’acceptation d’une identité sexuelle minoritaire d’un trouble obsessionnel compulsif avec obsessions sexuelles.
  3. Peut-on devenir homosexuel pour de vrai ? On ne devient pas homosexuel, comme l’on ne devient pas hétérosexuel, bisexuel, pansexuel ou asexuel. On le découvre, simpement. Ce que l’on choisit toutefois, c’est le terme que nous voulons revendiquer (ou non!) pour mettre un mot sur notre identité, nos désirs et nos comportements. Et la façon dont nous nous définissons peut fluctuer et varier avec le temps, tout comme nos désirs et préférences le peuvent.
  4. Peut-on avoir une orientation sexuelle à l’adolescence, très marquée, qui change à l’âge adulte ? (Ce serait quand même gros pour mon cas précis !) L’orientation sexuelle peut effectivement fluctuer avec le temps. Pour certaines personnes, l’orientation sexuelle sera consolidée et fixe dès le jeune âge alors que pour d’autres personnes, cela peut varier. C’est propre à chaque personne! Et pour répéter mes mots précédemment écrits, la découverte d’une attirance physique pour certaines personnes ne remplace pas nécessairement les attirances physiques que nous avions déjà pour d’autres personnes. Cela peut s’inscrire de façon complémentaire. 🙂

  5. J’ai le syndrome de la Tourette, ma vie est structurée par les tics et les TOCs en tous genres. Je n’arrive plus à différencier un questionnement légitime d’une obsession due à mon syndrome.

Cette section est rédigée par Noah, personne coordonnatrice du programme de Neuro/Diversités à AlterHéros, un programme par et pour les personnes LGBTQ+ et neurodiverses, autistes, asperger, vivant avec le syndrome de la Tourette ou autrement neurodivergentes. D’abord, il est compréhensible que cela puisse sembler difficile de différencier un questionnement légitime d’une obsession liée à ton syndrome, particulièrement parce qu’il y a certains messages ou attitudes qui puissent rendre difficile la compréhension de soi-même ou de se croire soi-même lorsqu’on est neurodivergent.e ou quand on vit avec une neurodivergence.

Beaucoup de personnes neurodivergentes se questionnent par rapport à leurs questionnements de cette façon-là, c’est-à-dire qu’elles se questionnent sur la légitimité de leurs questionnements, s’ils sont liés à des qualités dites obsessives. Dans ces moments, il peut être intéressant d’explorer ou de questionner ces pensées obsessives, surtout en ce qui concerne les pensées qui se centrent sur des anxiétés. Par exemple, si on a des pensées de nature obsessive (ce qui est défini d’abord par soi-même!), comme des pensées obsessives selon lesquelles qu’on va peut-être dire des choses impolies aux personnes qu’on aime, il est possible que cela puisse nous préoccuper beaucoup même si on sait pertinemment qu’on ne dit presque jamais des choses impolies aux personnes qu’on aime! Il devient alors intéressant de se questionner sur ce type de pensée, leur source et sur des mécanismes pour les désamorcer.
Ceci dit, le fait de se questionner sur sa sexualité – même si il y a une certaine fréquence répétitive – ne veut pas dire nécessairement qu’il s’agit des pensées obsessives. En fait, la plupart des personnes – neurodivergent.e ou neurotypique – ont tendance à se questionner sur la sexualité de manière fixe ou répétitive (ou obsessive si c’est comme ça que la personne souhaite le définir). La sexualité et les enjeux connexes sont parfois très complexes !! Particulièrement avec l’ensemble des tabous autour de la sexualité, de l’homosexualité, de la bisexualité, des fétiches, etc., il pourrait être difficile de ne pas y penser de manière un peu répétitive ou fixée. Il y a aussi le fait que pour beaucoup des personnes neurodivergent.e.s, leurs pensées ont souvent une fréquence obsessive ou répétitive ; cela veut dire qu’on aura la tendance de se fixer sur des choses précises, voire surtout sur des choses difficiles ou qui nous rendent anxieux ou anxieuses. Si les pensées sur ces questionnements occupent une trop grande place et que tu te sens perturbé à ce niveau, il est possible d’en parler avec quelqu’un de confiance et/ou un.e thérapeute. Toutefois, le fait de se questionner beaucoup sur la sexuailté n’est pas en soi illégitime ou invalide à cause que l’on est aussi neurodivergent.e. On peut être neurodivergent.e et avoir des questionnements valides et légitimes concernant notre sexualité! 
La sexualité et les questionnements reliés peuvent être particulièrement compliqués si on est neurodivergent.e. Il n’existe pas beaucoup de ressources sur la sexualité chez les personnes neurodivergentes et beaucoup des ressources existantes sont créées par les personnes neurotypiques pour les proches des personnes neuroatypiques. (Mais il existe de plus en plus des ressources créées par et pour les personnes neurodivergentes !) Il pourrait être vraiment difficile de ne pas intérioriser les messages qui disent que les sexualités neurodivergent.e.s sont « incorrectes », « perverses » ou même la présomption selon laquelle les personnes neurodivergent.e.s n’ont pas « réellement » une vie sexuelle et qu’on est « juste confus.e », etc. Les préjugés et incompréhensions au sujet de la sexualité des personnes neurodivergentes sont nombreux! Le fait d’être neurodivergent.e va nécessairement dire que sa propre sexualité peut être définie comme neurodivergente, parce qu’il n’est pas possible de séparer une personne de sa neurologie. (Attention: Je ne veux pas dire que toutes les personnes neurodivergentes vont considérer leur sexualité comme neurodivergente, mais je parle plus généralement de cela comme une possibilité).
Tu dis que ta vie est structurée par les tics et les TOCs, est-ce que tu avancerais l’idée que ta sexualité est également structurée par ces tics et ces TOCs? Cela est seulement un problème s’il y a des choses que toi-même tu trouves dérangeantes ou inquiétantes. Est-ce que tu as déjà pris l’occasion d’exporer les façons dans lesquelles tes tics et tes TOCs touchent à ta sexualité? Est-ce que c’est quelque chose qui t’intéresse de faire? Est-ce que ta conjointe est au courant du syndrome de la Tourette avec lequel tu vis et, si oui, est-ce que cette dernière t’offre du soutien à ce niveau? Comment est-ce que tu perçois ta neurodivergence? Chez les personnes neurodivergentes, il arrive que lorsqu’on essaie de nier ou de minimiser nos particularités neurodivergentes (soit les tics et les TOCs ou d’autres choses de similaire), il est possible que ça nous provoque plus d’anxiété, ce qui à son tour va entraîner une plus grande visibilité de nos particularités neurodivergentes. 
Enfin, est-ce que tu as du soutien concernant le syndrome de la Tourette ou est-ce un sujet sur lequel tu souhaiterais un tel support?

Finalement, tu affirmes être heureux avec ta conjointe. Que celle-ci te rend heureux et épanoui. Je suis moi-même très heureux pour toi de savoir qu’une personne puisse t’apporter ce bonheur! Je suis certain que tu as déjà la possibilité de partager ces questionnements avec elle, à en lire votre degré de confiance et d’aisance à communiquer ensemble. En parler avec des personnes de confiance, comme ta conjointe, peut être une solution intéressante pour tenter de démystifier tes questionnements. Peut-être qu’ensemble vous trouverez des pistes de réflexions, voire même de possibles expérimentations, qui répondent à la fois à votre situation et vos besoins et qui peuvent même enrichir votre vie de couple. Qu’en penses-tu?

Je tiens à te remercier pour ta question et le partage très complet de ta situation. Je t’encourage à nous écrire à nouveau si tu en ressens le besoin, même de l’autre côté de l’Océan, AlterHéros demeure disponible pour nos ami.e.s de France!

Guillaume, pour AlterHéros
Avec le soutien de Noah, responsable du programme de Neuro/Diversités

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